Tout ça pour ça : le cri de détresse des Associations féminines du Bénin

En effet au lendemain de l’installation des conseils communaux et de l’élection des maires, la réalité est là, cruelle et désespérante. Eh oui ! Tout ça pour ça ! Tant d’années de combat pour rêver d’un meilleur partage du pouvoir, un meilleur positionnement des femmes sur les listes électorales et, au finish, les résultats sont là, têtus. La déception est totale.

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Pire que lors des mandatures passées. Qu’avons-nous fait pour mériter ça, nous les femmes béninoises ?

Etudier la sociologie du Bénin

Il s’agit effectivement de lire la sociologie du pays, de l’étudier à travers les comportements de nos hommes qui ne veulent rien partager avec les femmes, surtout pas le pouvoir. Les hommes béninois sont avides du pouvoir. Regardez-les se battre, se déchirer autour de la table, lors des installations des conseils communaux. Regardez un peu les manifestations de foules qui viennent s’opposer aux listes retenues par la CENA. Il n’y a qu’eux les hommes qui allument ces feux, qui y mettent du gazoil, espérant que ce sont leurs muscles et leurs cris qui feront pencher la Cour Suprême en leur faveur. Alors que la loi demande de s’en référer à cette instance suprême et attendre. Est-ce à dire qu’on ne croit guère à nos institutions ? Et que c’est la rue et la rue seule qui doit être juge et partie des résultats de nos élections. C’est dommage, mais ainsi va la vision des hommes de chez nous.

Les femmes totalement absentes

Lorsqu’on parcourt la liste de la cinquantaine de maires déjà élus et installés, on y retrouve péniblement le nom de Mariétou TAMBA, maire de Pèrèrè, dont l’élection est encore contestée. C’est dire qu’on risque d’avoir 77 hommes aux commandes de nos mairies. Il ne faut plus se faire d’illusions. Il n’y a qu’à voir les Conseils qu’on installe ici et là. Regardez autour des tables. Difficilement, on arrive à y trouver de femmes qui sont souvent reléguées au second plan. C’est le cas en particulier de la capitale Porto-novo où, semble-t-il une grande partie de la population espérait enfin voir une femme accéder à la tête de la municipalité. Mais la discipline du parti est passée par là.

A Cotonou, la sitauation est pire. Aucune femme dans l’équipe municipale et aucun arrondissement n’a été confiée à une femme. On est loin de l’expérience de la révolution où plusieurs quartiers de la métropole béninoise était dirigée par des femmes jusqu’à l’avènement du renouveau démocratique. C’est comme si dans ce pays, la gente féminine avait soudain connu une épidémie. Ebola serait entré dans le pays pour nous faire disparaître toutes.

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Mais où sont passées toutes celles qui militent dans les partis ? Où sont passées ces braves dames qui se battent au niveau des quartiers de villes et des villages ? Mais où sont-elles ? ne cesse-t- on de répéter ici et là ? Eh bien ! Elles ont été tout simplement zappées par les chefs de partis, « parce que n’ayant aucune chance de remporter la victoire dans ma zone », m’a dit l’un d’eux.  Et pourquoi lui avoir fait croire qu’on pouvait compter sur elles, qu’on pouvait compter avec elles pour voir le Parti s’imposer dans sa zone ? ai-je pensé, découragée par tant de calculs.

Une dame à qui l’on a fait croire qu’elle occupait le deuxième rang jusqu’au dépôt des listes a constaté ahurie, qu’elle a été reléguée au cinquième rang, juste entre la maison du Chef et la CENA. Tant d’années de combat au sein d’un parti à qui on a donné son temps, son énergie et ses maigres ressources, pour connaître ce sort ! Elle n’a eu que ses larmes pour pleurer. Imaginer tout ce qu’elle aurait réussi à faire de sa vie de femme, d’épouse et de mère ; en un mot de citoyenne de ce pays qui se bat sur d’autres fronts que la politique… « Les hommes sont méchants ! Les hommes sont cruels ! », m’a-t-elle dit, essuyant ses larmes.  J’ai été étonnée de constater que ce n’est que maintenant qu’elle s’en rende compte. Moi, je l’ai toujours su, plus encore l’homme politique qui est prêt à tout renier, pourvu qu’il s’en sorte lui, d’abord.

Que les femmes s’occupent des petits enfants

J’ai écouté avec attention l’émission de Mme Guèdègbé de l’ONG Rifonga sur la radio Soleil F.M. Elle avait fait l’état des lieux de la participation des femmes dans les instances de prises de décision, notamment leur positionnement sur les listes électorales.  On relève que les hommes n’entendent guère libérer les places pour permettre à leurs femmes de se mettre sur les listes électorales dans la commune où elles sont bien populaires et appréciées autant que leur époux.

