Depuis les législatives de 2007, les Forces cauris pour un Bénin émergent(Fcbe) sont devenues la première force politique du pays. Clopin-clopant, sans grande imagination et surtout sans projet de société, elles conservent leur hégémonie politique sur le Bénin.
Leurs seules inspirations ne dépassent pas les marches et déclarations de soutien pour caresser le Chef de l’Etat dans le sens du poil.
Au front depuis 2006 pour conduire le Bénin vers le développement et la prospérité, le président Boni Yayi est un homme bien seul. S’il n’est pas soutenu et accompagné par les forces politiques de l’opposition-ce qui est normal- et une frange de la société civile, il l’est aussi par sa propre coalition politique : les Fcbe. Car normalement en tant que majorité présidentielle, cette coalition politique qui est une constellation de mouvements et partis politiques auxquels le Chef de l’Etat s’est, lui-même, échiné à donner une notoriété nationale en prenant fait et cause pour elle et en lui faisant campagne sans retenue, devrait lui apporter un plus. Elle devait donc, en dehors des ressources humaines pour occuper les postes de responsabilité au sommet de l’Etat, être un tink tank pour l’aider à bien gérer le pays. Les Fcbe devraient être une boîte à idée qui fait des propositions de gouvernance et trace des directives pour les politiques sectorielles. Dans une démocratie, c’est cela qu’on doit observer. En France par exemple, le président Hollande n’est venu au pouvoir que sur la base du projet de société du Parti socialiste conçu par un collège de cadres du parti. Avec les Fcbe, c’est le contraire qui est observé. Au lieu que ce soit ce parti qui alimente le Chef de l’Etat en idées et en réflexions prospectives et stratégiques pour réussir sa gouvernance, c’est plutôt lui qui les alimente. La preuve, cette coalition est restée souvent sourde aux difficultés que vivent les béninois, à la crise économique engendrée et aux dossiers sulfureux comme le Pvi, le coton. Tout ceci a engendré la désorganisation de l’économie et de la production nationale, la destruction des emplois, l’appauvrissement accéléré de la population. Face à cette descente aux enfers de l’économie nationale, plusieurs personnes ont réagi de diverses manières. C’est le cas du médiateur Albert Tévoédjrè- qui a envoyé une lettre ouverte au Chef de l’Etat- de l’Ordre des avocats du Bénin, de l’ecclésiaste Raymond Goudjo et de bien d’autres organisations politiques. Jamais les Fcbe n’ont daigné à piper mot. Et pourtant, le Chef de l’Etat a fini par avouer il y a quelques semaines l’échec de sa gouvernance en affirmant que nous sommes les derniers dans la zone Uemoa en matière d’économie. Pendant ce temps, les Fcbe étaient en vacances. Lors de ces journées portes ouvertes des 26, 27 et 28 Juillet, l’Un a fini par l’interpeller à la fin de son épilogue intitulé « Où en sommes-nous ? » en disant : « Que répondent le Président Yayi et les Fcbe ? ». Aucune réponse de la part des Fcbe.
L’allergie à la contradiction
Il a fallu attendre le 1er Août pour que le Chef de l’Etat apporte une « réponse » à ces préoccupations. Son interview, bien que révélant beaucoup de vérités, était truffée de menaces. Cette intervention n’a pas comblé les attentes et suscite encore des réactions eu égard aux nombreuses accusations portées contre des tiers. Mais il a fallu que leur leader politique parle d’insurrection pour que les forces coalisées au sein des Fcbe reprennent les mêmes choses comme des enfants de chœur. Et les soutiens pleuvent de toutes parts, sans oublier les nombreuses marches organisées à cet effet. Pourtant cette interview a révélé à la face du monde un président un peu fatigué, à qui échappe des dossiers importants du pays. Les Fcbe si attachés à leur président devraient flairer un échec de leur machine et réfléchir à l’élaboration de propositions concrètes pour la correction des nombreuses défaillances notées dans la gouvernance-Yayi. Tout se passe comme si aux Fcbe, tout le monde fonce la tête baissée, sans aucune réflexion et aucune initiative. La coalition s’est aussi illustrée par une allergie à la contradiction. La moindre critique d’un parti de l’opposition contre le Chef de l’Etat suffit pour allumer la mèche de leur côté. Même les propositions venant des forces politiques de l’opposition ne reçoivent aucun écho de leur part. La preuve, le parti Alafia lors de sa réaction du 14 Août s’en est pris vertement à l’Un. « Dans la déclaration de l’Un, la provocation des accusations, la gratuité des affirmations et la légèreté des propositions dites alternatives laissent pantois plus d’un observateur averti de la scène politique béninoise », fustige le parti. Curieusement, le parti ne réagit que subjectivement à quatre propositions. Une telle réaction qui montre bien le mépris de ces acteurs de la majorité présidentielle pour les propositions de solution pour la gestion de la crise actuelle affiche une lecture parcellaire du document. Rappelons-le, l’Un après l’état des lieux a proposé quatre solutions et rendu publique 26 positions. Le parti Alafia ferait des critiques crédibles en lisant le document de l’Un à tête reposée et sans des lunettes colorées. En cinq ans d’existence, les Fcbe qui sont devenues la première force politique du pays grâce à l’appareil d’Etat qui les accompagne et à l’engagement personnel du Chef de l’Etat n’ont apporté aucune contribution à l’enracinement de la démocratie, ni au développement du pays. Il est curieux ainsi d’entendre les acteurs de la majorité présidentielle affirmer que les leaders de l’Un n’ont pas le droit de critiquer le régime actuel sous prétexte qu’ils ont mal géré le pays lors des dix ans du président Kérékou. Après 2016, à l’heure du bilan, Karimou Chabi Sika et ses amis de la mouvance qui se plaisent à renvoyer l’Un à sa gestion des années Kérékou, devraient aussi s’attendre à assumer les nombreuses erreurs et la gouvernance Yayi. Une politique d’ostracisme est née avec la rareté des débats d’idées et de la contradiction de l’arène politique. La seule innovation obtenue est la fréquence des marches et des déclarations de soutien, une vieille pratique togolaise qui a fait recette sous l’ex-président Gnassingbé Eyadema. Les Fcbe, avec le président Yayi, apparaissent de plus en plus comme le seul maître à bord du navire Bénin. Les Fcbe se présentent comme une coalition politique amorphe, sans projet de société, sans perspective, composées d’hommes politiques sans grande notoriété, qui se cachent sous Yayi juste pour des prébendes et qui attendent son départ du pouvoir pour chercher d’autres horizons. Un « club électoral » qui, à l’image de l’Ubf, va disparaître après Boni Yayi.