Dans un différend qui oppose les membres de la Fédération Béninoise de Football (FBF), une des parties en conflit a saisi par assignation en date du 30 novembre 2011 le tribunal de première instance de 1ère classe de Porto-Novo.
Dans un jugement contradictoire n° 12/CCM/12 du 23 Février 2012, le Tribunal de Première Instance de 1ère classe de Porto-Novo vidant son délibéré a :
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dit que le litige relève de la compétence de la juridiction de la Fédération Béninoise de Football (FBF) ;
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constate qu’à la date du 20 décembre 2010, date de la naissance du litige, la Fédération Béninoise de Football (FBF) n’a mis sur pied aucun organe juridictionnel ;
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constate qu’elle n’a, par ailleurs, constitué aucun tribunal arbitral ;
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dit qu’en l’absence d’une clause compromissoire exécutable, le juge ordinaire, c’est-à-dire, le juge étatique recouvre sa compétence ;
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se déclare, subséquemment, compétent ;…
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constate, nonobstant, que l’Assemblée Générale du 15 avril 2011 est entachée d’irrégularités, notamment, la violation des articles 22 et 24 des statuts de la Fédération Béninoise de Football (FBF) ;
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déclare, en conséquence, nul et de nul effet l’Assemblée Générale du 15 avril 2011 ;
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constate que l’Assemblée Générale du 04 février 2011 a été organisée conformément aux statuts de la Fédération Béninoise de Football (FBF) ;
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déclare régulière et valide l’Assemblée Générale du 04 Février 2011 organisée et présidée par le Directeur Exécutif Bernard HOUNNOUVI ;
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confirme les membres du Comité Exécutif élus à cette Assemblée Générale et son Président Victorien ATTOLOU ;
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Ordonne à Moucharafou ANJORIN de passer service à Victorin ATTOLOU..
Par acte d’appel en date du 24 février 2012, l’une des parties a saisi la Cour d’Appel de Cotonou en vue de l’infirmation de ce jugement du tribunal de première instance de 1ère classe de Porto-Novo en date du 23 Février 2012.
La Cour d’Appel de Cotonou à travers sa chambre civile commerciale a, dans son arrêt n°25/12 du 12 Juillet 2012 confirmé les dispositifs du jugement du tribunal de première instance de 1ère classe de Porto-Novo et ordonné :
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à Monsieur Moucharafou ANJORIN de passer service au Président Victorien ATTOLOU ;
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l’exécution provisoire et sur minute de l’arrêt…
En application de l’arrêt du 12 Juillet 2012, Monsieur Moucharafou ANJORIN a passé service par le biais d’un huissier de justice au Président Victorien ATTOLOU le lundi 23 juillet 2012.
Déjà, le 20 juillet 2012, un fax signé de Monsieur Jérôme VALCKE, Secrétaire Général de la FIFA, adressé à M. Moucharafou Anjorin, Président de la FBF l’informait que suite à la décision de la Cour d’Appel du « tribunal » de Cotonou l’ordonnant de passer service à la personne à l’origine de la saisie de ladite Cour, le cas a été référé au Comité d’Urgence de la FIFA le 20 Juillet 2012 qui estime que la décision de la Cour d’Appel est une violation manifeste des articles 13 et 17 des Statuts de la FIFA qui obligent les associations membres à diriger leurs affaires en toute indépendance sans l’ingérence d’aucun tiers… Poursuivant, le Fax du Secrétaire Général de la FIFA, le Comité d’urgence a décidé d’octroyer un délai jusqu’au mercredi 25 juillet 2012, y compris pour que la décision soit révoquée et à défaut, de suspendre la Fédération Béninoise de Football (FBF) avec effet immédiat jusqu’à ce que l’interférence cesse. Le Fax demande ensuite à Monsieur Moucharafou ANJORIN, Président de prendre contact avec les autorités judiciaires directement et indirectement liées au cas ainsi qu’avec les autorités politiques pour leur signifier la position de la FIFA et les sensibiliser aux fâcheuses conséquences sur le football béninois ; La suspension signifiera que tout joueur, officiel , club et autre membre de la FBF sera privé de tout contact sportif aux niveaux continental et international ; de même, la FBF ne bénéficiera plus de l’assistance de la FIFA et de la CAF qu’elle soit financière, administrative ou technique.
