Mise en liberté de Barthélemy Agnan et consorts

Justice rendue ou encouragement de l’impunité ?

Des cadres béninois, arrêtés dans l’euphorie du Changement, sortent un à un de prison. Est-ce une correction d’injustice ou la reculade dans la lutte contre l’impunité ?

Depuis quelques semaines, les Béninois assistent à la mise en liberté de certains cadres accusés de détournement de deniers ou de malversations financières. En un mot, ils ont été incarcérés pour mauvaise gouvernance. Au lendemain de l’arrivée au pouvoir du président Boni Yayi en 2006, plusieurs hauts responsables à divers niveaux dans l’administration publique ont été jetés en prison. C’est ainsi que Séfou Fagbohoun, président directeur général de la Continentale des pétroles et investissements (Cpi) et certains de ses collaborateurs avaient élu domicile à la prison civile de Cotonou dans le cadre de l’affaire-Sonacop (Société nationale de commercialisation des produits pétroliers). Très tôt, d’anciens directeurs généraux de l’ex-Office des postes et télécommunications (Opt), Barthélemy Agnan et Sanni Soumanou, concernant le scandale-Titan qui a fait perdre des milliards à l’Etat béninois, ont été placés sous mandat de dépôt au même lieu de détention. Alain Adihou, ancien ministre chargé des Relations avec les institutions, a connu le même sort à cause de sa gestion du dossier-Lépi (Liste électorale permanente informatisée). D’autres patrons de la police nationale ont été également incarcérés. Un à un, ils sortent de prison sans aucun procès.

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Qu’est-ce qui explique cet état de choses ?

Deux opinions se dégagent. Soit, les mis en cause ont été victimes de la précipitation, du cafouillage, de la navigation à vue du régime du Changement qui voulait montrer au peuple béninois à l’époque qu’il est capable de lutter contre l’impunité, la corruption et la mauvaise gouvernance au sommet de l’Etat. Ici, il fallait poser des actes concrets pour séduire les Béninois. Le contexte dans lequel, la plupart des mis en cause ont arrêtés en dit long. C’était juste au lendemain de la victoire du président Boni Yayi à l’élection présidentielle de 2006. C’est comme si le gouvernement n’a pris aucune précaution pour procéder à la détention dite provisoire de ces personnalités. Par exemple, Séfou Fagbohoun a été libéré sans aucune forme de procès. Les autres sont sortis de la prison sous caution. Or, on les accusait de mauvaise gestion de plusieurs millions voire milliards de l’argent de l’Etat. De là, il y ressort que le gouvernement est en train de rectifier certainement l’injustice qu’il aurait créée à ces anciens détenus de la prison civile de Cotonou.

Si ce n’est pas le cas, on peut faire une autre lecture de la situation. Le gouvernement est peut-être conscient de la véracité des faits reprochés à ceux-ci, mais décide d’enterrer la lutte contre l’impunité par leur mise en liberté. Est-ce à cause des considérations politiques ? Cette question se pose parce que ceux dont on parle sont des anciens collaborateurs du général Kérékou. Si c’était vraiment l’option choisie par l’Etat, le chef de l’Etat aurait fait un grand pas en arrière dans le cadre du combat contre la mauvaise gouvernance. Ainsi, les attentes du peuple béninois en votant massivement pour le candidat Boni Yayi en 2006 auraient été déçues.
Dès lors, il va falloir que le gouvernement explique cette situation à l’opinion publique, car le peuple a droit à l’information. Le ministre de la Justice est attendu sur ce terrain. 

Georges Akpo

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