Afrique du Sud

Règlement de compte: Zuma chasse Mbeki
L’heure de la revanche a sonné pour Jacob Zuma. A peine débarrassé d’une inculpation de détournements de fonds, le président du Congrès national africain (ANC) et la direction du parti au pouvoir en Afrique du Sud ont exigé samedi la démission immédiate du chef de l’Etat Thabo Mbeki, lui aussi membre de l’ANC, accusé d’avoir manipulé la justice.

Thabo Mbeki a annoncé dimanche, dans un disours à la nation, qu’il acceptait la décision de la direction de l’ANC et qu’il avait présenté sa démission. Ce discours avait été précédé d’une ultime réunion du cabinet, constitué principalement de fidèles du chef de l’Etat. 

Publicité

Ce coup de théâtre est le point culminant d’une crise qui dure depuis plusieurs années en Afrique du Sud, et déchire les héritiers de Nelson Mandela. L’année dernière, Jacob Zuma a finalement battu Thabo Mbeki pour la présidence de l’ANC, devenant ainsi le candidat du parti dominant à l’élection présidentielle de 2009, et privant Mbeki d’un troisième mandat.

Le dernier obstacle sur le chemin du pouvoir pour Jacob Zuma était cette inculpation pour détournement de fonds liée, en particulier, à un contrat d’armements avec des sociétés françaises. Un juge sud-africain tenait le sort de Zuma entre ses mains, la semaine dernière, alors qu’il devait statuer sur la légalité de cette inculpation.

Une caricature (ci-dessous) dans la presse sud-africaine avait alors montré le degré de tension qui existait dans la société autour de cette affaire, montrant Zuma sur le point de « violer » la justice. Jacob Zuma avait été précédemment jugé, et acquitté, dans une affaire de viol.

Publicité

Au cours d’une réunion de son Comité exécutif national tenue vendredi et samedi, l’ANC a examiné le rôle joué par Thabo Mbeki dans cette affaire. Les principales attaques sont venues des partenaires historiques de l’ANC, le parti communiste sud-africain et la centrale syndicale Cosatu, qui en veulent surtout à Mbeki pour sa politique économique libérale et son échec à tenir l’agenda social de l’alliance au pouvoir.

Thabo Mbeki, fils d’un compagnon de cellule de Nelson Mandela et lui-même cadre dirigeant de la lutte de libération sud-africaine, n’avait guère d’autre choix que d’accepter le verdict de la direction de son parti. Son mandat à la tête du pays ne s’achève qu’au premier semestre 2009, mais, en cas de refus, une procédure de destitution aurait pu être engagée contre lui au Parlement où l’ANC dispose d’une écrasante majorité.

Cette décision du Comité exécutif marque la première vraie rupture au sein du mouvement de Mandela, et pourrait entraîner une scission, que certains politologues jugent inévitable à terme, entre les différents courants de l’ANC. Plus vieux mouvement politique moderne du continent africain -il a été fondé en 1912-, l’ANC est en effet un front uni qui va de nationalistes conservateurs à une aile communiste  : cette alliance a fait sa force pour combattre le régime de l’apartheid, elle a peut-être atteint aujourd’hui ses limites.

Photo  : Jacob Zuma, leader de ANC, août 2008 (Rogan Ward/Reuters).

Par Pierre Haski | Rue89 | 20/09/2008 | 14H46

 

En partenariat avec Image

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Publicité



Publicité