Se basant sur l’évolution de la situation, le Conseil des Ministres sur la base d’une communication du Ministre de la Jeunesse, des Sports et Loisirs a tenu une séance extraordinaire le mercredi 25 juillet 2012 pour analyser la situation.
Le Conseil des Ministres présidé par le Président de la République M. Boni YAYI, tenant compte de la Constitution de 1990 qui proclame la supériorité des normes internationales souscrites par notre pays aux lois et règlements nationaux, et respectueux des engagements internationaux… a décidé :
– de l’annulation, jusqu’à nouvel ordre, de la prise de service opérée par le Comité Exécutif dirigé par Monsieur Victorien ATTOLOU, en attendant le règlement du présent contentieux en accord avec la FIFA ;
– du rétablissement dans l’exercice de ses fonctions, à la tête de la Fédération Béninoise de Football, du Comité Exécutif présidé par Monsieur Moucharafou ANJORIN.
Il ressort des décisions prises par le Conseil des Ministres que :
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la passation de service entre Monsieur Moucharafou ANJORIN et le Président Victorien ATTOLOU pourtant ordonnée par l’arrêt n°25/12 du 12 Juillet 2012 est annulée.
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Monsieur Moucharafou ANJORIN, dont l’élection a été annulée par l’arrêt du 12 juillet 2012 est rétabli dans l’exercice de ses fonctions de Président du Comité Exécutif de la FBF.
La lecture de la décision du Conseil des Ministres montre clairement qu’il s’agit du refus de tirer les conséquences de droit d’une décision de justice munie d’un titre exécutoire. Prendre une décision au niveau du Conseil des Ministres (pouvoir exécutif) pour faire le contraire de ce qu’a dit et jugé une Cour d’appel (pouvoir judiciaire), est sans doute une violation du principe sacro saint de la « séparation des pouvoirs » qui fonde l’Etat de droit créé par la constitution du 11 décembre 1990.
Un antécédent :
Ce comportement du pouvoir exécutif présidé par M. Boni YAYI n’est pas la première. En effet, en sa séance du mercredi 10 Octobre 2007, le Conseil des Ministres a décidé de suspendre l’exécution des décisions de justice relatives aux litiges domaniaux. Dès l’annonce de cette décision comme ce fut le cas actuellement, les magistrats se sont mis en grève en guise de protestation, aux motifs que l’Exécutif s’immisce dans les attributions du pouvoir judiciaire. La Cour Constitutionnelle saisie a dit et jugé dans sa décision DCC 07-0175 du 27 décembre 2007 que « le relevé des décisions prises par le Conseil des Ministres … est contraire à la Constitution en ce qui concerne la suspension de l’exécution des décisions de justice ».
Il est donc clair que le gouvernement du Bénin présidé par M. YAYI Boni n’est pas à son premier essai. N’eut été la décision DCC 07-0175 du 27 décembre 2007, on aurait mis en veilleuse les décisions de justice dans un régime de séparation des pouvoirs. La soumission à la loi par tous, gouvernants et gouvernés, juges et justiciables, constitue une garantie essentielle de l’Etat de droit. De cette exigence de l’Etat de droit, il découle que l’exécution des décisions de justice relève de l’impératif. C’est pourquoi nous sommes confortés par la réflexion de l’expert Tchadien Maître. Ribard KLADOUM qui affirme dans sa communication introductive au colloque international de N’DJAMENA de l’Association Africaine des hautes juridictions francophones sur le thème « l’Exécution des décisions de justice dans l’espace AA-HJF » que : « l’inexécution des décisions de justice, est un péril permanent pour l’Etat, car elle entraîne des dérapages, des vendettas pour les plus forts, bref des rebellions. Or, la sécurité juridique et judicaire reste à jamais une charnière d’attraction des investisseurs, caution d’un développement harmonieux ».
Dans cette réflexion relative à la décision prise par le Conseil des Ministres en sa séance du 25 juillet 2012, il nous paraît nécessaire d’analyser d’une part, les raisons qui fondent cette décision et d’autre part, la portée juridique du Fax de la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) en date du 20 juillet 2012.
