Tropisme vers les présidentiables du Nord
(lire ici la chronique)
Pour faire court: Tropisme veut dire: Force obscure qui pousse un groupe, un phénomène, à prendre une certaine orientation.
Citant le Professeur Amoussou Yéyé, auteur de ladite chronique, nous retenons: ‘’qu’il s’agit d’un fait socio-anthropologique qui, dans son déroulement obéit à une loi et mérite de ce fait, une approche scientifique». Nous voudrions par notre modeste contribution, rappeler la vérité des faits pour dire que Sourou Migan Apithy ne s’était pas allié à Hubert Koutoukou Maga dont il aurait favorisé l’accession à la primature en mai 1959 et à la magistrature suprême en 1961 ; à cause de ses intérêts stratégiques.
Rappel historique
1°) Création du Bloc Populaire Africain (Bpa) en opposition à l’Union Progressiste du
Dahomey (U.P .D.) On sait qu’aux élections à l’Assemblée Législative Française du 10
Novembre 1946, l’U.P.D. fit prévaloir une candidature unique en investissant Apithy et en amenant Emile Poisson à retirer sa candidature contre la promesse d’être désigné comme représentant du Dahomey à l’Assemblée de l’Union Française.
Cependant, aux élections à l’Assemblée Constitutive Locale dite Conseil Général le 15 Décembre 1946, Monsieur Poisson fit encore acte de candidature que l’UPD n’accepta pas au motif qu’il ne pouvait pas cumuler le mandat de Conseiller Général avec celui de Conseiller de l’Union Française qui lui était promis. M. Poisson entra alors en dissidence avec l’Upd.
De même, M. Ahomadégbé, alors en service à Avrankou, fit acte de candidature à ce Conseil Général mais combattu par Oké Assogba et Ahouamenou Michel qui prétendaient que seuls, les Aïnonvi pouvaient conséquemment défendre les intérêts de la région de Porto-Novo. Ahomadégbé dut aller se faire élire à Abomey, chez les Houégbadjavi. Le Comité Directeur de l’Updn’étant pas intervenu pour résoudre cette crise, Ahomadégbé entra lui aussi en dissidence. C’est dans ces conditions que, sous l’instigation de Dessanti (Administrateur Colonial). M. Poisson, en alliance avec Ahomadégbé, crée le BPA et c’est ainsi que Ahomadégbé et Poisson se présentèrent tous deux aux élections au Conseil Général, sur une liste opposée à celle de l’Upd.
2) La coalition qui porta Maga au poste de premier ministre
La dislocation de l’Upd amorcée avec la naissance du BPA fut accentuée puis estompée, à l’occasion des élections du 17 Juin 1951 pour le renouvellement de l’Assemblée Législative Française où devait siéger deux (02) Députés de notre pays. Face à la liste Apithy – Dunglas représentative des Aïnonvi, s’affrontaient la liste GEN (Groupement Ethnique du Nord) de MAGA, la liste BPA de Poisson- Ahomadegbe, et la liste Upd Orthodoxe de Zinsou-Kpakpo Gilbert.
Aux élections des Conseillers Généraux en 1952, l’UPD Orthodoxe de Zinsou et le BPA de Poisson – Ahomadegbe furent écrasés par le Gen et le Prd. Dès lors, aux élections à l’Assemblée de l’Union Française en 1953, les deux partis malheureux présentèrent une liste commune Zinzou – Ahomadegbe, alliance consacrée par la création de l’Udd (Union Démocratique du Dahomey) en 1955.
Peu après, en 1956, la question de l’adhésion ou non de l’UDD ou RDA, intervenue à un moment où, sous la houlette de Houphouet , le RDA avait depuis longtemps jeté par-dessus bord, l’orientation et la plate forme programmatique de lutte anti-impérialiste de sa naissance à Bamako en 1946; fit éclater l’Udd en Udd-Rda d’Ahomadégbé et Udd- Convention de Zinsou.
C’est ainsi qu’il convient de rappeler qu’aux élections du 31 Mars 1957 pour mettre en place le premier Conseil de Gouvernement de la Loi-Cadre, présidé par le Gouverneur de la Colonie mais formé et dirigé par un Vice-président choisi parmi les élus locaux, le PRD l’emporte avec trente cinq (35) sièges contre sept (07) à l’Udd-Rda, douze (12) aux «Indépendants», pour la plupart dissidents du MDD. APITHY fut en conséquence porté au poste de Vice-président du Premier Gouvernement de la Loi-Cadre qui comptait:
– Six (6) ministres Prd- Deux (2) ministres Indépendants (Label Darbou)
– Deux (2) ministres choisis parmi les grands électeurs du Mddpar-dessus la tête de MAGA.
Dès lors, Ahomadégbé et Maga se coalisèrent dans l’opposition pour en découdre avec Apithy. Cette ligne de clivage conjoncturel et ses mutations constituent le substratum ou, si l’on veut, la cause première de notre instabilité politique et partant de notre retard de développement, à travers les évènements marquants de la vie politique de notre pays, jusqu’à la proclamation de notre indépendance nationale le 1er Août 1960.
Ainsi, après la victoire du «OUI» au référendum Gaulliste du 28 Septembre 1958, APITHY, qui avait dû former le 02 Juillet 1958, son troisième gouvernement de la Loi-Cadre avec:
– Deux (02) ministres PRD dont Hubert Maga, chargé du Travail et des Affaires Sociales, convoque, sous la pression de l’UDD, le corps électoral pour le 02 Avril 1959 en vue du renouvellement de l’Assemblée.
Les élections, marquées par une atmosphère explosive et de violentes échauffourées donnent:
– 28 Sièges au Prd
– 22 sièges au Rdd
– 20 sièges à l’Udd
Porté à la tête de la nouvelle Assemblée comme Président par un vote unanime des députés, le 25 Avril 1959, Ahomadégbé s’opposera à l’investiture de Apithy, candidat au poste de Premier Ministre, Chef du Gouvernement et amènera l’Assemblée à désigner et à investir Maga, le 22 Mai 1959.
Apithy se retrouvera dans le gouvernement au poste de Ministre sans portefeuille. C’est le gouvernement né de la coalition Ahomadégbé – MAGA contre Apithy qui se trouvait en place le 1er Août 1960.
(Extrait du livre du lieutenant Colonel Philippe AKPO sur son témoignage sur le Rôle et les Implications des Forces Armées Béninoises dans la vie politique Nationale. 2eme édition pages 237à241).
Cotonou le 11juin 2009
Lieutenant-Colonel en Retraite Philippe AKPO
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