Acharnement contre les hommes d’affaires : le gouvernement décourage l’investissement privé

Paradoxe !? Le gouvernement béninois tout en affichant sa volonté de développer le secteur privé de son pays, pose des actes tendant à décourager les opérateurs économiques. « … 

Enfin, le Gouvernement renouvelle son appel aux investisseurs désireux d’installer au Bénin des usines de production d’insecticides et de produits phytosanitaires qu’ils sont les bienvenus et les meilleures conditions d’investissement leur seront offertes. 

Désormais, le Bénin dans sa quête de la promotion de l’emploi des jeunes, a choisi de s’engager dans la production locale des intrants à l’image de ce qui se fait dans les pays voisins comme le Togo, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Mali, le Burkina-Faso et d’autres pays de la sous-région, et de renoncer à l’option suicidaire de l’importation.» Ceci est un extrait du Conseil des ministres extraordinaire du dimanche dernier tenu, comme d’habitude, sous la houlette du président Boni Yayi. Bien qu’étant adressé uniquement aux opérateurs économiques « désireux d’installer au Bénin des usines de production d’insecticides et de produits phytosanitaires», cet appel s’inscrit dans la perspective de la cour que fait le régime actuel aux investisseurs privés, aussi bien nationaux qu’étrangers. Depuis quelques semaines, le Conseil présidentiel de l’investissement (Cpi) entreprend une offensive médiatique pour vulgariser les différentes réformes entreprises en vue de l’amélioration de l’environnement des affaires au Bénin. Objectif, faire gagner au pays plusieurs places dans le prochain classement « Doing Business ».  Dans le cadre de la mise en œuvre du premier compact Mca Bénin, des réformes ont été entreprises pour alléger la procédure de création et de formalisation des entreprises privées. Il y a donc comme une volonté du régime de vendre la destination Bénin en matière d’affaires. Mais, dans la pratique, de gros opérateurs économiques déjà installés font objet de « harcèlements et de mauvais traitements » et ce au gré des humeurs du «Prince et ses valets».

Harcèlement fiscal et décision unilatérale 

«Le climat des affaires est vicié au Bénin», a commenté le dimanche 03 juin dernier, Me Lionel Agbo sur le plateau de l’émission zone Franche de la chaîne de télévision Canal 3 Bénin. Cet ancien proche collaborateur du président Boni Yayi et ex-conseiller à l’Autorité transitoire de régulation des postes et télécommunications (Atrpt) cite en exemple le harcèlement fiscal dont est victime l’opérateur Sébastien Ajavon, promoteur de la société Cajaf Comon. Ce dernier a été affublé, selon les termes du Me Agbo, de 35 milliards de francs Cfa de «redressement fiscal». Pourtant, ferait partie des plus gros contributeurs aux ressources fiscales de l’Etat. Parlant de cas impropres à l’investissement privé, l’exemple le plus plausible est celui de l’homme d’affaires Patrice Talon, promoteur de la société Bénin Control chargée jusqu’à récemment de la mise en œuvre de la réforme du Programme de vérification des importations de nouvelle génération (Pvi-ng). On se rappelle, le gouvernement a suspendu de manière unilatérale, le contrat qui lie l’Etat à cette société. Entre autres arguments avancés, la non atteinte des objectifs fixés et la nature juridique du contrat (le contrat Pvi est un contrat administratif selon le pouvoir). Ce dernier justificatif donnerait le droit au gouvernement de rompre de façon unilatérale le contrat Pvi. C’est quand même paradoxal qu’un régime qui entend promouvoir l’investissement privé puisse se prévaloir de la nature juridique d’un contrat pour justifier sa suspension unilatérale. Et cela sans, apparemment, se soucier des investissements réalisés par l’opérateur. Dans cette affaire Pvi, Bénin Control a investi plusieurs milliards pour l’acquisition des scanners et autres équipement techniques, le recrutement de la main d’œuvre et sa formation. Ce dont l’Exécutif semble se soucier peu.

Après l’idylle, l’enfer

Certains observateurs ont justifié le harcèlement dont l’opérateur Talon fait objet par la fin de l’histoire d’amour entre le Chef de l’Etat et lui. En effet, jusqu’à un passé récent où tout allait bien entre les deux hommes, aucun des nombreux reproches faits aujourd’hui aux intérêts de Talon aussi bien dans le secteur du coton, où il est un baron, qu’au port n’a été mentionné. On peut donc déduire que la qualité de la sécurité juridique, garantie première pour attirer les investisseurs, dépend des « humeurs et intérêts » du Chef de l’Etat et caciques de son régime.
En réalité, le gouvernement ne donne aucune crédibilité à son appel lorsqu’il promet aux investisseurs désireux d’installer au Bénin des usines de production d’insecticides et de produits phytosanitaires des conditions meilleures seulement à un moment où les relations entre le pouvoir et le principal importateur d’intrants qu’est Patrice Talon se dégradent. Et aussi à un moment où d’autres investisseurs sont victimes d’harcèlement fiscal. Le régime Yayi fait simplement du deux poids deux mesures dans sa volonté d’améliorer l’environnement des affaires et d’amener les opérateurs économiques privés à investir aux Bénin. Ça doit changer.

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