Ousmane Sow ou le génie de la sculpture en Afrique
Victor Hugo, Général de Gaulle, Nelson Mandela, Mohammed Ali, Gandhi, Martin Luther King… les effigies de grands hommes réalisées par Ousmane Sow sont énormes. Elles se comptent par dizaines, par centaines.
Elles se comptent en nombre illimité. La sculpture est plus qu’un métier pour ce génie. C’est un art, toute une science qu’il manipule d’une singularité rare.
Né en 1935 dans la capitale sénégalaise, Ousmane Sow s’est mis sur la route de la sculpture dès son enfance. Mais très vite, le destin le consacre à la kinésithérapie. La roue tourne. Il dévie de son droit chemin sculptural. Kinésithérapeute, il gagne sa vie, donne l’impression d’avoir oublié à jamais son rêve d’enfance. Mais les portraits en béton armé sommeillaient toujours en lui. Ils occupaient un coin de sa conscience tranquillement. Ils ne lui forçaient pas la main mais ne le quittaient guère non plus. Puis, à 50 ans, la résurrection.
A l’âge de 50 ans, il décide de se consacrer entièrement à la sculpture. S’attachant à représenter l’homme, il travaille par séries avec un intérêt particulier aux ethnies d’Afrique puis d’Amérique. Il puise son inspiration dans la photographie, le cinéma, l’histoire, l’ethnologie. Fondamentalement figuratives, témoignant toutefois d’un souci de vérité éloigné de tout réalisme, ses effigies plus grandes que nature sont sculptées sans modèle. Ces figures ont la force des métissages réussis entre l’art de la grande statuaire occidentale et les pratiques rituelles africaines.
Il se révèle à l’Afrique et au monde dans les années 80 avec sa collection de lutteurs sénégalais, les «Noubas». Ainsi, l’on comprend qu’il place toujours l’âme au corps de la sculpture, et l’Afrique au coeur de l’Europe.
Aujourd’hui âgé de 73 ans, l’artiste continue d’émerveiller le monde. Présentement, il se consacre à la réalisation de l’effigie de son père, Moctar dans la ville de Dakar. Ce qui ne surprend point. Ousmane Sow a lui-même un physique imposant. C’est un athlète. Un Nouba au sens propre et figuré. La preuve en est qu’il est très exigeant sur la cession de ses œuvres. En 1995, l’Assemblée nationale du Sénégal a vécu ses heures d’artiste qui ne se vend pas à la légère.
Le président de l’Assemblée a acheté auprès de lui pour le décor de l’institution, un Guerrier et un Buffle de sa collection intitulée «Masaï». Un an plus tard, malgré toutes ses relances, l’oeuvre n’a pas été réglée. Le sculpteur envoie un ultimatum au président. L’ultimatum expiré, il loue un camion élévateur et entreprend de récupérer son Guerrier et son Buffle. Les gendarmes affolés et craignant pour leur situation le supplient de n’en rien faire. Ousmane accepte la révision à la longue de l’ultimatum. La nouvelle date fixée arrive à son terme. Il revient avec sa grue. La statue désormais sur la plate-forme du camion, le président de l’Assemblée tente le tout pour le tout. Niet! Il ordonne alors au questeur de le solder. Ce dernier remet au sculpteur dix millions (10.000.000) de francs CFA en petites coupures, qu’il entasse dans son petit sac à dos. Il remet ensuite à leur place le Guerrier et le Buffle.