Kérékou, Yayi, Bio Tchané et les secrets de 2011
Il entretient toujours le mystère. Près de quatre ans après son départ du pouvoir, le président Mathieu Kérékou n’est pas pour autant en retraite comme on le pense. Sous son éclipse et son mutisme légendaire, le général caméléon mijote quelque chose et semble bien avoir une ambition pour 2011.
Il a choisi une retraite modeste. Pas dans les lambris dorés de l’Occident mais plutôt à l’ombre des filaos, aux encablures du port de Cotonou ou parfois en villégiature dans son Natitingou natal. Ca c’est le style de l’homme qui a un dédain pour le luxe. Depuis 2006, son absence difficilement acceptée par certains, est sujette à plusieurs interprétations. On le dit peu disposé à recevoir des hommes politiques. Il aurait même éconduit certains, aurait fermé sa porte de l’intérieur et jeté la clé quelque part. Pas question de le déranger et de vouloir le solliciter pour un quelconque soutien ou un parrainage. Comme lors de sa réclusion de 1991 à 1996, Kérékou donne l’impression de ne plus du tout s’intéresser à la chose politique. Mais bien rusé qui pourra dire si cette attitude est sincère et reflète la vérité de ses intentions. Qui ne connaît pas les manœuvres subreptices du « vieux », habitué à donner le clignotant de la droite et à tourner à gauche. C’est d’ailleurs ce qu’il a recommencé à faire déjà. Depuis quelques jours, on voit quelques-uns de ses enfants flirter avec des hommes politiques de l’Union fait la Nation. L’aîné de la fratrie n’a pas hésité à se montrer publiquement aux côtés d’un ministre du gouvernement. En 2011, même s’il n’ira pas en campagne et qu’il n’appellera pas à voter pour tel ou tel candidat, Kérékou a bel et bien sa carte à jouer. Et qui sait s’il ne la joue pas déjà. En effet, dans la discrétion, le général est en train de faire un travail de grand stratège politique qu’il faut avoir beaucoup de flair pour décrypter. On se rappelle que dans un passé récent, il a accepté de recevoir le président Boni Yayi jusqu’au jour de son anniversaire. Quelques jours après, il reçoit Abdoulaye Bio Tchané dans la discrétion de son manoir des filaos. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont et selon des proches de Kérékou, il sera difficile à Kérékou de soutenir Yayi en 2011, même si rien n’est jamais joué à l’avance en politique. Et pourquoi ? Certains parmi eux n’hésitent pas à parler de son irritation lors de la sortie du livre « Mon combat pour la parole » de Reckya Madougou. Plus grave, la levée de bouclier de l’un de ses enfants contre l’auteur de ce livre a laissé Boni Yayi indifférent. De même, il ne digère pas les discours des proches de Yayi et de certains des thuriféraires du régime qui accusent chaque fois le régime défunt d’être l’auteur de tous les problèmes qu’ils gèrent aujourd’hui. Tenir de tels discours, c’est interpeller directement Kérékou. C’est pourquoi, il n’a pas hésité à rejeter la proposition à lui faite par Yayi Boni de le nommer Général d’Armée avec effet rétroactif.
Il faut le rappeler, cette nomination rapportera à Mathieu Kérékou la somme de 130 millions de francs CFA. Certains canards de la place l’annoncent en tractation politique à Paris depuis quelques jours. Et même si tous ses contacts ne sont pas connus, il ne figure pas de faucons du pouvoir Yayi ou lui-même. On apprend aussi que ses relations avec les hommes politiques de l’Union fait la Nation ne sont pas des plus catholiques. En 2006, il aurait donné quitus d’abord à Abdoulaye Bio Tchané son ancien ministre des finances avant de se raviser suite aux nombreuses sollicitudes des proches de Boni Yayi. Va-t-il faire la même rebuffade en 2011?.
Marcel Zoumènou