Sénégal : Le rapport d'exécution du deuxième trimestre livre ses vérités

L’économie sénégalaise vit une période singulière. Portée par l’entrée en production des hydrocarbures, elle enregistre une croissance record de 12,1 % au premier trimestre 2025. Pourtant, derrière cette embellie se cachent des tensions budgétaires que révèle le rapport d’exécution du deuxième trimestre : des recettes en nette progression, un déficit financé mais des dépenses structurelles qui grèvent encore la capacité de l’État à investir.

Des recettes dynamiques, mais un soutien extérieur quasi absent

Au 30 juin, les recettes budgétaires atteignent 2 226,3 milliards FCFA, soit près de la moitié des objectifs annuels. Les impôts sur les sociétés et sur le revenu, dopés par l’activité liée aux hydrocarbures, constituent le principal moteur, alors que les impôts indirects assurent également une collecte soutenue. En revanche, les dons budgétaires restent anecdotiques – moins de 20 milliards sur une prévision de plus de 240 milliards – et les recettes non fiscales peinent à suivre. Autrement dit, l’État compte sur sa propre économie mais reçoit peu de soutien extérieur, un peu comme un ménage qui voit son salaire augmenter mais n’obtient plus l’aide promise de ses proches.

Dépenses en hausse, investissement en retrait

Les charges globales du budget atteignent 2 814,6 milliards FCFA, avec une prédominance des dépenses de fonctionnement : salaires, transferts sociaux et subventions énergétiques absorbent l’essentiel. La masse salariale, en particulier, franchit la barre des 724 milliards, confirmant la rigidité d’un poste difficile à contenir. Les subventions à l’énergie, proches de 370 milliards, pèsent lourdement, rappelant les difficultés structurelles de ce secteur. Pendant ce temps, les dépenses d’investissement stagnent : à peine 30 % des prévisions ont été réalisées à mi-année. Le contraste est frappant : les moyens existent mais les projets avancent lentement.

Un déficit maîtrisé mais une dépendance aux marchés

Le déficit budgétaire s’élève à 588,3 milliards FCFA, soit environ un tiers de l’objectif annuel. Ce niveau reste préoccupant, mais il est entièrement couvert grâce aux financements mobilisés, principalement sur les marchés bancaires et financiers pour un total de 1 677 milliards. L’État trouve donc de quoi combler ses besoins, mais cette dépendance au crédit local équivaut à s’endetter auprès de ses propres banques pour boucler les fins de mois. À moyen terme, cette stratégie peut alourdir la dette et fragiliser la stabilité financière.

Les organismes publics illustrent bien cette tension : avec seulement 29,9 % de leurs budgets exécutés, ils cumulent pourtant une dette de plus de 820 milliards, dont la majeure partie liée au FERA. En revanche, une note plus positive ressort du Fonds national de retraite, qui dégage un excédent de 13,2 milliards grâce à une hausse du nombre de cotisants.

Le rapport met en lumière une double réalité. D’un côté, le Sénégal dispose désormais d’une base fiscale plus robuste, portée par les hydrocarbures et une administration fiscale plus efficace. De l’autre, le pays reste prisonnier de charges fixes élevées et d’un faible rythme d’investissement, alors même que les besoins en infrastructures sont pressants. La dépendance croissante aux financements domestiques traduit une vulnérabilité : si les marchés locaux venaient à se tendre, la marge de manœuvre se réduirait considérablement.

Laisser un commentaire