La période 2025–2030 s’annonce comme un tournant pour le monde — et pour l’Afrique en particulier. Selon le Global Risks Report 2025, plusieurs dangers convergent potentiellement vers des crises majeures. Pour le continent africain, dont les structures politiques, économiques et sociales sont souvent fragiles, ces menaces ne sont pas abstraites. Voici cinq grands risques mondiaux susceptibles de provoquer des bouleversements significatifs en Afrique avant 2030 — et les mécanismes par lesquels ces risques pourraient se concrétiser.
Risque 1 : crises climatiques et catastrophes naturelles
Le rapport identifie les événements climatiques extrêmes (sécheresses prolongées, inondations, tempêtes, montée des eaux) comme l’un des risques les plus probables dans les années à venir. Pour l’Afrique, déjà fortement exposée aux effets du changement climatique, ces catastrophes menacent l’agriculture, la sécurité alimentaire, l’accès à l’eau, et même les zones d’habitation.
Un enchaînement brutal de sécheresses ou d’inondations pourrait réduire les rendements agricoles ou faire disparaître des récoltes clés, fragilisant les moyens de subsistance de millions de personnes. Dans les zones côtières, l’érosion ou l’élévation du niveau de la mer pourrait déplacer des populations entières, entraînant des migrations internes ou vers d’autres pays, avec leurs lots de tensions sociales et économiques.
Risque 2 : instabilité géopolitique et conflits armés
Parmi les dangers mondiaux relevés, les tensions géopolitiques, la compétition pour les ressources, et le risque de conflits restent très élevés. Pour l’Afrique — un continent riche en matières premières stratégiques et souvent impliqué dans des rivalités d’influence — ce risque prend une acuité particulière.
Si des puissances extérieures intensifient leur présence, ou si des États africains subissent des pressions liées aux ressources naturelles ou aux zones stratégiques, des conflits pourraient éclater. Ces crises fragiliseraient la gouvernance, détérioreraient la sécurité, et pourraient provoquer des flux migratoires massifs.
De plus, l’instabilité dans certaines zones pourrait décourager les investissements étrangers, ralentir les projets de développement, voire compromettre des infrastructures essentielles (routes, hôpitaux, écoles).
Risque 3 : chocs économiques globaux et instabilité financière
Le rapport 2025 souligne la possibilité de chocs macroéconomiques mondiaux — crises des marchés, endettement, hausse des taux, effondrement de certaines économies. Pour des économies africaines souvent dépendantes des importations, des matières premières ou de dettes extérieures, un tel choc pourrait être dévastateur.
Conséquences possibles : forte inflation, dépréciation des monnaies locales, hausse du coût de la vie, réduction des importations vitales (médicaments, produits de base), endettement accru des États, réduction des budgets sociaux. Les populations les plus vulnérables — travailleurs informels, agriculteurs, ménages à faibles revenus — en seraient les premières victimes.
En outre, des gouvernements pourraient être contraints de réduire les dépenses publiques, ce qui limiterait l’investissement dans les services essentiels : santé, éducation, infrastructures. Cela renverrait le continent à une spirale de fragilité structurelle.
Risque 4 : disruptions technologiques rapides et fracture numérique
Le développement technologique — s’il offre des opportunités — représente aussi un risque. Le rapport met en garde contre des ruptures rapides : dépendance excessive à certaines technologies, cyberattaques, inégalités d’accès, perte d’emplois traditionnels.
En Afrique, les inégalités d’accès à l’internet, aux outils numériques, et aux compétences technologiques sont déjà significatives. Si des technologies avancées (intelligence artificielle, automatisation, analyses de données) se généralisent dans les pays développés pendant que l’accès reste limité en Afrique, le continent pourrait être davantage marginalisé économiquement.
Par ailleurs, la vulnérabilité aux cybermenaces — attaques sur infrastructures critiques (énergie, finance, télécommunications) — pourrait fragiliser des États en proie à des systèmes encore peu résilients. Une cyberattaque majeure pourrait bloquer l’accès à des services essentiels, paralyser des administrations, ou menacer la stabilité même d’un pays.
Risque 5 : crises sociales, migrations et pressions démographiques
Le dernier risque, mais certainement l’un des plus préoccupants, concerne les dynamiques sociales : montée des inégalités, chômage, désespoir des jeunes, augmentation des migrations internes et externes. Si les crises climatiques, économiques ou technologiques s’accumulent, la frustration des populations pourrait exploser.
Cela risquerait d’accroître les flux migratoires — des zones rurales vers les villes, voire hors du continent — avec des impacts sur l’urbanisation, les services publics, l’emploi, la sécurité. Les États risqueraient alors de peiner à répondre aux besoins croissants, ce qui pourrait alimenter l’instabilité, la criminalité, ou les tensions communautaires. Par ailleurs, l’absence d’un filet social solide pourrait rendre une grande partie de la population vulnérable aux chocs externes, amplifiant les effets de toute crise.
Pourquoi ces risques sont-ils liés et particulièrement dangereux pour l’Afrique
Ces cinq risques ne sont pas isolés : ils sont interdépendants. Une crise climatique peut nourrir l’insécurité alimentaire, entraîner des migrations, accroître la pauvreté — ce qui rend les populations plus vulnérables à des crises économiques ou sociales. Une instabilité financière globale peut fragiliser les États déjà peu résilients, tandis que l’absence de développement technologique laisserait certains pays en marge.
Pour l’Afrique, c’est la combinaison de fragilités structurelles — dépendance à l’agriculture, faiblesses des systèmes de santé, infrastructures limitées, gouvernances parfois instables — avec ces menaces globales qui rend la période 2025–2030 particulièrement sensible.
Le Global Risks Report 2025 reste l’un des outils les plus complets pour anticiper ces dangers. Il offre des scénarios, alerte sur des probabilités, et propose de repenser les stratégies de développement, de résilience, de coopération internationale.
L’Afrique se trouve à un carrefour. Les décisions, politiques et investissements engagés maintenant peuvent faire la différence entre un passage difficile ou une transition maîtrisée. Anticiper les risques — climatiques, économiques, technologiques, sociaux — veut dire renforcer les infrastructures, diversifier les économies, investir dans l’éducation, la résilience, la gouvernance, et la solidarité.
Ignorer ces signaux, c’est courir le risque que les bouleversements annoncés ne deviennent des chocs destructeurs. Mais si les acteurs publics, privés et la société civile prennent la mesure de ces défis, l’Afrique peut transformer ces risques en opportunités de renouveau.



