L’Institut de la femme: ombre et lumière

L’INPF vous connaissez ? C’est l’Institut national pour la promotion de la femme. Il a vu le jour il n’y a guère longtemps. Il est placé sous la houlette de Mme Vicentia Boco, professeur agrégée de médecine de son état, ancien ministre. L’Institut a cru devoir se donner, à l’entame de ses activités et par presse interposée, une plus grande visibilité. C’est l’objet de la conférence de presse organisée le 15 septembre, à Cotonou, à l’effet de faire connaître le programme quinquennal de l’Institut.

De ce programme, nous avons retenu quelques points. Ils nous convainquent par leur pertinence. D’accord d’inscrire ce programme dans la durée. Il se projette à l’horizon de l’an 2025 et s’insère dans la vision nationale du scénario Alafia 2025. D’accord de faire porter à ce plan une grande et belle ambition : la promotion, à terme, d’au moins 50% des Béninoises aux postes de décision dans tous les secteurs de la vie publique. D’accord enfin de décentraliser les actions de l’Institut, dont les démembrements seront mis en place pour une meilleure couverture du territoire national.

En dehors de ces points d’accord, émettons quelques réserves sur certains autres, jusqu’à plus ample informé. L’ancrage institutionnel de l’Institut fait problème. Il est réglé à travers la tutelle de la Présidence de la République. Pour dire que l’Institut pour la promotion de la femme est placé sous l’autorité directe du Chef de l’Etat.

Placer l’Institut sous des bras protecteurs aussi puissants a valeur, a priori, d’une assurance vie. L’institut ne peut être fort que de la force du paratonnerre chargé de le protéger. L’institut ne peut être puissant que de la puissance de son parrain. Ne dit-on pas que qui est proche de Dieu est tout aussi proche de ses œuvres et de ses grâces ?

Mais, dans ces conditions, de quelle autonomie peut-il encore se prévaloir un Institut à la proximité aussi clairement établie avec la Présidence de la République, donc avec le pouvoir d’Etat ? De quelle marge de manœuvre peut-il se prévaloir un Institut dont l’orientation ne peut totalement se situer loin des idées, voire des intérêts de son tuteur ? L’autonomie du budget de l’Institut n’offre aucune garantie d’autonomie réelle. Quand on sait que la main qui donne se situe toujours, et par la force des choses, au-dessus. Elle a le contrôle du débit du robinet à sous. Quand on sait, en outre, qu’on est toujours mal inspiré de s’aviser de scier la branche sur laquelle l’on est assis.

Aussi, dans le contexte d’un pays aussi politisé que le nôtre, l’Institut national pour la promotion de la femme ne peut prétendre à une crédibilité pleine et universelle et se situer au-dessus de la mêlée qu’en se donnant un statut autre. L’Institut aurait dû être l’émanation directe des femmes qu’il est censé servir. Cela le laverait de tout soupçon d’être sous la coupe d’un pouvoir qui pourrait s’en servir.

Nous encourageons fortement deux types d’activités. Auront-elles l’assentiment des responsables de l’Institut ? Rencontreront-elles leur adhésion ? Nous souhaiterions, d’une part, que l’Institut ajoute à ses nombreux chantiers celui d’un observatoire national, à charge de suivre la mise en œuvre et l’application du Code de la famille et des personnes dans notre pays. Le code est encore tout nouveau face à des traditions ou à des coutumes trop ancrées. L’Institut, par ailleurs, toujours dans sa mission d’observatoire, suivrait les progrès, pour les encourager, tout comme les ratés, pour les dénoncer, en matière des droits des femmes. Le rapport de l’Institut devrait bénéficier d’une égale audience et publicité, tout au moins sur le plan national, que les rapports d’Amnesty International ou de Reporters sans frontières, par exemple.

Nous souhaiterions, d’autre part, dans un souci d’ouverture et de transparence, que l’Institut accepte, saisonnièrement, de se faire évaluer par des organismes indépendants ou des ONG spécialisés en promotion de la femme. Ce serait, sans doute, une première. Elle aurait l’inestimable avantage de placer l’Institut, comme exemple quasi unique, aux toutes premières loges. Les sages de Zambie disent : « Chaque vocation est grande si elle est poursuivie avec grandeur ».

Laisser un commentaire