Tentative d’empoisonnement de Yayi Boni : le masque est tombé

Deux ans après son déclenchement à grand spectacle, le sulfureux dossier de la tentative d’empoisonnement du président de la république a connu un dénouement pour le moins inattendu. Et ce, par la volonté d’un seul homme dont les pouvoirs auto proclamés sont à l’évidence au-dessus de toutes les instances judiciaires de la république.

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Tout est bien, qui finit bien ; ou presque. Les personnes directement mises en cause et emprisonnées au Bénin sont désormais libres.On peut et on doit se réjouir pour elles et leurs familles. En même temps, on peut s’interroger sur les contours de cette affaire qui a lourdement écorné l’image du Bénin qui ressemble aujourd’hui plus à une vieille république bananière qu’à une démocratie émergente. La libération des mis en cause résulte en effet du pardon officiel que le chef de l’Etat a bien voulu leur accorder en sa qualité de « père de la nation ». En clair, là où les décisions de justice ont échoué et valu aux juges des sanctions disciplinaires et des tracasseries policières suivies d’exil, la parole du chef de l’Etat a fait l’effet d’un miracle. Dès lors, et au regard de ce cette collusion politico judiciaire, on peut s’interroger sur la valeur des décisions de justice dans notre pays, si elles ne sont pas revêtues du sceau du président de la république.

Vous avez dit séparation des pouvoirs entre l’Exécutif et le Judiciaire ?

Oui ; si on s’en tient aux termes de la constitution qui devrait être le bréviaire de ceux qui ont la prétention de diriger ce pays. Hélas, force est de constater que nos gouvernants n’ont cure de la valeur de notre loi fondamentale qu’on eut dit rédigée pour sacrifier à la mode et engranger les capitaux généreusement distribués au titre des primes à la démocratie. En vérité, et au regard des mœurs politiques de nos dirigeants, le Bénin a cessé d’être une démocratie depuis bien longtemps déjà. Plus exactement depuis ce fameux mois d’Avril 2006 où, par un malencontreux accident de l’histoire, les Béninois ont donné carte blanche à celui qui deviendra le véritable pourfendeur des acquis de l’historique conférence nationale des forces vives de la nation.

Les détenus Soumanou Moudjaidou, Zoubedath Kora et consorts ont choisi de faire confiance à la justice en refusant d’implorer le pardon du président de la république pour des faits qu’ils ne reconnaissent pas. Ils seraient peut-être sortis de prison plus tôt. Donnant ainsi raison au comique français, le regretté Coluche qui disait avec beaucoup d’humour et un brin de cynisme : « Au tribunal des hommes, il vaut mieux choisir un avocat qui connait le juge au lieu d’un avocat qui connait le Droit ».

Pour une fois, il est venu pour les Béninois le temps de regarder la vérité en face et d’appréhender les réalités socio politiques et économiques de notre pays, ainsi que les sources des maux qui rongent la jeunesse. Un président de la république qui subordonne l’application d’une décision de justice à son ego et à son bon vouloir est incontestablement un homme fort ; mais il est aussi et surtout un dictateur.

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Le président Obama a été bien inspiré de le rappeler: « L’Afrique a besoin d’institutions fortes et non d’hommes forts ».

Au-delà des facéties de ce feuilleton politico judiciaire, le Bénin a tombé le masque. L’inventeur des conférences nationales en Afrique se présente aujourd’hui comme un pays qui affiche au fronton de sa vitrine une démocratie de pacotille et que ses dirigeants maintiennent à coups de ruses ubuesques sous le joug d’un régime féodal et autocratique, comme au bon vieux temps des rois nègres.  Avec en prime, le clin d’œil complice du président Yayi Boni qui apporte ainsi de l’eau au moulin de ceux qui n’ont pas tout à fait tort de pérorer avec ironie que les Africains ne sont pas prêts pour la démocratie.

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