Depuis le 30 octobre dernier, les commentairessur les évènements qui ont conduit à la chute de Blaise Compaoré au Burkina Faso se suivent et ne se ressemblent pas. Si au lendemain des évènements, tout le monde ou presque était d’accord pour les interpréter comme un signal fort pour tous les dictateurs qui s’accrochent au pouvoir plus longtemps que de raison, aujourd’hui, ici et là, les propos sont plus mesurés , voire franchement négationnistes sur l’ampleur de la victoire du peuple burkinabè .
La tendance nouvelle incline à en minimiser la portée. Selon qu’on est ressortissant ou non des pays à risque, Burundi, les deux Congo etc … les avis sont partagés. Et la phrase qui revient dans tous les débats sur le sujet est que le Burkina reste le Burkina et ce qui s’y est passé ne peut pas nécessairement se répéter ailleurs. Chaque peuple dit-on en chœur a son histoire. Une rengaine qu’on entend ces derniers jours ici aussi de la bouche de ceux qui rêvent encore d’un hypothétique troisième mandat pour l’homme du mystérieux K.O d’avril 2011.C’est dire que, passés les premiers jours de panique, les états majors politiques de certains pays se sont ressaisis pour analyser à froid ce qui s’est passé au Burkina ces dernières semaines pour en détecter les failles et manœuvrer en douceur pour éviter les erreurs qui ont été fatales à Blaise.
Ainsi, de Bujumbura à Kinshasha , en passant par Brazzaville, les évènements du Burkina sont soigneusement éludées dans les débats officiels. Et, quand des responsables au plus haut niveau sont contraints d’en parler, c’est pour dire comme l’inénarrable Lambert Mendé ministre de la communication du Congo démocratique et porte parole officiel du très peu loquace Joseph Kabila que son président n’a jamais dit qu’il envisageait de réviser la constitution pour solliciter un éventuel troisième mandat .Cependant , lorsque l’animateur de la très célèbre émission de Rfi « le débat africain » l’accule pour lui demander ce qu’il pense de la chute de Compaoré, il trouve son salut dans l’esquive , en rappelant que les Congolais étaient déjà allés plus loin que les Burkinabè en chassant Mobutu du pouvoir. Quid de la question précise sur la révision de la loi fondamentale à moins de deux ans de l’échéance de 2016 ? Silence radio !L’émission d’hier dimanche s’est achevée en queue de poisson, sans qu’on ait une idée claire des intentions réelles du président congolais. Situation presque identique dans l’autre Congo dont le président, selon la dernière livraison de la Lettre du Continent multiplie les gestes conciliants en direction de ce qu’on appelle là-bas : opposition modérée . Selon le périodique ,c’est quelque 6milliards qui auraient été octroyés au fils du défunt opposant Kolélas pour mobiliser ses frères du Pool hostiles au nordique Sassou .Visiblement, la leçon de l’échec du passage en force à la Blaise Compaoré est soigneusement prise en compte pour privilégier les solutions alternatives éculées de la mise au pas des opposants .
Cependant, tout cela n’est que leurre, car la vraie leçondu Burkina n’est pas seulement liée aux erreurs supposées du Beau Blaise. Certes , si ce dernier avait retiré son projet de révision constitutionnelle deux jours plus tôt, comme l’exigeaient les dirigeants de l’opposition, les manifestations ayant débouché sur l’incendie du parlement n’auraient probablement pas eu lieu. Mais qui dit que Blaise Compaoré aurait renoncé définitivement à son projet ? Lui qui aurait rejeté tour à tour la proposition de Hollande de quitter le pouvoir pour prendre le poste de secrétaire général de l’’Oif et les conseils avisés de quelques leaders africains, toujours à en croire la même livraison de la Lettre du continent .C’est dire que l’essence des pouvoirs dictatoriaux est l’illusion de l’éternité. Tous les dictateurs ne rêvent que d’une chose : mourir au pouvoir. Leur entêtement les rend aveugles et sourds aux conseils. Alors, ils foncent et vont droit dans le mur. Mais l’histoire nous apprend que les dictateurs ont beau user de subterfuge pour pérenniser leur pouvoir , ils n’échappent pas à leur destin. Même quand ils échappent à une fin brutale et violente , comme les Eyadéma ou Mobutu, l’histoire ne fera pas d’eux des héros . La vraie leçon du Burkina se résume en une seule phrase : savoir quitter le pouvoir à temps pour ne pas être contraint à mourir en « chien errant », sans domicile fixe, condamné à changer de terre d’asile, pour échapper à la justice des hommes.
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