Quand Me Lionel Agbo dit ses quatre vérités

L’invité de l’émission Zone Franche de la chaîne privée de télévision Canal 3 Bénin, hier, c’est Me Lionel Agbo. 

Il n’est pas allé du dos de la cuillère pour donner les raisons de sa démission de Atrpt, commenter son séjour au palais de la présidence et  apprécier certains faits de l’actualité nationale.

Me Lionel Agbo, ancien conseiller de l’autorité transitoire de régulation des postes (Atrpt) et porte-parole de la présidence sous le Changement-le premier quinquennat de Boni Yayi- n’a pas visiblement perdu sa verve et son franc parler. Qui a suivi de bout en bout l’émission zone Franche de la chaîne privée de télévision Canal 3 de ce dimanche s’en serait sans doute rendu compte. Invité évidemment de cette émission, Lionel Agbo est revenu en détails, dans son style qu’on lui connaît sur les raisons de sa démission intervenue il y a quelques mois de l’Atrpt. Il n’a pas manqué de se prononcer sur l’actualité nationale notamment la polémique Pvi, avec son impact sur l’environnement des affaires au Bénin, le débat sur la correction de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) et les projections pour 2016.

Une autorité impuissante

Selon Lionel Agbo, la première raison de sa démission de l’Atrpt est le fonctionnement de la structure. C’est à partir de 2010 que tout a commencé. Il précise que les opérateurs Gsm ont signé des cahiers de charges et des conventions qu’ils ne respectaient plus. Pis, « Lorsqu’il ne les respectaient, il était impossible de les sanctionner. Pourtant, les sanctions sont prévues dans les cahiers de charge et les conventions. Lorsqu’il nous arrivait de prendre des sanctions, ils ne respectaient pas », s’est indigné cet avocat qui s’est pourtant battu bec et ongle pour la régulation du secteur. Il a rappelé que l’autorité, à travers sa personne, a fixé le coût de la licence à 30 milliards que chaque opérateur devrait payer. Ils n’ont pas voulu payer. Et il a fallu qu’ils soient coupés pour qu’ils se plient à la décision. Il affirme à cet effet : « C’est moi qui ait fixé le montant de 30 milliards. Ils ont refusé de payer. On a du les couper pour qu’ils reviennent à de meilleurs sentiments. » A son avis, ce comportement des opérateurs Gsm au Bénin pourrait s’expliquer par les accointances  qu’ils ont avec les autorités au plus haut niveau. Sinon « au Sénégal, un opérateur Gsm a été condamné à payer une amende de 4 milliards de Fcfa pour avoir coupé pendant un temps le réseau», a-t-il illustré. Pour lui, les Gsm sont à l’image de tout opérateur économique. Ils investissent pour faire du profit. Mais la présence d’une autorité de régulation doit les empêcher d’abuser des consommateurs.

Remettre l’Atrpt sur le droit chemin

Il faut que ce soit un organe complètement autonome. Et pour que ce soit le cas, il faut que le texte de loi passe à l’Assemblée nationale ». C’est la réponse qu’a fournie Me Lionel Agbo à la question de savoir ce qu’il faut faire pour ramener l’Atrpt sur le droit chemin. Il précise que l’Autorité devrait être autonome mais elle est une caisse de résonance.  Et si elle est restée depuis 2007 transitoire, « c’est le fait du Prince ». « Il existe un texte de loi préparé. Mais il faudra qu’il soit envoyé à l’Assemblée nationale », a-t-il expliqué.

La deuxième raison de sa démission il raconte. « Le 22 avril le chef de l’Etat nous a convié pour faire le point. Lors de la séance, il m’a demandé pourquoi je ne parlais plus. Et quand on est descendu, le ministre de la communication est arrivé et a dit que le Chef de l’Etat aurait affirmé que Lionel Agbo ne parle plus parce qu’il a pris du gombo.» « Pour un homme qui a servi le chef de l’Etat avec intégrité, honnêteté, ça ne pouvait pas en rester là», a-t-il martelé. Le ministre a envoyé selon les présentateurs de l’émission un message sur l’émission pour affirmer qu’il ne se reconnaissait pas dans cette déclaration. Il serait même prêt pour un débat contradictoire. Me Lionel Agbo a aussi dit qu’il était lui aussi prêt pour le débat contradictoire  mais à condition que ces témoins que sont les autres membres de l’autorité veuillent témoigner. Il a martelé par ailleurs que s’il est resté muet pendant tout ce temps, c’est parce que les textes de l’autorité lui imposent le droit de réserve (Ndlr)

