Tidjani Serpos attaque la poursuite de la réalisation de la Lépi

{mosimage}Le député Ismaël Tidjani Serpos vient de saisir la Cour d’un recours en inconstitutionnalité contre l’application de plusieurs dispositions de la loi 2009-10 portant organisation du Rena et réalisation de la Lépi. Les violations des articles 6, 17, 24, 25 et 43 par les structures en charge de la réalisation de la Lépi fondent l’action de l’élu de la Nation. Pourquoi ce  recours n’intervient-il que maintenant ?

La question mérite de se poser quand l’on sait que  ces dénonciations datent de plusieurs mois. Mais pour les personnes avisées, Ismaël Tidjani Serpos  n’aurait pas eu d’éléments de preuve pour étayer son recours si ce n’est qu’aujourd’hui. Les rapports de la Cps-Lépi, de la Mirena et du groupe de travail sur la Lépi constituent aujourd’hui en effet des pièces à conviction. D’autre part, ce recours ne semble juste profiter de l’existence d’éléments de preuve ; il ressemble bien à une réaction à la poursuite du processus de réalisation de la  Lépi, malgré l’abrogation de la loi 2009-10 depuis deux semaines maintenant. L’opposition, par cette initiative, vient de montrer de nouveau qu’elle ne se laissera pas faire face au dilatoire orchestré par le pouvoir en place et certaines institutions acquises à sa cause. C’est de nouveaux épisodes du duel mouvance-opposition qui s’annoncent.

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Lire son recours adressé à la Cour constitutionnelle

Objet : Recours en inconstitutionnalité  contre l’application faite de certaines  dispositions  de la loi 2009-10 relative à la LEPI

J’ai l’honneur  de saisir la Cour constitutionnelle aux fins de  déclarer contraire à la Constitution l’application qui a été faite de la loi n°2009-10 portant réalisation du RENA et de la LEPI  prise en ses  dispositions suivantes :

1/L’article 6 de la loi qui exige la réalisation du RENA selon une démarche progressive par aire opérationnelle dispose:
« Le recensement électoral national approfondi est une opération de collecte des informations qui identifient les électeurs. Il est réalisé selon les méthodes techniques du recensement général de la population et de l’habitat complétées par la technique biométrique de collecte des données faciales et digitales.
Il est conduit suivant une démarche progressive par aire opérationnelle.
Les aires opérationnelles dans lesquelles se déroule  le recensement électoral national approfondi sont au nombre de six (06) à savoir :

 aire opérationnelle Ouémé-Plateau ;
 aire opérationnelle Littoral-Atlantique ;
 aire opérationnelle Mono-Couffo ;
 aire opérationnelle Zou-Colline ;
 aire opérationnelle Borgou-Alibori ;
aire opérationnelle Atacora-Donga.

Chaque aire opérationnelle est subdivisée en un nombre fixe de zones de dénombrement électoral (ZDE) dans lesquelles opèrent différentes équipes d’agents recenseurs et d’agents enregistreurs ».

Observations :
Selon cette disposition, le RENA doit être conduit suivant une démarche progressive par ère opérationnelle ; or, le RENA a été réalisé simultanément sur toute l’étendue du territoire  national contrairement  aux dispositions claires et sans équivoque de la loi. Selon cette législation, le RENA devrait être conduit  dans une aire opérationnelle à la fois avant de passer à l’aire opérationnelle suivante. Le cumul de toutes les aires opérationnelles pour une réalisation simultanée du RENA constitue donc une violation flagrante de la loi.

