Au cours de sa conférence de presse donnée en Août 2014 et diffusée en boucle pendant plusieurs semaines sur les chaînes de télévision, le Dg de la Sonapra Idrissou Bako informait l’opinion publique que cette société d’Etat avait procédé à plusieurs annulations de contrats de vente internationaux
L’information paraissait banale mais elle est lourde de conséquences pour le coton béninois puisqu’elle dévoile une autre facette des pertes de la campagne 2013-2014. Depuis le mardi dernier s’est ouverte à Dubaï, la réunion annuelle de l’International Cotton Association (Ica) dont les règles régissent près de 75% des transactions mondiales de coton. D’obédience anglaise et rassemblant tous les acteurs du marché : producteurs, négociants, banques, assureurs, filatures textiles. Elle sera suivie la semaine prochaine, de la rencontre plus restreinte de l’Association Française Cotonnière (Afcot) qui se tiendra à Cannes en France. Il nous est revenu qu’à la rencontre qui s’achève aux Emirats arabes unis, le nom de la Sonapra est revenu dans les discussions informelles, comme exemple de société ayant transgressé le principe cardinal commun aux deux associations internationales, celui de l’inviolabilité du contrat de vente de coton. On savait déjà que les dizaines de milliers de tonnes de coton graine et de balles de coton mouillées et avariées avaient considérablement réduit la capacité de la Sonapra à livrer à ses clients internationaux des produits de bonne qualité. En effet, le Dg/Sonapra Idrissou Bako soutenu par son Directeur commercial a laissé entendre que plusieurs contrats d’exportation avaient fait l’objet d’annulation. Or, en raison du principe de l’inviolabilité du contrat de vente de coton, les pratiques professionnelles recommanderaient en cas de défaut de livraison des produits, que la Sonapra opte pour la négociation d’un report de ses livraisons sur la campagne prochaine, plutôt que pour une annulation qui, selon les règles du marché, devrait être suivie de dédommagement de ses acheteurs. Selon un professionnel d’une société cotonnière privée du Bénin qui dénonce l’incurie des fonctionnaires béninois et du Gouvernement, la Sodeco et le Groupe Ica avaient en pareille situation, négocié le report sur trois ans de près de 80.000 tonnes de livraisons non-honorées et transférées depuis 2012 à l’Etat à travers la Sonapra. Ces sociétés privées auraient opté pour l’annulation pure et simple de leurs contrats si une telle pratique était professionnellement admise sur le marché international. En effet, les acteurs dudit marché ont été surpris que malgré les prix excellents obtenus par la Sonapra depuis 2013 au moment où les cours étaient à leur meilleur niveau, cette société ait décidé d’annuler des contrats de près de 14 milliards alors que depuis plusieurs mois, les cours sont en chute libre. Les contrats de vente annulés ayant sans doute été nantis pour sécuriser la capacité de l’Etat à rembourser les financements qui lui ont été accordés par le pool bancaire au titre de la campagne 2013-2014. On se demande comment le Gouvernement et les banques ont pu autoriser la Sonapra à procéder à de telles annulations interdites par les usages du commerce du coton, surtout à un moment où les prix des contrats annulés ne peuvent plus être obtenus sur le marché dans le cadre de ventes nouvelles. Au regard de l’expérience confirmée des cadres de la Sonapra en matière de commerce de coton, on soupçonne raisonnablement que ces annulations n’ont pas été commises par ignorance mais pour favoriser des acheteurs internationaux qui ont trouvé intérêt à se débarrasser de leurs engagements coûteux, dans un contexte de chute des cours mondiaux du coton. Pour quels intérêts le gouvernement et les banques ont-ils autorisé de telles annulations ? Par incompétence ou par gloutonnerie ?