Caravane de l’intégration: Deux cents kilomètres de sable pour rallier Tombouctou

Tombouctou, la cité des trois cent trente-trois (333) saints vient d’accueillir la caravane de l’intégration.  Ville malienne aux mille merveilles comme Alexandrie en Egypte,  Tombouctou est située à plus de neuf cents kilomètres de la capitale, Bamako. Mais, les deux cents derniers kilomètres à parcourir sont désertiques. Un désert de sable difficile d’emprunt à tout véhicule excepté les 4×4.  

Se rendre à  Tombouctou relève d’un véritable parcours de combattant. Partie de Bamako, la caravane de l’intégration roule sur sept kilomètres de bitume auxquels s’ajoutent deux autres de désert. Deux cents kilomètres de sable. Que de peine et d’endurance ! A l’entrée de  la route sablonneuse, la caravane se débarrasse de quelques uns de ces véhicules surtout des camions. Selon des informations parvenues à l’équipe coordonnatrice, les camions auront trop de difficulté à traverser le sable. Un seul gros camion est mis sur le parcours avec trois bus et des 4×4.

A peine le seuil de dix kilomètres franchis et le calvaire commence. L’un après l’autre, les bus s’embourbent, les camions s’enfoncent dans le sable. Seuls les petits véhicules résistent parce que «tout terrains». Alors, il faut creuser, désensabler autant que faire se peut et pousser. Quelquefois, l’opération réussit. Mais souvent, il faut toute une heure pour tirer un camion du sable. Quelques minutes après, il s’enlise à nouveau. Aussitôt recommence la même opération. Désensabler, pousser, repousser, pousser encore. Le scénario dure environ quatre heures d’horloge. Par moment, l’aiguille de chauffage des véhicules. Les conducteurs éteignent les moteurs pour que cela se stabilise. Ils redémarrent. Le même scénario reprend. Les mécaniciens interviennent et se rendent compte que c’est le sable qui a bouché les radiateurs. Ils nettoient mais juste le temps d’un nouveau bouchon. Un détachement de l’armée républicaine qui rejoint, entre temps, la caravane pour l’escorter se met à contribution.

Ainsi, les derniers véhicules atteignent tardivement un bras du fleuve Niger qui annonce l’entrée à Tombouctou. Ils sont montés sur une barque pour la traversée. Les caravaniers soufflent enfin un ouf de soulagement. Tombouctou, la cité des trois cent trente-trois (333) saints est maintenant à portée de main. La ville la plus islamisée du Mali. Hautement touristique, elle figure sur la liste du patrimoine mondial classé. Toutes les informations historiques sur la ville suscitent un véritable engouement à aller à sa découverte. Mais Tombouctou déçoit à première vue. Une ville de sable. Au plus, seize kilomètres de bitume la traverse.

Cependant, elle demeure une merveille de l’humanité. C’est une ville qui a gardé son architecture originelle. Le sable est utilisé pour toutes les constructions. Des maisons à deux niveaux construites sans ajout de fer ni de béton armé. Pourtant, ce sont des bâtiments  assez solides, plus solides même que les édifices de type moderne. Autres merveilles à Tombouctou, les tombes des trois cent trente-trois saints. On les retrouve à différents endroits dans la ville. Certaines figurent dans des maisons familiales, d’autres dans des lieux publics, d’autres encore sous des monuments.

Tout le monde témoigne que Tombouctou est une ville sainte, du fait de son statut hautement religieux, du calme qui y règne et de la sécurité légendaire qu’elle offre de façon naturelle. Dans cette ville, on n’enregistre aucun cas de vol.

Mais, à  cause de l’isolement de cette localité du reste du Mali, la plupart des Tombouctiens ironisent qu’ils ne sont pas des Maliens. «Nous un pays à part.» Ces propos sont appuyés par le fait que le pouvoir central ne mène pas des actions urgentes pour le bitumage des deux cents kilomètres de routes du désert. Des élus locaux précisent: «Tombouctou consomme essentiellement des produits importés de la Mauritanie et quelquefois aussi de l’Algérie. Bamako n’arrive pas à nous ravitailler à cause de l’impraticabilité de la route.» Selon un enseignant du coin, la route du désert n’est pas bitumée parce qu’elle est sans intérêt économique pour l’Etat. Le long des deux cents kilomètres de sable, on retrouve à peine deux petits villages. Pas d’activités commerciales, pas une concentration de gens mobiles à tout instant.

Fortuné Sossa (Tombouctou/Mali)

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