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2/ L’article 17 relatif à la sélection  des agents recenseurs et enregistreurs et à l’exigence de la production d’extrait de casier judiciaire pour leur recrutement dispose :
«Le recensement électoral national approfondi est assuré par une ou plusieurs équipes d’agents recenseurs et enregistreurs.
Les agents recenseurs doivent avoir au moins le Brevet d’Etudes du Premier Cycle ou un diplôme équivalent.  En outre, ils doivent avoir  une bonne connaissance de l’une au moins des  langues locales parlées dans la zone de recensement.  
Ils doivent être des citoyens béninois de bonne moralité résidents ou ressortissants de l’arrondissement. A cet effet, ils doivent produire un extrait de casier judiciaire datant de moins de trois (03) mois et une attestation de résidence.
Les agents recenseurs sont recrutés sur appel à candidature par l’organe national chargé du recensement électoral national approfondi parmi les citoyens les plus aptes.
L’enregistrement des données biométriques et des autres données personnelles des électeurs potentiels est assuré par une ou plusieurs équipes d’agents enregistreurs installées dans des centres de collecte.
Les agents enregistreurs, outre les critères de diplôme et de bonne moralité exigés des agents  recenseurs, doivent avoir l’une des qualifications techniques et professionnelles nécessaires pour l’opération d’enregistrement (prises de mesure, opération de saisie, techniques de capture d’images, reconnaissance des couleurs). 
Hormis le préposé d’enregistrement ou l’opérateur de saisie, les autres membres de l’équipe d’enregistrement doivent résider ou être ressortissants de l’arrondissement ou de la commune. A cet effet, ils doivent produire une attestation de résidence.
 Les agents enregistreurs sont recrutés sur appel à candidature par l’organe national chargé du recensement électoral national approfondi parmi les citoyens les plus aptes ».

Observations :

Aux termes de cette disposition, l’une des conditions à remplir, par les citoyens candidats aux postes d’agents recenseurs et enregistreurs est de produire préalablement à leur recrutement un extrait de casier judiciaire datant de moins de trois mois ; or ce document essentiel n’a pas été produit par l’immense majorité des agents recrutés ; il y a donc une violation de la loi.

3/ L’article 24 relatif au recrutement des agents cartographes dispose :
« La cartographie censitaire est une opération de collecte des données géographiques destinées à la confection de la carte électorale et à la planification des moyens logistiques, humains et techniques.
L’établissement de la cartographie censitaire doit permettre d’assurer la fiabilité des découpages électoraux et l’évaluation exhaustive des besoins en matériels, instruments et personnel.
Elle  doit permettre :
–  l’élaboration de la  carte exhaustive avec  la délimitation précise des hameaux, des villages ou quartiers de ville, des villes ainsi qu’une schématisation des bâtiments et des habitations ;
– l’identification des infrastructures administratives, scolaires, sanitaires, culturelles, cultuelles, commerciales et routières ;
– le repérage des centres de collecte
– l’indication des coordonnées « GPS » des centres et des bureaux de vote ;
– le dénombrement des ménages et la précision des densités démographiques au moyen de codes.

La carte électorale détermine et fixe :

• les circonscriptions électorales ;
• les zones de dénombrement électoral ;
• les postes d’enregistrement des électeurs ;
• les centres de vote ;
• les bureaux de vote ;
• le nombre d’électeurs par bureau de vote.

L’exécution de la cartographie censitaire  doit être confiée à des professionnels nationaux ayant des expériences avérées dans le domaine.
Les organismes techniques compétents dressent et communiquent les listes de leurs cadres à  l’organe en charge  du recensement électoral national approfondi qui procède à leur sélection et recrutement sous l’autorité de la Commission politique de supervision ».

Observations :

Le libellé clair et limpide de cette disposition exige manifestement le recours à l’INSAE et à l’IGN pour l’identification de leurs ressources humaines qualifiées en vue de leur sélection par  la MIRENA, ce qui n’a pas été le cas dans la mise en œuvre de la loi querellée. Dans le cadre de la réalisation de la cartographie censitaire, il ne s’agit donc pas de recourir à l’appel public à candidature, mais pour la MIRENA de sélectionner des professionnels nationaux sur des listes communiquées par des organismes techniques compétents. Il ya donc une violation flagrante de la loi.

4 / Par ailleurs ce même article 24 dispose que la cartographie censitaire doit permettre :
–  l’identification l’élaboration de la  carte exhaustive avec la délimitation précise des hameaux, des villages ou quartiers de ville, des villes ainsi qu’une schématisation des bâtiments et des habitations ;
– des infrastructures administratives, scolaires, sanitaires, culturelles, cultuelles, commerciales et routières ;
– le repérage des centres de collecte ;
– l’indication des coordonnées « GPS » des centres et des bureaux de vote ;
– le dénombrement des ménages et la précision des densités démographiques au moyen de codes.
La carte électorale détermine et fixe :

• les circonscriptions électorales ;
• les zones de dénombrement électoral ;
• les postes d’enregistrement des électeurs ;
• les centres de vote ;
• les bureaux de vote ;
• le nombre d’électeurs par bureau de vote ».

