/food/zotti.jpg » hspace= »6″ alt= »F. Couao-zotti » title= »F. Couao-zotti » » /> charabias et mauvaise foi ?
Pour une fois, un livre n’est pas passé inaperçu au Bénin. Du moins, il a franchi l’espace du lectorat classique pour se retrouver dans le monde politique et au-delà.Même les lecteurs d’un soir qui ont horreur de humer l’odeur du papier, ont senti le besoin de s’intéresser de près à la publication de Rekya Madougou.
Il est vrai que ce livre aurait été versé dans la corbeille du non événement s’il avait été signé par un quidam. Trois raisons expliquent cette effervescence.
La première tient à la personnalité de l’auteur : c’est un ministre – donc personnalité très en vue –, elle est jeune – catégorie d’âge considérée dans nos sociétés comme immature – elle est femme – un sexe présenté comme mineur. Et, sucre sur le beignet, elle est belle – donc potentiellement objet d’envies et de jalousie.
La deuxième raison a trait aux activités ultérieures de l’auteur dont elle rapporte jour après jour les faits dans son ouvrage. L’association Elan dont elle était la présidente, s’était risquée à une mobilisation citoyenne contre les velléités de la révision de la constitution entre 2004 et 2006. Certes, le livre s’achève sur la tenue de ces présidentielles alors jugées improbables, mais le fait que l’auteure ait été appelée au gouvernement deux ans après, est perçu comme récompense à son action. Dans l’opinion, en effet, Rekya est considérée comme le bras civil de Boni Yayi, lequel aurait instrumentalisé Elan, lui aurait fourni matière et lucre afin que la propagande se fît et que le terrain de la magistrature suprême lui soit balisé.
La troisième raison – et sans doute la plus sérieuse – a rapport à l’un des passages du livre qui fait état de la gestion de l’ancien système au sommet duquel trônait le dieu Kaméléon. Mathieu Kérékou, a écrit l’auteure, se serait acoquiné avec des gens au passé criminel, dans un système particulièrement mafieux , (p.31-p.32)
J’ai dit à l’occasion du lancement du livre et dans une interview à une chaîne de télévision privée que ces mots à charge de l’auteure étaient bien graves. Ce sont des accusations qu’il aurait fallu illustrer avec des exemples puisés dans les faits d’arme dont Mathieu Kérékou s’était fait le champion. Certes, des allusions ont été faites sur l’affaire Sonacop (p.34) des clins d’œil ont fait référence à Amani Tidjani Assani (p.35) – gangster notoire qui avait reçu des autorisations de port d’arme du ministre de l’intérieur, etc. mais les preuves des dérives gangstérisques du système caméléonien n’ont pas été rapportées. Du moins, manquent de pertinence. Les Béninois qui ont vécu de l’intérieur l’ancien régime savent de quoi il est question. Il suffit de lire Les Vraies couleurs du Caméléon, le brûlot de Janvier Yahouédéou, pour se rendre compte de l’extraordinaire pillage du Bénin dont s’est rendu coupable le grand « K ». D’ailleurs, ce livre du promoteur de Radio Planète qui alterne analyses, pièces à conviction et documents authentiques, n’a provoqué, en son temps, aucun émoi: il ne pourrait d’ailleurs en être autrement, puisque le livre de Yahouédéhou était et reste inattaquable.
Mais alors pourquoi ce qui relève de la banalité suscite une telle polémique ? Pourquoi des groupuscules sortis du néant – sans doute des anciens bénéficiaires des largesses de Kérékou – se croient-ils obligés de venir au nom de leur amitié supposée au mis en cause, jouer au « touche pas à mon général » ?
Si je comprends la réaction de Modeste Kérékou qui exprime sa colère contre ce qu’il considère comme des allégations faites par « Mademoiselle la ministre » à l’endroit de son père – et même à son égard – il est surprenant d’enregistrer des communiqués de partout condamnant le livre. Je suis même persuadé que beaucoup de ceux qui se sont empressés de vouer la publication aux gémonies n’y ont pas lu un seul mot.
Car, Mon Combat pour la parole ne s’arrête pas à la description du système Kérékou. Il étend son analyse sur les hommes politiques qui ont dirigé le Bénin du renouveau. Par exemple, le parti de l’opposition, la Renaissance du Bénin en a eu pour son grade. Extraits : « même dans l’opposition, le Parti la Renaissance du Bénin, aigri et frustré du pouvoir, affaibli par ce dernier, n’a pu s’empêcher de devenir un parti littéralement mangé par les seuls membres d’une famille. La présidente du parti a préféré coopté ses fils à siéger à l’Assemblée nationale et au Conseil municipal de la capitale économique du pays, Cotonou. »
Décidément, ce livre n’a pas fini de faire des vagues…Celles-ci ne font que commencer !
Florent Couao-zotti