Semaine pleine pour le Bénin. Le souverain pontife, Benoît XVI, foule le sol béninois. C’est, à n’en point douter, un immense événement religieux et politique. Il dépasse, par sa portée, les dimensions de notre pays. Ce sont les projecteurs du monde entier- mondialisation oblige- qui se braqueront sur le Bénin trois jours durant. Il y a là un phénomène de médiatisation planétaire sans pareille. Seules quelques personnes averties peuvent en saisir le sens et en moissonner les enseignements. Nous avons une tradition bien enracinée d’hospitalité. Et l’exceptionnelle qualité de notre illustre hôte ne mettra que plus en relief cette disposition bien béninoise de l’accueil. Il était, du reste, bien visible l’effort que déploient depuis des mois des groupes de volontaires. Objectif affiché : faire de la visite du Saint Père au Bénin un événement mémorable.
Nous avons dit mémorable. Le mot signifie très exactement « Digne d’être conservé dans la mémoire des hommes ». D’où nos interrogations : que restera-t-il de la visite du Pape en terre du Bénin ? Qu’est-ce qui, en référence à cette visite, marquera durablement le paysage humain, social, voire physique de notre pays ?
Avec Benoît XVI, ce sera pour la troisième fois qu’un Souverain Pontife, successeur de Pierre, Chef de l’Eglise universelle, visite notre pays. Il s’agit là d’un fait considérable. Aucune gomme ne saurait ni ne pourrait plus l’effacer de la mémoire du temps, des annales de l’histoire. En attendant que d’autres Souverains Pontifes, à leur tour, reprennent le chemin de notre pays et marchent sur les traces de leurs illustres prédécesseurs Jean-Paul II et Benoît XVI. Ce fait ne dépend pas directement des Béninois. Car l’histoire s’écrira avec eux ou sans eux.
Ce qui dépend des Béninois c’est, d’une part, cette ferveur des hommes et des femmes, des jeunes et des adultes, des religieux et des laïcs dans la préparation de cette visite papale. Une ferveur marquée par un admirable volontariat qui fait que l‘on s’investit sans compte, sans calcul.
Ce qui dépend des Béninois, c’est d’autre part, cet effort colossal, courageux, voire douloureux des autorités communales notamment. Le souci est fort, pour celles-ci, de sortir d’un long sommeil aux couleurs d’une complaisance souvent coupable. Aussi profitent-elles de la visite de l’homme de Dieu pour résoudre les problèmes que des hommes ne cessent de se poser dans une agglomération urbaine. Problèmes d’assainissement et de salubrité, problèmes d’encombrement et d’embouteillage, problèmes de voiries et d’embellissement.
La ferveur qui anime nombre des Béninois pour faire de la visite du Pape un succès est à faire relever de la foi. A définir comme l’adhésion de l’esprit et du cœur à une vérité qui emporte la certitude. Nous sommes, en effet, un peuple de croyants qui sait gravir des pentes abruptes dans la recherche de l’absolu, avec en vision les sommets suprêmes d’une spiritualité sans partage. Cela est consubstantiel à la nature du Béninois. Cela veut dire qu’une telle aptitude fait une, par la substance, avec son être profond. Ce n’est donc pas la visite du Pape qui allume ou rallume cette foi irradiante du Béninois. Toutes les occasions sont bonnes pour qu’il témoigne de la force et de la vigueur de sa foi en Dieu.
Quant aux travaux de voiries, pour recharger ici, colmater là, ou aux baraques que l’on rase sans pitié, on peut regretter que c’est la visite du Pape qui donne subitement du grain à moudre aux autorités de la ville. Il aurait mieux valu faire entrer cela dans un plan d’ensemble d’assainissement et d’embellissement de Cotonou. On ne détruit vraiment que ce qu’on peut ou qu’on sait remplacer. Si cela ne devait pas être le cas, le Pape partira que s’installerait tout aussitôt ce qui nous caractérise le mieux, à savoir, le désordre. Moralité : on ne change pas les choses en cassant les baraques, mais en casant dans les têtes des croyances fortes. Celles qui, dans le cas de Cotonou, déterminent des actions citoyennes durables.
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