Placement d’argent : rembourser, oui, mais...

Après la pluie, le beau temps. Les spoliés de ICC Services, ainsi que ceux des autres structures de placement d’argent, veulent y croire. Ils pourraient rentrer bientôt dans leurs fonds. Le gouvernement, réuni en conseil des ministres, le 1er septembre dernier, a décidé (Citation) : « de faire démarrer le remboursement des déposants pour compter du 13 septembre 2010.

Ce remboursement sera fait par les structures illégales de collecte d’épargne et de placement de fonds elles-mêmes sur les fonds déjà disponibles et qui ne tiennent pas compte des biens meubles et immeubles saisis et non encore réalisés. Ledit remboursement s’effectuera suivant les modalités précédemment retenues à savoir : les remboursements séquentiels sans attendre la réalisation des biens ; le remboursement du capital en fonds propres nets des intérêts ; le remboursement prioritaire des petits déposants… » (Fin de citation).

Cette information est consignée dans un communiqué du  Conseil des ministres, en date du 1er septembre. Cette information, de source officielle, peut être tenue pour digne de foi. Ce qui veut dire, en clair, que cette information n’a rien avoir avec une quelconque forme de rumeur. Cette information, par ailleurs, est technique dans sa formulation. Libellée en français, comme elle l’a été, elle est nettement au-dessus du niveau du grand public. Monsieur ou Madame tout le monde aura retenu globalement que, par la volonté du gouvernement, les victimes des sociétés de collecte d’épargne et de placement de fonds, dont ICC Services, même si celle-ci n’est pas explicitement citée dans le texte, vont être remboursées.

Ce sont ainsi des milliers de nos compatriotes qui reprennent espoir. Dans un contexte qui bruit déjà des mille et un problèmes liés à la prochaine rentrée des classes. Ce qui ne va pas, bon an mal an, sans son lot de dépenses diverses. Egalement dans un contexte où le démarrage des remboursements va coïncider avec la fin du jeûne musulman. Beaucoup y verraient un signe, la main bénie de Dieu, le clin d’œil du destin.

Prenons garde de prendre de telles considérations pour de simples détails. Elles sont émotionnellement chargées, parce que liées aux croyances des uns et des autres. Elles placent, par conséquent, les intéressés dans un certain état d’esprit. Elles prédéterminent les réponses que ceux-ci attendent des autorités gouvernementales.

Il y a là un faisceau de facteurs qui sortent le remboursement annoncé d’une banale et charitable action d’indemnisation de compatriotes sinistrés. Rien ne doit être laissé dans l’ombre. Tous les intéressés doivent être à un même niveau d’information et de compréhension de l’information. Une mauvaise interprétation de la décision du gouvernement ouvrirait la voie à une pagaille montre, voire à des voies de fait. Le moindre dérapage annulerait l’euphorie prudente que nous observons depuis quelques jours. Cela ne serait ni à l’avantage, ni au crédit du gouvernement. D’où l’impérieuse nécessité d’être, dans l’information, clair et complet. 

Voici quelques questions qui attendent, sans délai, des réponses précises.

1-    Qui sont ceux qui seront remboursés à partir du 13 septembre ? Sont-ce, sans distinction, toutes les victimes de toutes les structures de collecte de fonds et de placement d’argent ?
2-    C’est par ICC Services que le scandale est arrivé. Dans quel ordre de priorité, dans le remboursement, le gouvernement place-t-il les victimes de cette société ?
3-    Sur quel montant le gouvernement table-t-il pour démarrer le remboursement, l’argent pour ce faire devant provenir des ressources à l’actif des autres structures illégales de collecte d’argent ?
4-    Donner la priorité, comme cela a été dit, aux petits épargnants dispense-t-il d’identifier clairement ceux qui sont classés dans cette catégorie ? Autrement dit, qui est petits épargnants, comment ou à quelles conditions bénéficie-t-on de ce statut ?
5-    Avec différentes catégories d’épargnants, à quelle hauteur le remboursement se fera-t-il par catégorie de victimes ?

Le succès de l’opération aura l’inestimable avantage de garantir l’avenir. Chat échaudé, dit-on, craint l’eau froide. Pour dire que l’expérience ICC Service laissera de profondes blessures. Malgré tout, il faut éviter que ne s’émousse le sens des économies et de l’épargne des Béninois. La confiance doit revenir. L’adhésion de nos compatriotes aux alternatives qui leur seront proposées  pour sécuriser, demain, leurs économies dépend du succès de l’opération de remboursement d’aujourd’hui. C’est peu de dire que nous jouons gros.

Jérôme Carlos

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