Raison évoquée par le gouvernement contenue dans le communiqué présenté par Secrétaire Général du Gouvernement M. Eugène DOSSOUMOU
Le Conseil des Ministres, tenant compte de la Constitution de 1990 qui proclame la supériorité des normes internationales souscrites par notre pays aux lois et règlements nationaux, et respectueux des engagements internationaux, ne peut accepter de faire courir à notre pays le risque de se voir exclu de toutes compétitions officielles, même amicales ainsi que de tout contact en matière de football.
Le gouvernement évoqué suscite des interrogations comme moyen qui fonde sa décision « la raison de la supériorité des normes internationales souscrite par notre pays aux lois et règlements nationaux et respectueux des engagements internationaux »
Ce moyen évoqué suscite des interrogations quant au respect de la constitution du 11 décembre 1990 en matière des traités et accords internationaux. En effet, la Constitution du 11 décembre 1990 a non seulement clairement organisé les conditions qui permettent à la norme internationale d’être supérieure aux lois et règlements nationaux, mais aussi les conditions qui fondent le respect des engagements internationaux.
Selon les articles 145 et 147 de la constitution du 11 décembre 1990 « – Les traités de paix, les traités ou accords relatifs à l'organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l'Etat, ceux qui modifient les lois internes de l'Etat, ceux qui comportent une cession, échange ou adjonction de territoire, ne peuvent être ratifiés qu'en vertu d'une loi.
Nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire n'est valable sans le consentement des populations intéressées.
– Les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ».
Il ressort de la lecture combinée des deux articles, deux conditions cumulatives essentielles avant qu’un engagement international ne soit supérieur aux lois nationaux. Il s’agit de la prise d’une loi qui ratifie l’engagement puis de la publication de cette loi ratifiant l’engagement au journal officiel du Bénin. Dans le cas d’espèce, il s’agit du « respect » des règlements ou statuts de la FIFA qui n’ont fait l’objet d’aucune ratification par l’Assemblée Nationale du Bénin encore moins d’une publication au journal officiel.
Faut-il rappeler que le Bénin en tant qu’Etat n’est pas membre de la Fédération Internationale de Football (FIFA) puisque cette institution qui est enregistrée au registre du commerce conformément à l’article 60 et suivant du Code civil Suisse n’est pas ouverte aux Etats mais aux associations qui sont chargées d’organiser et de superviser le Football dont la Fédération Béninoise de Football (FBF). C’est d’ailleurs pourquoi, les pays comme la Grande-Bretagne ont fait adhérer à cette institution qu’est la FIFA, quatre associations de Football. On retrouve également membres de la FIFA des associations qui ne viennent pas d’Etat indépendant reconnu par le Droit International.
On ne saurait donc évoquer un prétendu respect des engagements internationaux pour fouler aux pieds l’article 125 et 126 de la Constitution du 11 décembre 1990.
Portée juridique du Fax de la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) en date du 20 juillet 2012.
Le Conseil des Ministres en sa séance du 25 juillet 2012 évoque sur la base du fax du Secrétaire Général de la FIFA « qu’il ne peut accepter de faire courir à notre pays le risque de se voir exclu de toutes compétitions officielles, même amicales ainsi que de tout contact en matière de Football »
Pour mieux appréhender la portée juridique de ce fax de la FIFA c’est l’analyse de la Sentence Arbitrale du 13 septembre 2011 dans l’affaire FBF Victorien ATOLOU contre la FIFA rendue par le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) qui va nous édifier.
Avant d’aborder la portée juridique du Fax de la FIFA, qu’il nous soit permis de faire connaitre le TAS et sa compétence.
Quelques généralités sur la TAS :
Le Tribunal arbitral du sport (TAS) est une institution internationale proposant un arbitrage ou une médiation dans le monde du sport. Cette institution dépend du Conseil International de l'Arbitrage en matière de Sport (CIAS).
Le TAS comprend deux formations: une Chambre d’arbitrage ordinaire pour les litiges soumis au TAS en qualité d’instance unique et une Chambre arbitrale d’appel pour les litiges résultant de décisions prises en dernière instance par des organismes sportifs. Les arbitres, qui doivent être des « personnalités ayant une formation juridique et une compétence reconnue en matière de sport », sont désignés par le Conseil International de l’Arbitrage en matière de sport (CIAS) pour une période renouvelable de quatre ans. Ils doivent exercer leur fonction en toute objectivité et indépendance.
