AINSI FINISSENT LES DICTATEURS !

L’histoire a pris un vrai coup d’accélérateur au Burkina-Faso ces derniers jours.En moins de 48 heures en effet, les populations de Ouaga et d’autres villes de province ont réussi la prouesse inimaginable sous d’autres cieux africains de mettre un terme aux 27 ans d’un pouvoir qu’on croyait bien installé pour durer très longtemps. 

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Divine surprise pour les opposants les plus déterminés qui n’avaient jamais imaginé obtenir tant de choses en si peu de temps ! Moins de temps qu’il en  a fallu aux Tunisiens et aux Egyptiens pour en finir avec les régimes autocratiques de Ben Ali et de Hosni Moubarack respectivement. En Tunisie en effet, c’est dix jours après la mort le 04 janvier 2011  de Mohammed Bouazzizi, le désormais célèbre vendeur ambulant qui s’est immolé par le feu et des émeutes d’une rare violence  que Ben Ali a fui  son pays pour l’Arabie Saoudite. On était alors au  14 janvier 2011.  En Egypte, c’est trois longues semaines après le début de l’occupation de la place Tahir le 25 janvier 2011  et les émeutes sanglantes qui s’en sont suivis que le président Hosni Moubarack a démissionné. C’était le 11 févier 2011.

Burkina Faso : Compaoré en exil en Côte d’Ivoire

Compaoré avait-il à l’espritces deux précédents du Printemps arabe ? Certainement oui et les images honteuses de la chute de Laurent Gbagbo aussi ! Il n’empêche ! Au soir du mercredi 29 octobre, à l’heure où nous bouclions l’édition du lendemain jeudi, personne ne se doutait de ce qui allait se passer ce jour-là au « pays des hommes intègres ». Compaoré semblait avoir la situation solidement en main. Avec le ralliement in extremis des députés de l’Adf, le Cdp du président Compaoré disposait d’une majorité confortable au parlement convoqué pour passer au vote de la fameuse loi le jeudi à 10 heures.Ultime provocation pour les émeutiers de ces derniers jours : les députés de la nouvelle majorité ont même été logés dans un hôtel tout proche du siège de l’Assemblée Nationale pour éviter les pressions de  toutes sortes. Tout semblait prêt pour un vote massif en faveur de la loi scélérate. C’est alors que les évènements se sont précipités à la vitesse Grand V, en cascades pour ainsi dire : l’incendie du parlement, la ruée des émeutiers déchaînés vers Kosyam, le palais de Compaoré, des négociations qui s’ouvrent dans la foulée au palais du Mogho Naba presque simultanément. Puis ce fut l’annonce du retrait de la loi. Trop peu et trop tard avaient estimé les émeutiers ! Le mouvement se durcit et ils réclament alors ni plus ni moins le départ de Compaoré. Qu’ils obtiennent presque sur un plateau d’or le lendemain vendrediaprès une tentative de résistance émoussée par la détermination des marcheurs. Dans la soirée même de ce vendredion apprend que le couple déchu s’est réfugié en Côte d’Ivoire. Rideau !

Triste fin pour un régime trentenaire jalonnépar une multitude de crimes restés impunis. Tout a commencé par l’assassinat de Thomas Sankara, la figure emblématique de la révolution d’octobre 1983 suivi de la condamnation à mort pour complot imaginaire des compagnons de la première heure de la révolution que sont le capitaine Zongo et le commandant Lingani. Puis dans le désordre, le journaliste Norbert Zongo, l’ex numéro deux du parti Salif Diallo canardé en plein jour et en pleine rue  et plus récemment un des membres du conseil constitutionnel tué en pleine nuit  au début de la crise. Des crimes restés jusqu’à ce jour impunis. Cependant, Compaoré a acquis une solide réputation de médiateur dans presque tous les conflits de la sous-région ouest-africaine, conflits dont  on dit qu’il en est le principal instigateur. (Voir l’interview du journaliste et enseignant à Sciences po, Francis Kpatindé sur Rfi en page 02). De sorte que l’image de l’assassin présumé de Sankara a été gommée au fil des ans pour faire place dans l’opinion à celle d’un bâtisseur  ayant réussi à changer quelque peu le visage de la capitale et du pays. Les tomates fraîches  et les pommes de terre   made in Burkina n’inondent-elles pas les marchés de la sous région ? Compaoré peut s’enorgueillir de quelques progrès en matière de développement mais d’une solide réputation de parrain de tous les  régimes nouvellement installés dont il ne répugne pas à financer les opposants.

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C’est ce  régime  qui semblait taillé dans duroc  avec un parti majoritaire et une garde prétorienne redoutable qui est tombé vendredi dernier en moins de 48 h comme un fruit mûr. Le printemps arabe est passé par là. Ce qui laisse augurer des lendemains sombres pour les apprentis dictateurs aux petits pieds qui écument le continent.

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