« Le climat des affaires est vicié au Bénin »

« Je ne connais pas le dossier Pvi. Mais je peux analyser sur le plan de l’impact sur l’environnement des affaires au Bénin », a affirmé Lionel Agbo par rapport à son appréciation du dossier Pvi. Pour l’homme de droit, il y a un climat délétère au niveau des affaires qu’il faut changer.  Selon lui, la sécurité judiciaire n’est pas seulement quand le dossier est devant le juge et qu’il est vite traité. Mais c’est aussi ce qu’il y a en aval. Il étaye : « Quand un opérateur signe un contrat avec l’Etat. Et un matin, le gouvernement se lève pour le suspendre de manière unilatérale, cela ne peut pas encourager l’investissement privé. » Et ajoute que certains opérateurs étrangers décident de quitter le Bénin parce que pour gagner par exemple un appel d’offre, il faut appartenir à des « groupuscules ». Le harcèlement fiscal est selon lui, l’autre danger de notre environnement des affaires. Le cas Ajavon en est un exemple.  Il s’est tout de même dit étonné que ceux qui ont chanté les mérites de la réforme et de Bénin Control soient les mêmes qui les dénigrent aujourd’hui.

Pêle-mêle

Me Lionel Agbo pense que la question de la révision de la Constitution pourrait revenir au galop. »J’ai entendu les caciques du pouvoir dire qu’on va ‘Wadiser’ le Bénin. Des gens ont dit que si on n’arrive pas à réviser la Constitution, on va donner 2 à 3 ans à Yayi pour qu’il finisse l’œuvre de la Refondation. D’autres ont dit qu’on va ‘ Poutiniser’ le régime », a-t-il révélé. Avant de conclure que la Lépi doit être améliorée pour les prochaines élections communales.

L’entourage de Boni Yayi doit donner l’exemple de bonne gouvernance

Pour le Me, il y a un groupuscule de personnes autour du Président de la République, qui n’a qu’une seule envie, comment faire pour se remplir les poches. Aussi dit-il, que pour lutter, contre la mauvaise gouvernance dans le pays, il faudra d’abord poser le premier acte. Et ce premier acte consiste à, ce que tous ceux qui occupent un poste dans le gouvernement ou dans n’importe quelle institution du pays fassent la déclaration de leurs patrimoines. Cela à partir du chef de l’Etat lui même. Ce qui n’est malheureusement pas le cas alors que la déclaration des patrimoines par les autorités est prévue par l’article 52 de la constitution du Bénin. ‘’Si les différentes reformes engagées par le président ont presque toutes connues des sorts d’échecs, la principale raison qui peut expliquer cet état de chose est la mauvaise gouvernance’’, a affirmé l’ancien conseiller technique du chef de l’Etat et porte parole de la présidence en début du changement.

Une structure résolument impuissante

L’Autorité transitoire de régulation des postes et télécommunications (Atrpt)  a été crée par décret N° 2007-209 du 10 mai 2007 portant création attribution, organisation et fonctionnement de L’Autorité transitoire de régulation des postes et télécommunications. Elle a pour mission de réguler les aspects juridique, technique et économique du secteur des télécommunications et des postes. Seulement, pour ce qui est de la régulation du secteur des télécommunications, la structure apparaît impuissante au regard du constat sur le terrain. Si le prix pratiqué au Bénin, la facturation à la seconde est la meilleure dans la sous-région comme l’a affirmé Lionel Agbo, il faut reconnaître que la qualité de la communication laisse souvent à désirer. Maître Lionel Agbo a évoqué le cas sénégalais pour montrer l’insubordination des opérateurs Gsm béninois à l’Autorité de régulation. Selon des informations, le Burkina a sanctionné à des amendes de plusieurs milliards certains opérateurs Gsm pour la mauvaise qualité de la communication fournie par leurs réseaux.

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