« Mais qui va m’aider pendant la campagne ? demandent ces maris aux responsables féminines des ONG. Et si elle devient candidate, moi, je deviens quoi ? Il vaut mieux qu’elle reste à la maison s’occuper des petits enfants, et quand ils grandiront ; elle pourra toujours se présenter, parce que, moi, j’aurai trouvé une autre destination ». Tout est dit. Et, si l’on ne fait rien pour changer la donne, les femmes, d’ici à la fin de ce siècle seront totalement absentes de la sphère politique et décisionnelle au Bénin. Si telle est la volonté du prochain président qui s’installera en 2016, alors, laissons lui ceci sur la conscience.

Les partenaires financiers ne veulent plus gaspiller les sous de leurs compatriotes pour du folklore

Ne perdez plus votre énergie inutilement, mes chères sœurs des associations féminines ! « Zinzin, Rifonfa, Wildaf Bénin, Dignité féminine etc…Sans oublier l’Institut national pour la promotion de la femme qui a bien joué sa partition. Pensez à vous investir sur d’autres chantiers où au bout du rouleau, la société pourra bénéficier de vos combats en faveur des femmes. Sinon comment comprendre qu’après tant de débauche d’énergie et d’accompagnements financiers des partenaires, on ait de si maigres résultats ? Parce que nous vivons dans une société phallocrate où les mâles sont tout puissants et ne veulent rien concéder au genre féminin. Les partenaires financiers qui accompagnent les diverses ONG l’ont compris depuis fort longtemps, et, si nous ne savons pas faire, ils vont abandonner le pays à son sort. Un pays qui décide de laisser sur le quai de la gare plus de la moitié de sa population n’inspire guère le respect. Surtout quand c’est le premier des Béninois lui-même, en l’occurrence le président Boni Yayi qui avait promis régler ce problème de parité avant la fin de son mandat. Où en sommes-nous aujourd’hui ? A l’heure du bilan, nous femmes de ce pays n’avons que nos yeux pour pleurer.

Personnellement, je demande aux partenaires de réorienter cette activité des ONG dans la lutte contre la pauvreté. Car la pauvreté est féminine au Bénin. Chaque jour que Dieu fait, une femme vient sonner à ma porte pour me raconter ses misères. Comme si exprès, on me les envoyait afin que je répercute leur cri de douleur. Savez-vous chers gouvernants que des hommes déposent 600frs CFA à leur conjointe, pour assurer les besoins quotidiens de la famille qui comporte en son sein quatre enfants à bas âge ? Six cent francs ! Le prix d’une Béninoise, je parle bien sûr de la bière locale. Ca fait pleurer, et pourtant, c’est ça la réalité chez nous. Chaque dimanche, une veuve vient me raconter ses misères. Malade, elle a avoué ce midi à mon époux :

« C’est la faim qui m’a fait sortir de chez moi ; je suis très malade depuis quelque temps … ». Des exemples du genre, il y en a tellement qu’on écrirait un roman de milliers de pages. Pendant ce temps, les milliards de la République sont distraits dans la foutaise… Pire un collègue m’a accusé d’être utilisée… Par qui ? lui ai-je demandé ? Je n’ai pas besoin d’être utilisée par qui que ce soit pour dire les vérités que tout le peuple voit, lui ai-je répondu. Quelque soit le régime en place, moi, je dénoncerai ce qui ne va pas dans notre pays. Ce n’est pas moi qui ai choisi mon rôle, c’est Dieu. Et je sais que je vis sous sa protection, n’en déplaise à ceux-là qui me menacent de façon anonyme. Si un régime ne comprend pas, comme l’a souligné le président éthiopien, face aux critiques du président Obama concernant l’état de la démocratie de son pays, que « la critique est importante car, elle permet de relever nos erreurs et de reconnaître nos limites », alors, il ne fera qu’accumuler les scandales. Moi, je ne suis opposée à personne. Je veux le meilleur pour mon pays et sortir mes sœurs de la misère. Dans ce pays, les femmes souffrent trop. Elles n’ont droit à rien. Je suis fatiguée de recevoir tant de détresse chez moi. Je souffre moi aussi pour elles. Et Dieu sait que je ne vis pas dans l’abondance. C’est de mes entrailles que proviennent mes écrits. Personne ne me paie pour le faire. Je ne suis que la voix des sans voix…  

