Xwlacodji : les déguerpis sont de retour

Après plusieurs nuits passées à la belle étoile, les populations « sinistrées de  Xwlacodji», victimes du déguerpissement des berges lagunaires de Cotonou le vendredi 4 mai dernier renouent avec la chaleur d’un abri, si peu décent soit-il. 

Ces derniers se réinstallent progressivement sur leurs terres laissées en l’état après l’opération.

Les hangars faits de bois, des briques disposées pêle-mêle et coiffées d’un toit de  tuiles à peine entières, des feuilles de tôles superposées soutenues par des bâtons de bois secs, des tentes de fortune en nattes de rotin, des blocs de bambous recouverts de sachets ; dressés çà et là sur l’espace autrefois déblayé. Telle est le visage que présente la berge assainie de Xwlacodji le soir du samedi 08 septembre écoulé. Des habitations précaires émergent de partout. Les riverains, avec une nonchalance extrême s’affairent autour du feu pour le repas du soir. Tandis que ceux qui viennent de regagner leur nouveau logis s’empressent pour ne pas être surpris par l’obscurité qui recouvre déjà la cité. « Nous vivons comme des réfugiés sur notre terre natale et sommes sujets à toutes les intempéries. Nous n’avons nulle part où aller et nous demeurerons sur place en attendant le dédommagement», lâchera un autochtone. Vingt et une heures trente minutes, heure de Cotonou. Une nuit obscure étend son voile sur « égbacodji » -nom donné à cette zone du fait du déguerpissement- et on doit à présent la visibilité aux lumières des lampes tempêtes qui proviennent des abris de fortune. Seuls deux enclos sont pourvus d’électricité. Cette partie du quartier est très mal éclairée en dépit de la présence humaine. Mais, on peut encore apercevoir quelques habitants, sans abris, raser les nouvelles concessions pour y quémander une place pour la nuit. Leur soif est bientôt assouvie quand ils découvrent derrière une case, un espace assez protégé, susceptible de les abriter pour la nuit et de leur offrir un petit confort. Paul, un étudiant qui s’attelle à placer sa moustiquaire déclare : « le gouvernement a usé de ses prérogatives exorbitantes de puissance publique pour nous éjecter de nos maisons de la façon la plus humiliante qui soit. Tous nos biens étaient restés dans les décombres et sans dédommagement, on ne pouvait aller nulle part. La seule solution qui nous est venue était sans équivoque l’édification de cette cabane de bambous pour nous protéger du soleil et de la pluie et pour sécuriser les rares effets que nous avons pu récupérer des ruines ». « Nous avons été victimes de la barbarie des autorités gouvernementales qui nous ont anarchiquement expropriés sans nous dédommager. Les premiers jours, ma famille et moi nous nous sommes retrouvés dans la rue. Mais après moult réflexions, nous avons dû rebrousser chemin pour échapper au froid qui y régnait. Depuis, nous dormons en rangs dispersés sous ces hangars mal recouverts », dira lauriano, un sans abri qui ménage le hangar qui lui sert dorénavant de couchette. Andrick, son compagnon de lit, renchérit « le gouvernement, au lieu de se pencher sérieusement sur la question des dommages et intérêts dont il est débiteur à notre égard semble faire l’impasse sur notre existence. Et le ministre de l’environnement, sans aucune pièce à conviction et au mépris des règles de prescription immobilière, avait fait croire naïvement au monde entier que nos ancêtres avaient déjà été dédommagés».

Le dédommagement en question

Léhady Soglo, 1er adjoint au maire de Cotonou, au cours d’une réunion de la commission paritaire Mairie/Mehu qui a en charge la question de l’assainissement des berges, avait été hébété et indigné d’apprendre que les populations de Xwlacodji n’avaient jamais été dédommagées », affirme Parfait Dékoun, le premier responsable à l’organisation du comité de crise de Xwlacodji. « Le Ministre de l’environnement, de l’habitat et de l’urbanisme, Blaise Ahanhanzo Glèlè et toute son équipe sont unanimes sur l’absence de dédommagement juste et préalable de nos populations de Xwlacodji. Aussi, nous a-t-il exhortés à prendre part aux réunions de la commission paritaire qui se tient tous les mercredis. C’est donc à l’une de ces rencontres que le directeur général adjoint du Mehu, Imorou Orou Jerry a satisfait la curiosité du premier adjoint au maire de Cotonou qui voulait toute la vérité sur la question du dédommagement des populations cibles » révèle-t-il. Pour lui, les autorités gouvernementales et municipales savent qu’en violant l’article 22 de la loi fondamentale tout en expropriant comme elles l’ont fait des enfants Béninois, elles s’exposent non seulement au paiement de dommages mais également à réparer le préjudice qu’elles leur ont causé.  « Pour l’heure, les pourparlers sont toujours en cours et nous comptons sur la bonne foi des autorités béninoises qui ont la possibilité d’accélérer les négociations pour soulager la peine des milliers de victimes » dira-t-il pour conclure.

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