Bénin : A l’école de la politique

Tous les vieillards qui encombrent les allées du pouvoir, dehors ! Si cela n’est pas dit aussi impoliment, on n’en est pas loin. « Et esse in modo » disent les Latins. Tout est dans la manière.

Ainsi nos jeunes gens et nos jeunes filles éructent des menaces. Ils piaffent d’impatience de prendre d’assaut l’espace public. Ils tiennent à rajeunir la classe politique. Les élections ne sont plus loin. Les paris sont ouverts. Rien de bien nouveau sous le soleil. Mais le verbe est de plus en plus haut, le ton de plus en plus radical. Doit-on s’en offusquer ? Plutôt avoir affaire à une jeunesse qui a du caractère, une jeunesse qui sait donner de la voix qu’à une jeunesse amorphe, indifférente. La sagesse des nations ne dit pas autre chose : « Il faut que jeunesse se passe ».

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Cela dit, les jeunes feront ce qu’ils voudront. Seule compte la volonté du peuple. Les vieillards qu’ils souhaitent défenestrés ne sont pas éternels. Mais en termes de relève, les jeunes ne sauront faire l’économie d’un détour par l’école de la politique. En effet, la politique est un champ de savoir et de savoir faire. Nul ne peut s’y illustrer sans un apprentissage préalable. Voici au moins quatre étapes sur les sentiers d’une indispensable initiation.

1 – Tuer en soi l’idée selon laquelle on peut être « politicien » ex nihilo, c’est -à-dire en partant de rien. Tout le monde est tenu de faire de la politique, entendue étymologiquement comme « la construction de la cité ». Chacun, en effet, doit apporter sa pierre à l’édifice commun. Mais personne n’est obligé de s’engager comme acteur dans le jeu politicien, c’est-à dire dans la conquête et dans la conservation du pouvoir d’Etat, casquette partisane sur la tête, slogans et cris de guerre à la bouche. Ceux qui entendent jouer un rôle, doivent, comme au théâtre, apprendre et connaître leur rôle. Ils doivent être dans la peau du personnage qu’ils entendent incarner. C’est un préalable. Ici, pas de génération spontanée.

2 – Devenir un gestionnaire dans tous les sens du terme. La gestion, en son sens premier, c’est l’acte d’administrer les intérêts ou les affaires de quelqu’un. L’apprenti politicien est tout naturellement un gestionnaire en puissance, puisqu’il aspire à gérer les affaires publiques.

La gestion, en son second sens, en lien direct avec la politique, c’est gérer des intérêts contraires. Cela revient, sans se renier, à tenir la ligne d’équilibre entre des intérêts en conflits, en nuisant le moins possible à l’intérêt général. Enfin, la gestion, en son sens final, c’est conduire des hommes. Les Bambara soulignaient déjà l’extrême complexité d’une telle tâche : « Pour conduire son troupeau de bœufs, disaient-ils, le berger n’a besoin que d’un bâton. Mais pour qui veut conduire des hommes, c’est un homme, un bâton » (Fin de citation). L’aspirant politicien doit aller à l’école de ces trois types de gestion.

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3 – Savoir communiquer. La communication est une science. Elle fait objet de recherches et d’études. Elle repose sur des principes et des fondamentaux. Ne pèsera d’aucun poids le politicien qui ne sait pas exprimer ses pensées, expliquer ce qu’il ambitionne de faire, partager ses rêves. Ce politicien restera comme une belle source, mais dont l’eau ne sert à rien. On n’est pas loin d’une forme de stérilité sévère.

Voici, en exemple, une formule qui condense toute l’efficacité de l’action de communication. C’est le « DIRCOM ». D, comme dimension. I, comme intensité. R, comme répétition. C, comme contraste. O, comme originalité. M, comme mouvement. Par ailleurs, en communication, nos gestes, nos expressions, nos postures, voire nos silences, parlent plus fort et s’entendent mieux que nos paroles.

4 – Etre un homme ou une femme d’idée, de conviction et de courage. Les idées, ce sont les semences qu’on met en terre dans la perspective des moissons futures. Il faut apprendre à être un homme ou une femme d’idées, au risque de passer pour un politicien improductif. La conviction se fonde sur la confiance en soi, l’adhésion ferme à ses idées pour s’éviter d’être une girouette qui tourne au gré de tous les vents, un pauvre hère qui transhume d’une mangeoire à une autre.

Le courage, enfin, c’est la force morale, la force d’âme pour faire face aux vagues déferlantes de la politique qui, pour parler comme l’autre, « n’est pas un dîner de gala ».

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