Le changement. Mais quel changement ?

C’est vrai : rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme. Lavoisier a raison. Nous évoluons sous la loi du changement. Une loi qui ne change pas, alors que tout bouge, alors que tout change dans l’univers. C’est donc vain de vouloir que les jeunes d’aujourd’hui soient strictement à l’image de leurs parents et grands-parents. C’est se bercer d’illusion que de chercher à lire, dans les livres d’aujourd’hui, les vérités d’hier.

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Tout bouge, certes. Mais le changement est une réalité à deux pôles. Il y a un choix à faire entre un changement qui construit et un changement qui détruit. A regarder de plus près l’évolution des sociétés africaines contemporaines, il y a lieu de s’interroger sur la qualité des choix qu’elles opèrent, sur la validité des changements qu’elles engagent ou qu’elles subissent. Quelques exemples pour illustrer notre propos.

La virginité de la jeune fille avant mariage. C’était une vertu qui se cultivait comme le champ d’honneur des familles. Pour qu’il ne soit pas dit que la jeune pubère, promise au mariage, appelée à être la mère éducatrice, est déjà une autoroute à péage.  Et tout concourait alors à la protéger contre les dangers qui hantent les chemins de la vie.

Quid, aujourd’hui, de la virginité, dans la société béninoise ? C’est au mieux, et dans la plupart des cas, du papier brouillon. A déchirer et à jeter à la poubelle. Sous le prétexte qu’un stylo fait vieux jeu et qu’avec un ordinateur, c’est mieux. On va plus vite. On va plus loin. On peut même surfer sur les sites cochons de la pornographie. On peut même aller s’encanailler avec la pègre de la cybercriminalité. Les réseaux sociaux font le reste. Les parents sont hors jeu. Les maîtres et les directeurs de conscience sont tenus à distance. Les médias sont archi battus en termes de réactivité et d’instantanéité.   

Les activités culturelles et ludiques. Il n’y a guère longtemps, nos villes notamment, entretenaient jalousement leurs centres culturels et de loisirs. C’étaient des espaces de création et d’échanges, animés du génie créateur des uns, illuminés du sens de l’organisation des autres. L’esprit s’éveillait et une communauté libérait ses ressources imaginatives pour vivre sa vie et donner des couleurs à la vie.

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Aujourd’hui, tout change. Le nouvel évangile, c’est « ago ». Il ne s’agit plus de nourrir l’esprit, mais plutôt de charger son corps et d’embrumer son cerveau de mille et une choses qui sont à l’origine des nouvelles maladies qui rongent l’Afrique. C’est ainsi que « ago », la fête à tout crin et sous n’importe quel prétexte, fait le lit de l’hypertension artérielle, des maladies cardiovasculaires, des diabètes, des cancers, des surcharges pondérales…Pour « ago », on barre les voies dans les grandes agglomérations de Porto-Novo ou de Cotonou. Pour « ago, on livre des quartiers entiers, des jours durant, à une insoutenable pollution sonore.

La honte comme suprême châtiment. Le vol, par exemple, couvrait de déshonneur son auteur. Le voleur, soupçonné tel ou pris la main dans le sac, était voué à la honte. Il en était marqué à vie. Sans que fussent laissés indemnes ses parents et ses amis.

Que faisons-nous, aujourd’hui, de celui qui détourne les deniers publics ? Il est adulé. Il est porté en triomphe. Le malfrat peut donc exalter ses hauts faits et narguer tout le monde. La honte fait place à l’audace, sinon à la fierté d’étaler, au vu et au su de tous et sous le soleil de Dieu, les fruits de ses rapines.

Le sens du sacré. Il s’agit de la crainte de Dieu. A avoir en tout temps, en tous lieux. Le « Gbè do su » des Fon nous renvoie à ce principe fondamental qui met en exergue les lois de la nature. A savoir les lois par lesquelles Dieu, cet être invisible, se rend visible aux hommes.

Des chiffres, ici, chez nous, montrent la montée effrayante de la criminalité, de la corruption, de la dégradation des mœurs. On peut en conclure que le « Gbè do su » se meurt, que le « Gbè do su » est mort. Que faire ? Celui qui roule sur l’axe Cotonou-Porto-Novo ne peut éviter les dos d’âne ou les dos de dromadaire de Djrègbé. Mais il peut aborder ces obstacles sans mettre à rude épreuve son véhicule, sans nuire à son environnement humain. Car, le bon conducteur n’est pas l’otage de la route et des aléas de la route. Le bon conducteur peut avancer, tout en négociant au mieux les obstacles. Et sans cesser de regarder dans son rétroviseur. A méditer

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