Bénin : quand des média disparaissent…

(Plaidoyer pour la réhabilitation de Golf Tv et  Carrefour Tv …)…Depuis le mercredi 15 octobre à 19h,  Golf Tv et  Carrefour Tv n’émettent plus, conformément à la décision de suspension prise par  la nouvelle mandature de la Haac deux jours auparavant. 

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De prime abord, et disons-le d’emblée, cette décision semble avoir pris  tout le monde de court : les responsables desdites  chaînes bien sûr,qui n’avaient pas cru que cela pouvait leur arriver, ceux des associations professionnelles qui sont restés curieusement muets, du moins à ce jour, les admirateurs  ou simples téléspectateurs de ces chaînes aussi dont certains ont dû prononcer cette  sentence  issue des « joyeusetés » de nos ‘’béninoiseries‘’ : « c’est bien fait pour eux ! ». Ils ne se priveraient pas de citer avec force détails les turpitudes supposées dont les responsables de ces chaînes se seraient rendus coupables, rappelant à l’occasion les connivences supposées avec le pouvoir du changement. Comme on l’a fait par le passé après la  décision gravissime d’interdiction définitive et sans appel du « Béninois libéré » dont le promoteur a été affublé de tous les noms d’oiseau. Ils ont doublement tort  pour deux raisons et deux raisons seulement!

La première  qui n’est pas la moins importante estque la gestion d’un média n’est pas une sinécure. Le  grand public n’a aucune idée des difficultés énormes  auxquelles les promoteurs des médias sont confrontés .L’entreprise de presse n’est pas une entreprise comme les autres ! Elle a toutes les apparences d’une entreprise qui doit gagner de l’argent dans un domaine qui recouvre nos libertés individuelles et collectives. Il y a d’abord les lourdes  charges liées à la gestion d’un media audiovisuel en termes d’infrastructures, d’équipements matériels, de ressources humaines. Golf Tv  a fait d’énormes investissements ces dernières années visibles à l’œil nu .Elle  est  sans conteste, la première télé privée, largement devant la chaîne nationale de service public à inaugurer dans des chefs-lieux de département des antennes régionales dynamiques et qui fonctionnent  avec des informations de proximité sur les réalités locales. On peut ne pas être d’accord avec la ligne éditoriale de la  chaîne à un moment donné, mais on doit à la vérité de reconnaître que ses responsables ont fait une option salutaire qui a fait école.Le prix en terme de libberté d’action est élevé . Mais le débat n’est pas là. Depuis quelques temps, en effet, la chaîne de service public lui a emboîté le pas, avec cette différence fondamentale qu’avec Golf Tv, on avait en plus des feuilletons- longs métrages sur les visites du chef de l’Etat, des émissions-maison sur le vécu quotidien des Béninois du pays profond .Ensuite viennent toutes les autres charges liées à la gestion des ressources humaines et au fonctionnement normal d’un média .La recherche de l’information et son traitement dans un pays où l’accès aux sources d’information officielles n’est guère réglementé. De ce  point de vue, le promoteur d’un média n’est pas seulement un gestionnaire froid et cupide avide d’argent nécessaire au fonctionnement de son entreprise dans un paysage où la ressource première qu’est la publicité est la chose la moins partagée .C’est aussi un professionnel qui a conscience  que son media  ne peut pas être crédible  s’il tord délibérément le cou  à l’information ou choisit de ne livrer que des informations partielles, parcellaires parce que  partiales.

 Voilà pourquoi et c’est la seconde raison, la disparition de deux organes de presse du paysage médiatique à l’ère  de l’information no limit ne peut pas être une bonne nouvelle. Et personne n’a le droit dans le milieu des médias de se réjouir du malheur des autres .Parce que ça n’arrive pas qu’aux autres ! A qui le tour demain ? D’autant que les raisons évoquées pour justifier la suspension de ces chaînes sont purement administratives et peuvent être réglées sans tapage. La Haac  -si elle n’est pas mue par des motifs d’ordre politique, devrait prendre exemple sur d’autres services d’Etat qui privilégient par-dessus tout la négociation, quitte à infliger des pénalités, tant il est vrai  qu’il ne sert à rien de tuer la poule aux œufs d’or. Car, aujourd’hui plus qu’hier avec le développement quasi irrésistible des réseaux sociaux, plus personne  ni aucun Etat ne peut faire l’impasse durablement  sur une information , quelle qu’elle soit et où qu’elle se produise !Tout finit par se savoir et se faire savoir !Une information qu’un média n’a pu livrer n’a aucune chance de ne pas être relayée par un autre .Ainsi va le monde  aujourd’hui où les interdictions et autres  suspensions des médias pour quelque raison que ce soit apparaîtront de plus en plus comme  anachroniques et par-dessus tout superfétatoires. « Quand l’enfant paraît disait le poète, le cercle de la famille applaudit à grands cris ». Alors quand un média disparaît, les cris de protestations doivent fuser de toutes parts pour réclamer la fin d’une censure qui ne dit pas son nom.

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