Le Conseil International de l'Arbitrage en matière de Sport (CIAS) a pour tâche de sauvegarder l’indépendance du TAS et les droits des parties. Il assure l’administration et le financement du TAS.
Toute personne physique ou morale peut saisir le TAS: athlète, club, sponsor, société de télévision, fédération sportive etc., dès lors qu’ils sont liés par une convention d’arbitrage qui le désigne. Ils peuvent en avoir convenu par écrit dans un accord isolé mais cette désignation peut aussi être contenue dans les statuts d’un organisme sportif, ce qui est généralement le cas.
Le TAS connaît des affaires qui ont un lien direct ou indirect avec le sport. Plus précisément, il s’agit de litiges de deux types:
Les litiges de nature commerciale; et les litiges de nature disciplinaire.
Les litiges commerciaux recouvrent les litiges portant par exemple sur les transferts de joueurs, sur la vente de droits de télévision, sur l’exécution de contrats de sponsoring ou encore sur l’organisation de manifestations sportives. Quand le TAS est saisi de telles affaires, il agit en qualité d’instance unique. Mais, les litiges commerciaux ne constituent pas la plus grande activité du TAS, puisqu’il a été estimé que 65% des affaires traitées par le TAS concernaient des affaires disciplinaires et, principalement, des affaires de dopage.
Une sentence rendue par le TAS est définitive et obligatoire pour les parties à compter de sa communication. Sa reconnaissance et son exécution ont lieu conformément aux règles prévues par la Convention de New York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères qui a été signée par plus de 125 pays.
– Portée juridique du Fax de la FIFA
Qu’il vous souvienne qu’au lendemain de l’Assemblée Générale du 4 Février 2011, M. Victorien ATTOLOU a été élu Président de la FBF avec un nouveau Comité Exécutif. Par courrier du 15 Février 2011 émanant de son Secrétaire Général M. Jérôme VALCKE, la FIFA a dit qu’elle ne reconnaît pas le résultat de ce processus et que le seul interlocuteur légitime qu’elle reconnaît est M. Anjorin Moucharafou.
Dans cette instance devant le TAS, la FIFA a évoqué l’irrecevabilité de la demande de la FBF (ATTOLOU) tenant à la nature même de l’acte attaqué en arguant que le recours déposé par la FBF de Victorien ATTOLOU ne serait pas une décision au sens formel du terme, mais une simple correspondance qui n’a pas un caractère d’acte décisoire mais plutôt d’un acte informatif. (N° 31 de la sentence arbitrale).
Le TAS dans le dispositif de sa sentence arbitrale a dit que « la nature de la mesure contestée conditionne la recevabilité de l’appel ». Poursuivant, il dit que la correspondance soumise par la FBF dans le différend ne peut être regardée comme un acte décisionnel. (N° 53 de la sentence arbitrale).
Qu’en se fondant sur la rédaction et le contenu de cette correspondance, il s’agit d’un courrier qui après avoir fait une simple constatation de la situation informe. C’est un courrier qui a un caractère d’un acte déclaratif, informatif, préparatoire. (N° 54 de la sentence arbitrale).
Sur cette base le TAS dit que l’appel déposé le 7 mars 2011 par la FBF représentée par M. Victorien ATTOLOU contre la FIFA est irrecevable.
Il ressort de cette sentence arbitrale que tous les courriers envoyés par la FIFA ne peuvent pas être pris en compte comme une décision. Pour qu’il y ait décision, il faut que la mesure soit prise ou ratifiée par le Comité Exécutif et cette décision est susceptible de recours devant le TAS. Il est donc difficile d’admettre que notre gouvernement s’est fondé sur un pareil document signé de la même personne (Jérôme VALCKE) pour fonder une importante décision qui dans le cas d’espèce, est considérée comme une « norme supérieure ».Le document FAX envoyé par le Secrétaire Général de la FIFA pose déjà des problèmes quant à sa forme.
Comme titre du document, on peut lire :
« Décision du Comité d’Urgence suite à la décision de la Cour d’Appel du Tribunal de Cotonou ».
