Boycott des sommets et grandes rencontres: Les mauvaises options diplomatiques de Talon

Engagé dans des réformes à tout vent, le président Talon semble faire de la diplomatie une préoccupation de seconde zone. 

En dix mois, il a boycotté presque tous les sommets et grandes rencontres avec pour conséquences une baisse de la visibilité du Bénin à l’international et l’affaiblissement de la voix du pays dans les grandes préoccupations mondiales. Dès son arrivée au pouvoir, le président Patrice Talon a opté pour une diplomatie réellement tournée vers le développement. Cette option l’a amené à nommer au poste de ministre des affaires étrangères Aurélien Agbénonci un ancien de l’humanitaire qui a traîné sa bosse dans les arcanes du système des Nations Unies. On s’attendait alors à une diplomatie tout feu tout flamme avec comme objectif le rayonnement du Bénin à l’international. Cette diplomatie devrait à la fois faire vendre l’image du Bénin et faire connaître ses positions sur les questions internationales. Au-delà, elle devrait aider à la mobilisation des moyens nécessaires pour le développement du pays.

Sur le dernier registre, le Chef a semblé mieux se comporter avec des visites privées et officielles dans plusieurs pays. Si c’est la France qui ravit la vedette aux autres pays dans le choix des destinations prisées par le Chef de l’Etat et avec lesquelles il faut nouer des relations privilégiées, il n’en demeure pas moins que d’autres pays ont bénéficié du rare intérêt du président de la république. On peut citer la Turquie, le Rwanda, la Côte d’Ivoire, la Guinée Equatoriale et la curieuse Estonie. Seul regret, la plupart de ces voyages a été revêtue du sceau de la confidentialité comme hélas plusieurs actions du Chef de l’Etat. Ces différents voyages ont rarement été précédés de communication et souvent peu ou pas du tout médiatisés.

Cette manière de faire ravive certaines conjectures qui disent que le Chef de l’Etat voyage beaucoup plus pour ses affaires que pour les intérêts de l’Etat. Mais la diplomatie ne s’accommode pas seulement de quelques visites visant à renforcer les coopérations bilatérales. Dans le concert des nations, il faut une présence active aux sommets et rencontres internationaux ponctués de prises de position claires et pertinentes sur les préoccupations d’ordre mondial. Aucun pays, quelles que soient sa puissance et son hégémonie n’échappe à ces principes basiques de la diplomatie internationale. Il est rare dans l’histoire de voir un président des Etats Unis s’absenter à un sommet du G8 ou de voir un président français absent à un sommet de l’Union européenne car, c’est au cours de ces grandes rencontres que les grandes décisions engageant les continents et le monde se prennent, et les positions de chacun déterminent parfois la nature des relations et le pedigree de ceux qui entendent collaborer avec vous.

Ces sommets et ces grandes rencontres favorisent les conciliabules, des discussions en privé qui font naître d’autres formes de relations et ouvrir de nouvelles perspectives. Mais force est de constater que depuis qu’il a pris le pouvoir, le président Talon a affiché un mépris pour les sommets et les grandes rencontres. Quelques jours après sa prise de pouvoir, il a boycotté le sommet de l’Union africaine pour la célébration du mariage de sa fille. Le premier de son quinquennat. Des mois après, la tendance n’a guère changé. Patrice Talon a brillé par son absence au dernier sommet France-Afrique et au sommet de l’Ua qui vient de s’achever à Addis Abéba avec l’élection du nouveau président de la commission de l’Ua et le retour du Maroc au sein de la grande famille de l’Ua après 30ans de boycott.

La présence de notre chef d’Etat aurait pu être un signal fort pour marquer la position de notre pays par rapport à l’épineuse question du Sahara Occidental dont le Bénin a pourtant reconnu l’indépendance. A chacune de ces occasions, il s’est fait représenter par le ministre des affaires étrangères; un choix diplomatique qui ne fait souvent pas de grandes recettes… Et qui, avec le temps, ouvrira malheureusement la voie à un isolement diplomatique du Bénin. 

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