Patisserie

Bientôt du pain avec des farines mixtes
Cette année, les boulangers béninois proposeront à leur clientèle des produits à base de farines mélangées grâce à un projet pilote d’utilisation des farines locales dans la panification et la pâtisserie.
Ce projet, initié par le ministère de l’Agriculture du Bénin, entre dans le contexte de la crise actuelle du blé, qui a rendu le pain actuel plus cher. Le projet, qui vise la réduction des importations de blé et de farine de blé, consiste à inclure les farines locales du pays dans la préparation des produits de boulangerie et de pâtisserie. Il s’agira essentiellement de farines de maïs et de manioc, selon le gouvernement qui a accepté d’appuyer des unités de production de ces farines sur le territoire béninois.

Selon Yombo Malete, responsable de la Direction de l’alimentation et de la nutrition appliquée (DANA), un organisme technique officiel qui conduit le projet, le maïs et le manioc seront transformés en farines dites panifiables. "Ceci veut dire que les propriétés physicochimiques de ces farines, notamment l’humidité, la granulométrie et la couleur devront être les plus proches possibles de celles de la farine de blé", explique-t-il à IPS.

Cette idée n’est pas nouvelle, mais se limitait à des actions isolées, notamment dans le domaine de la recherche dont le gouvernement a décidé de valoriser les résultats afin de lutter contre la crise économique actuelle.

"Pour le début, une réduction sensible du coût de fabrication des produits n’est pas certaine, mais il apparaît évident que le projet contribuera à stabiliser les coûts et permettra de réduire l’importation du blé et de la farine de blé de 15 à 20 pour cent", a déclaré Malete à IPS.

La DANA travaille dans ce projet avec plusieurs partenaires publics et privés tels que l’Institut national de la recherche agricole (INRAB), le Programme de développement des plantes à racines et tubercules (PDRT), et l’Association des exploitants de boulangeries et de pâtisseries.

Des Journées portes ouvertes organisées en décembre dernier à Cotonou, et consistant à faire goûter les produits issus de la panification mixte à la population, avaient connu la participation de nombreuses boulangeries, pâtisseries et fabricants de pains sucrés.

"Les réactions des boulangers sont très favorables à ce projet. Sur la base des réactions enregistrées jusqu’ici et notamment à travers les Journées portes ouvertes, plus de 90 pour cent des boulangers sont motivés pour la mise en œuvre du projet", a affirmé Malete.

Plusieurs boulangers interrogés par IPS sont informés du projet et ont participé aux Journées portes ouvertes. S’ils sont tous ouverts à l’idée du projet, ils ont cependant exprimé des préoccupations diverses.

Luc Toffa, chef pâtissier à la boulangerie "La Gerbe d’or" de Cotonou, s’est montré bien disposé à l’égard du projet, même s’il a émis quelques réserves. "Cette farine a donné de bons résultats, mais bien sûr, ce n’est pas pareil au blé. Il y a également un petit goût qu’on ressent, il n’est pas trop fort, mais la question est de savoir si les consommateurs se feront à ce nouveau goût", a-t-il dit à IPS. "Et nous nous demandons aussi si cette farine pourra nous être fournie tout au long de l’année comme c’est prévu", a-t-il ajouté.

"Dans notre boulangerie, il s’est posé un problème avec la farine mixte au niveau de la consistance du pain. Il pourrait s’agir du taux d’amidon", a indiqué Eric Agopome, gérant de la boulangerie "Citronnelle" à Cotonou. Il a expliqué à IPS qu’en attendant qu’une solution soit trouvée à ce problème, sa boulangerie poursuivra avec l’usage de la farine de blé a 100 pour cent.

Selon la DANA, ces préoccupations sont prises en compte et seront étudiées pour leur trouver des solutions adéquates. En attendant, la population semble bien accueillir le projet pendant les Journées portes ouvertes.

"J’aime beaucoup l’idée de consommer local. Que nos farines soient ajoutées à la farine de blé, c’est une bonne idée. En plus, cela ne pourra que créer des emplois et aider nos agriculteurs", a confié un consommateur anonyme à IPS.

"C’est très bien que les farines de maïs et de manioc soient enfin utilisées à d’autres fins que pour faire la pâte", s’est réjoui un autre consommateur.

Pour sa part, un père de famille a déclaré à IPS : "J’encourage totalement ce projet, mais j’attends quand même de goûter à ces produits pour me faire une idée".

La DANA rassure pour la qualité des produits issus des farines mixtes. "Le projet prévoit la mise en place d’un mécanisme rigoureux de contrôle de qualité des produits. Dans ce cadre, plusieurs sessions de formation des boulangers et des fabricants de farines sont envisagées", a souligné Malete.

Quant aux craintes liées à des carences éventuelles, elles sont négligeables selon la DANA. La Direction de l’alimentation et de la nutrition appliquée explique que le taux de substitution n’est pas élevé : 15 pour cent pour le pain de type français et 15 à 50 pour cent pour les pains sucrés et la pâtisserie. Elle a indiqué qu’au cas où de forts taux de substitution seraient appliqués, des enrichissements pourraient être effectués.

"De plus, la farine mélangée aura l’avantage de réduire la teneur en gluten dont l’excès est nuisible à la santé de certaines personnes", a souligné le directeur de la DANA.

Le projet démarrera réellement durant le deuxième trimestre de cette année. En attendant, des Journées portes ouvertes se poursuivront dans tous les autres départements du Bénin pour sensibiliser la population et former préalablement un grand nombre de boulangers.

Le projet est de fabrication de pain avec des farines mixtes est déjà effectif au Burkina Faso et au Sénégal, et est également en cours d’adoption au Mali.
(ipsinternational)

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