Les États-Unis ont depuis longtemps ancré leur présence militaire au Moyen-Orient en s’appuyant sur un réseau d’alliances solides avec les monarchies du Golfe. Des accords sécuritaires signés avec ces États ont permis l’installation de bases américaines stratégiques, notamment au Qatar, où l’US Air Force dispose de l’une de ses principales plateformes de commandement dans la région. Cette implantation traduit l’importance géopolitique de Doha, devenue un pilier de la sécurité collective mais aussi un partenaire incontournable pour Washington. Or, c’est précisément ce pays, placé sous un parapluie sécuritaire américano-arabe, qui a été ciblé par Israël lors d’un bombardement inédit, créant une onde de choc politique bien au-delà des frontières du petit émirat.
Un raid militaire aux conséquences imprévues
L’attaque israélienne du 9 septembre contre des dirigeants du Hamas présents à Doha visait à afficher la capacité d’Israël à frapper ses ennemis jusque dans leurs refuges les plus inattendus. Mais cette opération a ouvert une série de problèmes diplomatiques qu’aucune victoire militaire ne saurait masquer. En frappant le Qatar, État abritant à la fois une direction du Hamas et des infrastructures américaines, Israël a mis ses alliés dans une position intenable. Les capitales arabes ont réagi en exprimant leur solidarité avec Doha, tandis que l’émirat a dénoncé une atteinte directe à sa souveraineté. Cette réaction en chaîne, amplifiée par la convocation d’un sommet arabe et islamique extraordinaire, montre que la frappe a davantage uni les opposants à Tel-Aviv qu’elle ne les a intimidés.
L’image projetée par Israël rappelle celle d’un joueur d’échecs qui sacrifie une pièce majeure pour un coup d’éclat immédiat, sans mesurer que cette décision ouvre la voie à des ripostes coordonnées. L’effet recherché — isoler le Hamas et afficher une domination régionale — se transforme en levier politique pour ses adversaires, qui trouvent là un motif commun de mobilisation.
Le piège de la démonstration de puissance
En visant Doha, Israël n’a pas seulement provoqué le Qatar : il a remis en cause l’équilibre fragile qui lie les pays du Golfe à leur allié américain. Comment concilier une alliance de sécurité avec Washington et accepter qu’un partenaire de ce même camp soit attaqué par un autre allié stratégique des États-Unis ? Cette contradiction fragilise la crédibilité de l’architecture sécuritaire régionale construite depuis des décennies.
Le sommet prévu à Doha, qui réunira dimanche et lundi plusieurs chefs d’État arabes et musulmans, illustre cette dynamique. Loin de semer la peur, la frappe a déclenché une réflexion collective sur la manière de contenir Israël et de renforcer la protection mutuelle des pays arabes. Pour Tel-Aviv, ce résultat équivaut à une erreur stratégique : au lieu d’affaiblir ses ennemis, l’opération a donné à ces derniers l’occasion d’afficher leur unité et de remettre en question la solidité des alliances régionales.
L’épisode révèle combien une action militaire calculée pour démontrer une supériorité tactique peut, par ses répercussions politiques, se retourner contre son initiateur. En frappant un territoire où se chevauchent intérêts américains, arabes et islamistes, Israël a pris le risque de brouiller ses propres alliances. La victoire tactique se dissout ainsi dans une défaite diplomatique, et le coup de force se mue en signal d’alerte pour tous les acteurs de la région.




« qui se retourne en erreur stratégique »
C’était un errer à la base