J’étais infiniment triste ce lundi soir où, pensais-je, on avait découvert le corps de Pierre Urbain DANGNIVO ; parce c’est dans le même village de Womey et certainement dans la même maison qu’on avait découvert la voiture
ensanglantée de mon cousin le docteur Anatole SOSSOU, ancien maire de Toffo lâchement assassiné en septembre 2005 dans des conditions jamais élucidées ; même si on a mis sous les verrous les présumés assassins.
Quid des commanditaires de ce meurtre ? Nous n’en savons rien jusqu’ici et j’ai bien peur que ce sera le cas pour notre compatriote Pierre urbain DANGNIVO. Ne nous faisons aucune illusion. On a mis la main sur le présumé assassin, on finira par mettre aussi la main sur ses complices, mais ces gens sont liés par le pacte de sang et cette loi du silence prégnante dans toutes les pègres et mafias du monde : loi du silence qui proscrit de « donner » leurs commanditaires, à supposer qu’ils les connaissent. Voilà un triste drame national ; aussi cessons de nous faire peur ou de sombrer dans la bouffonnerie. Cessons d’alimenter des montages grossiers tendant à nous faire accroire que l’opposition ou la mouvance a un plan diabolique : assassiner des gens en vue afin de faire porter la responsabilité à l’un ou à l’autre camp, soi-disant animé du dessein machiavélique de pêcher en eau trouble ! Ainsi on veut faire assassiner Soulé Mana LAWANI, Armand ZINZINDOHOUE et Rachid GBADAMASSI ! De son côté, l’opposition n’est pas du reste, et réponse du berger à la bergère éructe que c’est la mouvance au pouvoir qui planifie des assassinats en masse de tous ceux qui s’opposent à elle ! Halte-là ! Sinon ces plaisanteries finiront par nous tuer vraiment. En effet, une vague de peur s’est étendue sur toute la nation béninoise. C’est comme si des escadrons de la mort sont omniprésents et sont prêts à envoyer ad patres tous les indésirables. J’ai beaucoup apprécié la sortie raisonnable et concise du Ministre de la Justice, sauf que ce n’était pas la peine d’insinuer que c’est « un charlatan, un bokonon » qui a fait le coup, orientant ainsi vers la thèse du sacrifice humain ! L’individu, un repris de justice et chômeur invétéré, pour joindre les deux bouts se livre probablement à ce métier de guérisseur, de "nouwaton" escroc auquel s’adonnent la plupart des gens de son acabit ; mais ce n’est pas un bokonon, s’il vous plaît ! Mon père, à sa retraite d’ouvrier maçon, s’est formé pendant des années dans la pratique du fä et est devenu un bokonon célèbre, pas un escroc ou un tueur à gages. Si PUD est vraiment assassiné, il aurait pu tout aussi bien être liquidé par des gens de son bord politique, à cause d’une prétendue infidélité politique qu’il serait en train de commettre : laisser le PSD pour la Coalition ABT, par exemple ! C’est la thèse qui a prévalu jusqu’ici pour mon cousin assassiné, maire élu sur la liste RB mais qui serait alors en train de loucher vers la mouvance au pouvoir ! Mais dans le cas qui nous concerne, l’assassinat aurait bien pu être commandité dans des conditions troubles dignes de séries noires politico-affairistes. Dans tous les cas, cessons de nous faire peur et de nous monter le bourrichon! Retrouvons ces attitudes de sérénité et de «hounkoukou » qui constituent les traits dominants du génie béninois. Compatissons d’abord à la douleur de ce vieil homme qui ne mérite pas ce coup dur au soir de sa vie. Compatissons à la douleur lancinante de cette veuve qui depuis plus d’un mois ne sait plus s’il faut accepter l’inéluctabilité de la mort de son mari ou se bercer encore d’espoir en un miracle possible. Lucie AIHOU, la veuve de mon cousin assassiné n’a jamais pu opérer un véritable deuil de son défunt mari et jusqu’ici n’arrive pas à saisir « quelle mort l’a tué ». Nous rentrons dans les six derniers mois qui nous séparent des élections présidentielles de mars 2011.
La classe politique doit donc faire montre de retenue et de responsabilité pour que ces élections se passent bien. Les turbulences de 1996 n’ont connu ce dénouement pacifique qu’à cause d’un homme d’Etat somme toute pacifique ; sinon ce pays aurait connu des violences post-électorales dont nous serions encore en train de nous relever difficilement. Louons et prions le seul Dieu Eternel, le Seigneur Créateur du monde de continuer à jeter son regard compatissons sur le Bénin. Arrêtons de régresser en nous éloignons progressivement de l’esprit fondateur de la Conférence Nationale : cette communion spirituelle qui nous a permis d’éviter un véritable bain de sang. Sursum corda, mes chers compatriotes ! Soyons les dignes héritiers de Monseigneur Isidore de SOUZA.
Dénis AMOUSSOU-YEYE, professeur à l’UAC