Observations :

 Les responsables de la MIRENA ont admis que la cartographie censitaire  réalisée en application de la loi sur la LEPI a été opérée par échantillonnage. Le caractère exhaustif de la cartographie  censitaire n’a donc pas été respecté. De toute évidence, cette pratique est contraire à l’esprit et à la lettre de la loi parce que ne pouvant pas permettre de réaliser l’exhaustivité de la carte telle que voulue par le législateur ni le dénombrement de tous les ménages. Il y a donc eu une violation flagrante de la loi.
5/ L’article 25, relatif  au recensement des citoyens, pris en son alinéa 6 dispose:
« Les informations collectées lors du recensement des citoyens sont celles relatives uniquement aux données nominatives et personnelles ci-après :

–  nom et tous les prénoms du recensé dans l’ordre de leur inscription sur l’acte de naissance ou sur toute autre pièce  en tenant lieu ;
-nom et tous les prénoms
du père ;
– nom et tous les prénoms
de la mère ;
–  sexe ;
–  date et lieu de naissance ;
–  profession ;
–  situation matrimoniale ;
–  numéro du ménage ;

– résidence habituelle (département, commune, arrondissement, village ou quartier de ville».

Observations :

La cartographie censitaire par échantillonnage telle que réalisée par la MIRENA est incompatible avec l’exigence du numéro du ménage ; en effet les membres des ménages, qui ne font pas partie des échantillons sélectionnés, ne disposent pas de numéro de ménage et par conséquent ne peuvent  légalement se faire recenser, puisqu’il  leur manquerait cette donnée essentielle exigée par la loi. Il ya donc une violation de la loi.
6/ L’article 43, relatif à la composition de la MIRENA, dispose :
 «  La Mission indépendante de recensement électoral national approfondi  est composée de neuf (09) personnalités reconnues pour leur compétence, leur probité, leur impartialité, leur sens patriotique et désignées sur appel à concurrence par la Commission politique de supervision.
 Elle est composée de :

– un (1) démographe,
– un (1) sociologue,
– un (1) informaticien,
– un (1) statisticien,
– un (1) spécialiste en cartographie,
– un (1) spécialiste en gestion et planification,
– un (1) spécialiste des techniques biométriques,
– un (1) spécialiste des questions d’élections,
– un (1) magistrat ayant au moins dix (10) ans d expérience.

 A l’exception du spécialiste en gestion et planification, du spécialiste des questions d’élections et du spécialiste des techniques biométriques, les candidats aux fonctions de membres de la Mission indépendante de recensement électoral national approfondi doivent justifier d’une expérience d’au moins dix (10) ans dans leur domaine de compétence respective.
 La Mission indépendante de recensement électoral national approfondi est assistée de l’opérateur de la technologie biométrique.

 Elle est dirigée par un bureau de trois (03) membres :
–  un (01) président ;
–  un (01) gestionnaire-comptable  –  un (01) secrétaire-rapporteur chargé de la communication.

 En dehors du président qui est nommé par la Commission politique de supervision conformément à l’article 40 alinéa 5 ci-dessus, les autres membres du Bureau sont  élus par leurs pairs.
Les six (06) autres membres sont désignés chacun, délégué au recensement de l’aire opérationnelle.
Le délégué au recensement de l’aire opérationnelle siège au chef-lieu du département pendant la période de déroulement du recensement.
La Mission indépendante de recensement électoral national approfondi exécute sa mission sur une durée de dix huit (18) mois. Elle dépose le rapport final de ses  activités à la Commission politique de supervision trente (30) jours après la publication de la liste électorale  permanente informatisée ».
Observations :
Aux termes de cet article, la MRENA comprend neuf membres ; or, elle a fonctionné avec huit. Ce nombre n’a pas été fixé au hasard par le législateur ; en effet, trois d’entre ces membres constituent le bureau de la MIRENA et les six (06) autres  sont désignés chacun, délégué au recensement d’une des six aires opérationnelles. Manifestement, la non désignation du neuvième membre avant de lancer la MIRENA est une violation flagrante de la loi.

Conclusion :   
 Au bénéfice des observations ci-dessus, je sollicite qu’il plaise à la Cour de déclarer les faits et pratiques dénoncés contraires à la Constitution.
Veuillez agréer, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres de la Cour Constitutionnelle, l’expression de ma haute considération.

Ismael TIDJANI-SERPOS
Député à l’Assemblée
Nationale
BP 21 Porto-Novo

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