Tu te consacre aux affaires de notre mère patrie ; cet engagement t’honore. Le don de ton temps, pour la collectivité, l’énergie déployée, pour l’œuvre commune, ton vieil âge, parfois, secoué et point ménagé, pour la postérité, t’ennoblit.
Tu mérites récompense, toi, homme, femme, jeune ou personne âgée, exerçant le pouvoir ou militant ardemment pour le conquérir. C’est justice que cette république te le rende au mieux, en t’offrant la joie et la fierté de se bien porter. Mais hélas, le constat est toujours amer : « la crise », le malaise, le mal-être béninois. Toujours cette crise qui frappe, en permanence, outrancièrement sélective, elle cogne le « peuple d’en bas » et comme mue par une volonté d’équité, envoie épisodiquement quelques pics ciblés vers l’élite, veillant scrupuleusement à rater la ‘’gent’’ au pouvoir. Diète générale ou jeûne forcé pour les uns, ripailles à la « cuillère à soupe » ou la à « pelle », selon les périodes, pour les mêmes. Et l’on s’accuse ; et l’on se fâche, en dépit des « sacrifices consentis » par les uns et les autres. Des « offrandes » abondantes donc. Et la « Miséricorde » alors?
Les décennies sont passées depuis cette ascension à la souveraineté nationale du Dahomey, aujourd’hui Benin. Des « programmes de développement », aux « mesures de réduction de la pauvreté », en passant par les « plans quinquennaux » et autres « plans d’ajustement structurel », les populations en ont vu des vertes et des pas mûres. L’élite de ce pays s’est comme juré de se venger de son peuple, coupable, peut être, à ses yeux, d’avoir parfois trop vite applaudit ou conspué ses dirigeants dans les méandres de l’histoire. Le Benin a connu un prétendu « socialisme scientifique » sous une dite « dictature du prolétariat ». Après 22 ans d’expérience laborieuse et franchement perfectible à maints égards, du libéralisme économique soutenu par la soi disant « démocratie pluraliste », le pays se morfond toujours dans les contreperformances économiques.
Béninois
Si la révolution castriste à Cuba peut au moins s’enorgueillir des résultats plus que satisfaisants de son système de santé et que la dictature du « timonier national » sur notre flanc ouest a pu flatter quelque peu l’orgueil des Togolais, en général, à un moment de leur histoire, les Béninois se désolent, en ce qui les concerne, de n’être que de pauvres yeux de gueux collés à la vitrine bien achalandée d’un commerce florissant, le monde moderne en mutation. Même la Côte d’Ivoire qui se bat pour en finir avec plus de 10 ans de crise politique grave, suscite semble –t-il plus d’espoir parmi ses fils et filles que le Benin dit du « changement refondé », décrété sous les effluves d’un pouvoir grisant. Mais qu’on ne s’y trompe guère, l’optimisme sous le Benin du « renouveau démocratique » a été aussi bref qu’un discret pet public. Certes, la « révolution populaire » a su longuement entretenir chez le grand nombre, l’illusion d’une « société où il fera bon vivre pour chacun et pour tous ». La systématisation du « raccourci politique », en lieu et place de l’ascension par le mérite et l’effort au travail, a tôt fait de tuer le tissu économique, social et politique. L’excellence a déserté notre patrie et la médiocrité, telle une sangsue nous colle toujours à la peau, plus de 22 ans après la fin d’un régime inique.
Devant la confusion générale actuelle entretenue par les propos et les comportements des responsables au sommet de l’Etat, des voix crient à la crise économique. Elles avertissent même que la situation pourrait encore dégénérer si les mesures préconisées n’étaient pas vite suivies d’effets. Mais à peine se sont elles prononcées que l’autre, péremptoire, a lancé que les perspectives économiques n’ont jamais été aussi bonnes pour ce pays. On a même annoncé, au passage, la surliquidité des réserves du trésor public, ce qui pourrait permettre à l’Etat de s’offrir, au besoin, plusieurs mois d’arrêt de travail ! « Waouh » s’exclameraient nos enfants devant une telle bizarrerie. Seulement, la voix de la Sagesse éternelle nous édifie. Au riche qui s’est dit à lui-même après une récolte abondante : « Mon cher, …repose-toi, mange, bois et réjouis-toi », elle se fit cinglante et effarante…(Evangile selon Saint Luc 12, 16-21)
Corruption
La foule pour sa part applaudit et conspue l’une et l’autre voix, suivant le maitre dont elle se trouve être la saisonnière. S’enfonçant toujours un peu plus dans la bêtise, cette foule mal éduquée par la mauvaise gouvernance, s’apprête sans nul doute encore, à se tromper dans le choix de ses gouvernants.
Il est vrai que le béton coule. Des immeubles surgissent de terre comme des champignons. On parle de « nouveaux riches des marchés publics » en opposition aux anciens, traités quant à eux, de « contrebandiers faussaires », par les nouveaux Ainsi va le Benin de la « prospérité partagée» dont on se flagorne. Mais de là aussi à céder à la psychose de la crise économique, il y a un pas décisif à ne pas franchir. Ce pays, on le connait ou on ne le connait pas. C’est un peuple riche, riche de son ame qu’il pourrait malheureusement tronquer contre la fausse guérison de son tissu économique gangrené par la corruption et la mauvaise gouvernance des marchands de miracles économiques. L’inflation a atteint des niveaux difficilement supportables. Les soins de santé sont de moins en moins accessibles par l’écrasante majorité qui quand bien même réussit à s’endetter pour s’offrir des soins médicaux, se trouve systématiquement grugée par un personnel soignant dont certains agents sont de plus en plus méchants et cupides, se comportant comme de véritables vautours qui se délectent de l’accumulation des cadavres dans les centres hospitaliers.
Où est donc la charité ? L’Amour du prochain prônée par les saintes écritures ne nous concerne –t-il pas au Benin ? Miséricorde !
Charité
Beaucoup reste à faire dans et pour ce pays. Tu prétends avoir déjà tout donné à ce peuple et c’est à peine si tu ne le traite pas d’ingrat. Mais lui as-tu jamais ouvert ton cœur ? L’as-tu aimé, pour de vrai, ce peuple qui t’a tout donné : ta progéniture, tes relations les plus distinguées, tes titres, tes diplômes, ton « tout », toi enfant, petit enfant et arrière petit enfant de pauvre, comme moi. As-tu jamais aimé ce peuple comme il t’a aimé ? Tu soutiens lui avoir TOUT donné. Ta liberté, des années de ta jeunesse passées derrière les barreaux, pour ton engagement politique. Tu penses que c’est énorme ; ce n’est pas rien. Mais l’as-tu aimé, ce peuple, au point de lui pardonner ces douleurs infligées à ta personne ? « Miséricorde » ! « Ce n’est pas le sacrifice que je désire, mais la Miséricorde »
Si tu veux diriger ce peuple, alors, tu dois l’aimer plus que ta petite personne. Tu dois lui pardonner, tout. Ce peuple a besoin d’amour, cet Amour qui ouvre le cœur à la dimension du monde qui l’entoure au lieu de se remplir sa vanité. Tu n’es qu’un mortel, toi…