Après les assemblées générales du lundi dernier, largement suivies dans le pays, les enseignants ont organisé dans la matinée d’hier mardi 06 mars 2012, une marche gigantesque sur la primature de la République. Ils ont, à travers cette marche, dénoncé la mauvaise démarche du gouvernement et montré leur détermination à ne pas fléchir. Ils avaient le soutien des centrales et confédérations syndicales des travailleurs.
La grève qui secoue le monde de l’éducation s’accentue et le spectre d’une année blanche de plus en plus menaçant. Ce mardi 6 mars 2012, 8 heures à Cotonou précisément à la place de l’Etoile Rouge d’où devrait partir la marche des enseignants. L’atmosphère épaisse et la tension qui existait entre gouvernement et enseignants font craindre un affrontement entre ces derniers et les forces de l’ordre. Sur l’esplanade du lieu, des hommes en uniforme s’affairent. On en dénombre une dizaine environ. Ces agents des forces de l’ordre sillonnent les lieux, jettent un coup d’œil ça et là. De l’autre côté, quelques engins à deux roues sont stationnés. Ce sont des enseignants venus pour la marche. Après des coups de fil passés sûrement avec des responsables syndicaux, ils informent que départ sera pris à la Bourse du travail.
Bourse du travail
8h 45min. A la devanture du bâtiment des centrales syndicales, sont immobilisés des véhicules de la police nationale. Un nombre impressionnant de policiers occupant certains des véhicules et d’autres adossés contre. Dans la cour de la Bourse, le nombre des enseignants ne cesse de croître. La présence de ces hommes d’armes inquiète mais n’ébranle pas pour autant la volonté des enseignants de marcher sur la primature encore que la marche préalablement interdite, a été autorisée tard dans la nuit. On se félicite de la « victoire » de la veille, on se raconte les péripéties de la journée du lundi dernier marquée par des assemblées générales locales et régionales. « La journée du lundi était décisive et nous l’avons gagnée», entend-on comme pour se rassurer et s’encourager.
L’entrée des forces de l’ordre et le début de la marche
A 9h 20 min, le Commandant du corps urbain Imorou Deen du commissariat central de Cotonou, arrive. Il se rapproche de Paul Essè Iko secrétaire général adjoint de la Confédération syndicale des travailleurs du Bénin (Cstb). Après des échanges, le syndicaliste informe les manifestants sur le mobile de la présence des forces de l’ordre. «Elles sont-là pour nous encadrer», explique-t-il. La foule repond par des acclamations et entonne un chant puis des slogans. « Victoire, victoire… ». Les secrétaires généraux Dieudonné Lokossou de la Csa-Bénin, Gaston Azoua Cstb, Pascal Todjinou Cgtb et Noël Chadaré Cosi-Bénin ont tour à tour félicité les enseignants avant de les rassurer de leur prochaine victoire. « Nous sommes tous ici pour vous soutenir », affirment-ils. Ils informent également de la mise en liberté des deux enseignants arrêtés le lundi dernier à Allada.
10 heures, la marche pacifique et ordonnée débute sous l’œil protecteur du Commandant Imorou et ses hommes. Deux longs fils sont formés par les enseignants grévistes et cap est mis sur la primature. Les manifestants ont battu le macadam suivant l’itinéraire Bourse du travail – mosquée centrale de Zongo-Ministère de la Justice-Cnhu-Ministère de l’Economie et primature. « Donne-moi mon argent, j’ai faim », « 25% Ko sans lépi » sont entre autres les mots scandés, “vuvuzela’’ à l’appui, par les enseignants des trois ordres de l’enseignement.
Devant le Ministère de l’Economie et des Finances, ils sont rejoints par le bureau de la Fédération des syndicats du ministère chargé des finances (Fesyntra-finances) avec à sa tête le Sg Laurent Mètongnon.
A la Primature
Il sonne 11h 45 min. Les enseignants sont enfin à la primature très militarisée. Des gendarmes et policiers portant des casques et bâton et bouclier en mains, attendaient là. Le brouhaha est de plus en plus grand mais les responsables syndicaux notamment, Paulin Gbenou un porte-parole du Front et Paul Essè Iko jouent la diplomatie et calment leurs collègues. La parole est donnée au Sg Laurent Mètongnon qui, dans une déclaration aux travailleurs, désavoue la méthode du gouvernement et appelle au soutien des enseignants. « Penser autre chose aujourd’hui en ne soutenant pas les enseignants dans leur lutte, c’est dresser le lit de la dictature à Yayi pour le musellement des libertés… », martèle-t-il.
Le moment attendu
La délégation de la primature sort à 12h 16min pour recevoir la motion de protestation du Haut conseil syndical de l’éducation, initiateur de la marche. Dans la motion lue par Alexandre Agbozo Secrétaire administratif du Front, les enseignants exigent, sans condition aucune, le respect scrupuleux des dispositions contenues dans le décret 2011-505 du 05 août 2011 pour la prise en compte immédiate des enseignants. «Si le Bénin a des difficultés financières, il serait nécessaire pour nous tous de consentir des sacrifices. Les enseignants sont prêts à faire l’effort mais il faudrait que la primature renonce à son milliard et que le ministre des finances en fasse autant pour ses 50 millions de primes trimestrielles » ajoute Eustache Zinzindohoué membre signataire de la motion de protestation. La motion est reçue par le Directeur de cabinet adjoint de la primature Dieudonné Assogba qui a promis la transmettre à qui de droit. « Le gouvernement est à pied d’œuvre pour que le dialogue soit renoué», informe le Dac. Mais la grève, en attendant que le dialogue reprenne, continue.