Que les ONS féminines luttent contre la pauvreté

Nos ONG féminines devraient s’occuper de cette gangrène qu’est la pauvreté des femmes, au lieu de gaspiller leur temps, leur énergie et l’argent des partenaires à rechercher le sexe du moustique dans ce pays, où on refuse de reconnaître sa vraie place à la femme. Et pourtant, tous ces hommes reconnaissent nos qualités de bonnes gestionnaires, de femmes aux mille bras. Ils savent que les femmes de ce pays ont mouillé le maillot pour les accompagner durant les différents processus d’élections jusqu’à leur terme. J’ai beau battre campagne pour mes sœurs, si elles sont mal positionnées, on ne peut espérer des miracles. Je me souviens encore que c’est après quatre allers retours sous le chaud soleil de ce dimanche, que j’ai pu voter pendant les élections législatives. Et c’est sous la pluie, malgré mes problèmes de sinus que j’ai été voter pour les communales. Désormais, comme l’ont déclaré la plupart  de mes consœurs, « je ne me fatiguerai plus pour ces égoïstes qui ne pensent qu’à eux ». La confiance est entamée, largement entamée et chez beaucoup de femmes, l’enthousiasme pour les élections relève du passé. On ne bougera plus le petit doigt si les candidats aux élections présidentielles ne nous apportent pas des garanties fermes. Mais hélas, nous avons bien compris que les promesses électorales n’engagent que ceux qui y croient. Nous avons maintenant les yeux grands ouverts. Plus jamais, on ne se laissera prendre aux mots, aux belles phrases, aux compliments, etc… Le dire, est-ce que c’est ne pas aimer son pays ? Le dire, est-ce que c’est montrer de la haine envers le président Boni YAYI ? Le président nous avait beaucoup promis, à nous femmes de ce pays. Qu’il fasse le bilan de ce qu’il nous a effectivement offert en près de dix ans, et il comprendra notre douleur, notre amertume et notre révolte. Je ne sais pas ce qu’il pourra faire pour réparer quelque peu tant d’injustice. Faut pas rêver ! Ce qu’il n’a pas réalisé en plus de neuf ans ! Mais que ceux-là qui ont à cœur de nous donner un peu de justice et qui aspirent à diriger ce pays sachent que seules des lois discriminatives en faveur des femmes peuvent nous sortir la tête de l’eau. Qu’ils nous laissent couler et tout le pays sombrera. Un pays qui ne s’occupe pas du bonheur et de l’épanouissement de ses femmes s’attire le courroux des dieux. Au niveau micro comme macroscopique, la femme détient des pouvoirs naturels qui font d’elle la gardienne du foyer et celle de son pays.

Si le Rwanda caracole économiquement, c’est parce que beaucoup de femmes participent aux prises de décisions. Doit-on attendre que nos hommes meurent en grand nombre à la guerre avant de recevoir ce qui nous revient de droit ? Wade l’a réalisé pour les sénégalaises. Nous aussi attendons notre sauveur au Bénin. L’iniquité n’a jamais apporté le bonheur pour un pays, pour son peuple.

Donner un visage plus humain à la politique au Bénin

Ayons la crainte de Dieu. L’apôtre Paul écrivait dans Romains 8.20 : « La création a été assujettie à la vanité ». Elle souffre et soupire en attendant la délivrance. Jésus Christ la délivrera quand il prendra en main le gouvernement du monde. Aujourd’hui, il veut nous délivrer de cet esprit de vanité qui existe en nous. La satisfaction de nos convoitises ne procure pas un bonheur durable et n’apporte pas la paix dans nos cœurs. Seul Jésus est la vraie réponse à tous nos besoins. Car, comme l’a dit l’Ecclésiaste : « Vanité des vanités, tout est vanité… et poursuite du vent ».

Le ministre Jean Michel Abimbola,  lors d’une activité culturelle à la piscine municipale de Porto-novo, au matin du jour où il avait réussi à décrocher le poste de Président de la Commission du Plan avait confié à l’assistance ses sentiments les plus sincères, après tous ces combats de gladiateurs au parlement : « Il est important que nous donnions un visage plus humain à la politique chez nous, en y associant le maximum de femmes ». Tout est dit. Ainsi, ceux-là qui s’accaparent de tout, luttent acharnement pour le pouvoir, et tout le pouvoir pour eux seuls, n’ont qu’à bien lire et relire ces pensées bibliques afin de comprendre, qu’aucune solution humaine n’est définitive. Le pouvoir, comme le bonheur est d’essence divine. Seul Jésus est la vraie réponse à tous nos besoins. Toute forme de raccourci ne peut qu’être passagère

Adélaïde FASSINOU ALLAGBADA
Ecrivain

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