Les folles rumeurs qui courent les rues depuis quelques jours et qui font état d’un complot en préparation contre le gouvernement prennent de plus en plus la forme d’une information officielle. Un communiqué du ministre de l’intérieur, de la sécurité publique et des cultes Bénoît Dègla rendu public hier en donne la preuve.
Et confirme aussi la psychose qui s’empare du sommet de l’Etat. Le communiqué du ministre de l’intérieur n’apporte rien de rassurant au béninois lambda confronté ces derniers jours à gérer les affres de la misère et de la paupérisation ambiante. Selon ce communiqué, des hommes politiques en intelligence avec des opérateurs économiques et des milieux syndicaux seraient en train de recruter des sicaires pour attenter à la vie de certaines personnalités. Tout ceci serait assorti d’une grève générale pour paralyser le pays. Le plan serait ourdi dans le secret. A cette information qui prenait l’allure des ragots de rue, le gouvernement vient de donner un cachet officiel. Et là, personne ne peut rien reprocher au gouvernement qui dispose d’une armée et surtout des services de renseignement pour avoir de telles informations. C’est seulement la méthode décrite pour résoudre le problème qui paraît bien saugrenue. Supposons que l’information soit vraie et qu’il y ait vraiment un complot contre la république. Le gouvernement avait-il besoin d’alarmer le peuple ? Avait-il besoin de se fendre d’un communiqué pour jeter les Béninois dans la psychose ? Non, un gouvernement responsable dans ce cas prend les mesures pour prévenir un tel complot en mettant en place un plan de sécurisation approprié en place. En France, lorsque la Dgse est informée des attentats, c’est le plan Vigipirate qui est mis en œuvre. La solution dans ce cas, c’est bien le gouvernement qui en dispose puisque c’est lui qui a l’Armée, la Police, les services renseignements à sa disposition et les moyens pour anticiper de tels attentats. Mieux, le Chef de l’Etat tient lui-même le porte feuille de la défense et a la latitude de l’organiser à son gré. Il ne sert à rien de s’en prendre aux syndicats, aux partis politiques et même aux pérateurs économiques non armés alors qu’on a la possibilité de régler le problème.
Un indice
Seulement, il y a bien d’autres raisons de prendre cette information du gouvernement avec des pincettes. En effet, cette information n’est que le prolongement des déclarations faites le 1er Août dernier par le Chef de l’Etat selon lesquelles l’Un et quelques syndicats veulent se mettre ensemble pour créer une insurrection pour le chasser du pouvoir. La seule évolution ici, c’est que nous sommes passés de l’insurrection au complot. Et là, il y a deux explications possibles. Le premier c’est que le gouvernement veut envoyer cette information dans l’opinion pour créer une psychose et soulever des gens contre le Front uni créé il y a quelques jours malgré les menaces du Chef de l’Etat. Ou alors, le gouvernement veut se servir d’un artifice pour instaurer un « Etat fort », thème dont semble être si friand le ministre de l’intérieur. Dans un tel Etat, les libertés devraient être limitées. Les marches, les grèves et même les conférences de presse pourraient être interdites dans les jours à venir. Et déjà ça a commencé. On pourrait arrêter n’importe qui une fois qu’il est soupçonné de telle ou telle chose. Le Front Uni ne pourra plus mettre en œuvre son programme de lutte contre la liquidation de la démocratie. C’est un Etat d’urgence qui est ainsi décrété de facto. Au nom d’un complot hypothétique. Comme ce fut le cas sous le Prpb de sinistre mémoire et sous le président de la Guinée Sékou Touré. L’exemple et l’inspiration sont anti-démocratiques. Mais qui est bête ? Yayi a besoin « qu’on le laisse tranquille pour travailler ».
- Lire le communiqué : Paix et sécurité nationale : le ministre de l’Intérieur évoque un complot en vue contre la République