Le Génie béninois: Une pure illusion?

Dans deux articles que j’ai précédemment publiés dans nos journaux béninois et panafricains, je nous faisais part des interrogations que beaucoup de citoyens pauvres, aisés, jeunes, seniors, adolescents, adultes, instruits ou non, demi lettrés, actifs ou sans emplois, se posaient

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1°) par rapport à la façon dont un instrument censé nous conduire vers l’apothéose de la transparence électorale était menée. Une sorte de « pourvu qu’on tienne dans les délais temporels du cahier des charges des PTFs à n’importe quel prix, quitte à souffrir d’autisme face aux alertes, et au final encaisser le chèque libellé en devise six cent fois plus élevée que le CFA pour une redistribution des dividendes ».

Une sorte de dénis de respect de ce principe à valeur constitutionnelle inscrit dans notre loi fondamentale : le consensus. [confère pour plus de détails, mon article point de vue n°4 intitulé « Maudite LEPI », du 4 décembre 2010]

2°) par rapport à la façon dont les décisions de la plus haute juridiction du pays, censée départager deux partis en  conflit de position, d’intérêt ou de choix, suscitaient un sentiment de doute, de partialité et même d’inquiétudes. De façon explicite et détaillée, nous avions alerté sur les risques de prises de décision objectives en principe, mais dont le contenu donne l’impression d’une occasion de revanche face à l’histoire et la vie de certains hommes parmi nous. Comme si, profitant de l’occasion que la roue de la vie tourne, on règle des comptes par ci, on en solde par là etc.

Un éminent juriste avait d’ailleurs de façon sibylline, demander à ce que les différents du passé de certains personnages de notre histoire politique ne viennent pas entacher les décisions qu’ils sont appelés à prendre ou à donner au risque de faire tomber 8 millions d’âmes au lieu de quelques unes, dans la détresse.

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Visiblement, ceux à qui ils adressaient ce message d’alerte n’étaient certainement pas devant leur écran de télé au pays mais ailleurs …Certainement dans les limbes du sentiment de puissance que confère le pouvoir décisionnel et politique. [confère pour plus de détails, mon article point de vue n°7 intitulé «Cette cour qui effraie et ne rassure point », du 11 janvier  2011]

 

Quelques mois après ces alertes et mises en garde de gens sensés, n’ayant pas forcément d’intérêt immédiat ou à long terme dans cette lépi ou dans une DCC, en direction d’un peuple dont l’élite se vante « provenir du quartier latin d’Afrique », on aboutit à une situation politique et électorale inédite montrant à quel point, le « génie béninois » est sensationnel, crée des choses d’une qualité exceptionnelle

– pour mettre en place des outils allant non pas dans le sens du progrès collectif  mais dans le sens de la régression et de l’épanouissement de la caste de gens de même espèce, celle de la rente politique.

– pour lire Machiavel et appliquer sa philosophie à contre-sens

– pour finir par convaincre l’ancien président Mathieu Kérékou que « nous ne sommes vraiment que des intellectuels t… »

Nous sommes maintenant convaincus (je l’espère !!! auquel cas notre Mathieu aurait eu raison …)

– que « la LEPI qui n’a pas été inventée par le peuple béninois ne garantie pas FORCEMENT une transparence des élections »

– que « sa mise en oeuvre a toujours demandé plus de temps que ce qui a été prévu au Bénin à cause de sa complexité (exemple du Kosovo et de la Géorgie avec le PNUD et l’OSCE) ».

que  « les LEPI peuvent poser des problèmes dès que les moyens utilisés pour leur mise en œuvre prennent une allure politique et non administrative. C’est le cas actuellement chez nous au Bénin. Ce fut l’exemple de la Grande Bretagne qui, lors d’un contrôle de routine, s’est rendue compte que la liste électorale permanente informatisée était truffée d’erreurs et anormalement tronquée. Et qu’ils sont allés à des élections avec cet instrument »

que « malgré une liste électorale permanente informatisée soit disant fiable et transparente, le Québec n’a pas échappé à une fraude massive au niveau de la procédure de vote lors de son dernier référendum »

que la cour constitutionnelle qui imposait l’affiche des listes électorales dans les bureaux de vote comme elle a exigé « Lépi ou rien » pour ces élections, est étonnamment muette lorsque cette absence de liste des électeurs a permis au génie béninois de montrer ses capacités exceptionnelles à faire mieux que Machiavel.

que « le Dakota du Nord et le Wisconsin, deux grands Etats des USA n’ont pas de liste électorale. Ils fonctionnent à la liste manuelle et pourtant il n’y a jamais eu de fraude constatée lors des élections depuis 1790 »

– qu’imposer « Lépi ou rien » sans offrir une possibilité de porte de sortie consensuelle majeure en cas d’impasse avec cet instrument, a été une des décisions – à mon sens – les plus erronées (sur un plan stratégique et anticipationnel et pas sur le plan juridique) de l’histoire de la cour constitutionnelle.

Pour finir, je ne peux m’empêcher de citer mon ami Clotaire OLIHIDE :

« […] Jusqu’à quand allons-nous nous gargariser des incantations comme : « Dieu aime le Bénin » ou « il faut compter sur le génie béninois » ? Ne sommes-nous donc pas capables d’anticipation, de prévision et de rationalité ? […]»

Et me rappeler cette belle sentence journalistique de Wandji A. de l’Evènement Précis en date du 05 janvier 2011 : « […] Le débat est désormais clos. La liste électorale permanente informatisée (Lepi) est officiellement reconnu comme le seul instrument devant régir l’organisation des prochains scrutins au Bénin […] Il va alors s’en dire que, conformément à l’exigence de la Cour constitutionnelle, la Lepi sera l’outil de fiabilité et de transparence lors des prochaines joutes électorales ».

Je me demande si un jour au Bénin, les résultats seront conformes aux réalités ?

« En 1991, Kérékou a été élu et s’est résigné face au vent de la transition qui a propulsé Soglo.
En 1996, Soglo a été réélu, mais la cour constitutionnelle a proclamé Kérékou qui avait le soutien de la classe politique. Soglo a crié à l’association des malfaiteurs mais personne ne l’a suivi
». [dixit le ministre Candide Azannaï dans l’émission de Radio Tokpa de ce dimanche 27 mars 2011].

Est à dire donc que quelqu’un n’a pas été réelu d’un coup et qu’en somme quand la cour décide chez moi au Bénin, tout le monde se range comme au temps des esclaves ???

Que ceux qui nous dirigent actuellement ou ceux qui sont appelés à nous diriger doivent savoir ce qui suit :

« Ce qui fait la force, la crédibilité et la stabilité des institutions des pays développés, ce n’est pas les hommes qui sont à leur tête. Loin de là …

C’est tout simplement par ce que ceux qui sont à la tête de ces instituions savent qu’il faut prendre  des décisions de sorte que l’institution vive au delà de leur petite personne qui est appelée un jour, … à partir ou disparaître »

A la cour constitutionnelle, du moins à ses membres de faire vivre cette institution au delà de leur propre personne et de leur subjectivité personnelle.

Je ne tiens pas à raconter à mes enfants puis – je l’espère – à mes petits enfants, « il était une fois, la démocratie et le peuple béninois » en omettant volontairement non pas sans honte, des noms de personnages et certains passages de notre histoire politique.

Gino ALAVO, Chercheur associé chez Médicis Consulting – Cotonou, Paris.

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