Rien qu’à lire ce titre, le gouvernement devrait déjà se poser des questions par rapport à la qualité de la correspondance qui fonde cette décision. En effet, au Bénin, nous n’avons pas une Cour d’Appel du Tribunal de Cotonou. Nous avons une Cour d’Appel et un Tribunal de Cotonou. Ce sont deux juridictions différentes.
A voir le titre du document, l’on peut supposer que la FIFA avant d’envoyer le Fax n’a pas encore reçu notification de l’arrêt de la Cour d’Appel. Ce qui pose le problème de la pertinence de sa menace. Il est constant qu’avant que la grande et respectable Institution qu’est la FIFA prenne une décision, il fallait que cette dernière s’assure de l’information.
Les décisions du Comité d’Urgence de la FIFA ne sont pas définitives :
Bien que selon les statuts de la FIFA, aux articles 33.1 et 3, le Comité d’Urgence traite toutes les affaires nécessitant d’être réglées entre deux séances du Comité Exécutif avec effet immédiat, toute décision prise par le Comité d’Urgence doit être confirmée par le Comité Exécutif lors de sa séance suivante. Cela suppose que les décisions du Comité d’Urgence peuvent être rapportées par le Comité Exécutif qui selon l’article 31.2 des Statuts de la FIFA se réunit au moins deux (02) fois par an.
La décision prise par le Conseil des Ministres du Bénin à la suite de ce fax de la FIFA est à notre avis prématurée étant entendu qu’aucune disposition n’est prise par notre Etat pour s’assurer de la position du Comité Exécutif de la FIFA qui dans le cas d’espèce n’est même pas compétent pour prononcer la « suspension ou exclusion d’un membre, s’il y a lieu ». En effet, il est pourtant clair dans les statuts de la FIFA que la décision de « suspension ou exclusion d’un membre, s’il y a lieu » relève du congrès qui est composé de tous les membres de la FIFA. (Cf. article 25.2 f des statuts de la FIFA).
La prudence de notre gouvernement face à ce fax devrait être de mise lorsque l’on sait que « Toute suspension doit être confirmée par une majorité des trois quarts des suffrages exprimés lors du Congrès suivant, faute de quoi elle est automatiquement levée ».(Cf. article 14.2 des statuts de la FIFA )
Contrairement à ce qui a été dit, la FIFA n’écrase pas les membres dans la mesure où ses décisions ne sont pas sans recours.
Faudrait t-il nous rappeler que dans l’Affaire de l’Ex-Président de la Confédération Asiatique qui a été sanctionné à vie par la FIFA, le Tribunal arbitral du sport (TAS) a désavoué la FIFA. Le TAS a levé la suspension à vie infligée au Qatariote. L'ex-président de la Confédération asiatique était accusé par la FIFA d'avoir acheté des voix pour l'élection à la présidence de la FIFA en mai 2011. Le TAS précise qu'il n'est pas "en train de conclure à l'innocence de M. Bin Hammam, mais que les preuves ne sont pas suffisantes".
C’est le cas également dans l’affaire de la participation des joueurs aux jeux olympiques où la FIFA avait décidé, sous menace de sanctionner les clubs qui ne vont pas laisser partir leurs joueurs aux jeux olympique de Pékin de 2008 ; Le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) a désavoué la FIFA et a indiqué dans sa sentence arbitrale que les clubs n’ont « aucune obligation de libérer les joueurs » de moins de 23 ans pour les Jeux de Pékin. »
Il est donc clair que la FIFA à travers cette menace de suspension n’a pas un droit de vie ou de mort sur notre Fédération encore moins sur notre Etat, car, une décision du Comité Exécutif de la FIFA n’est pas sans recours.
Sans se précipiter, notre gouvernement avait la possibilité de s’assurer de la qualité du Fax surtout que celui-ci est adressé à M. Moucharafou ANJORIN.
En tout cas, il faut qu’on retienne avec Madame Agnès AYADOKOUN, Conseiller à la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême du Bénin que « le refus d’exécuter une décision de justice, quels que puissent être les états d’âme des uns et des autres , quels que soient les motifs évoqués pour fonder son abstention, ne saurait être légal ».(Cf. communication au colloque international de N’DJAMENA de l’Association Africaine des hautes juridictions francophones sur le thème « l’Exécution des décisions de justice dans l’espace AA-HJF » du 11 au 13 novembre 2008).
Serge PRINCE AGBODJAN
Juriste