Rapportage des arrêtés au MEMP: Les propositions d’Anselme Amoussou

Dans le but d’insufler au secteur de l’enseignement maternel et primaire une nouvelle dynamique de travail, le Secrétaire général de la Confédération des syndicats autonomes du Bénin (Csa-Bénin), Anselme Amoussou, a fait des propositions qu’il juge pertinentes et interessantes. Lire ci-dessous l’intégralité de sa déclaration.

Pendant trois semaines, le sous-secteur de l’enseignement maternel et primaire a été paralysé par un mouvement de débrayage, déclenché par les organisations syndicales membres du Conseil sectoriel pour le Dialogue Social  dudit ministère. En cause principalement, les mesures imaginées par le Ministre SALIMANE KARIMOU pour relever le défi des performances du système éducatif de notre pays. Se basant sur les résultats d’une évaluation du PASEC, qui avait lié le manque de performances à une insuffisance du personnel d’encadrement des enseignants, l’autorité avait décidé du recours ponctuel au personnel retraité du corps d’encadrement, afin de pallier au manque effectif d’Inspecteurs et de conseillers Pédagogiques de l’enseignement maternel et primaire. La réaction de rejet de cette solution conjoncturelle a obligé le Cabinet du Ministre, après moult péripéties, à rapporter les arrêtés relatifs à la réforme contestée.

Cela fait donc trois semaines aujourd’hui que cette crise a cessé et que les écoliers ont repris le chemin des classes. La lenteur dans la mise en œuvre des points d’accord conclus avec les partenaires sociaux, indique-t-elle une absence de solutions alternatives de la part de l’autorité ministérielle et de ses collaborateurs ? si tel est le cas, pourquoi se refuser à examiner les propositions formulées par les partenaires sociaux ? Des propositions qui me paraissent intéressantes car venant d’acteurs du système éducatif vivant les réalités au quotidien.

Mais avant d’examiner ces propositions, passons en revue les griefs qui sont faits à la réforme telle qu’imaginée par l’autorité ministérielle. Je veux m’en tenir à deux aspects de la réforme qui montrent correctement les failles du dispositif.

*Des régions pédagogiques trop vastes et impossibles à gérer*

Jusqu’à un passé récent, en dehors de quelques exceptions dans des villes comme Cotonou, Porto-Novo et Parakou, la circonscription scolaire était aux dimensions de la commune. Avec à sa tête, un Chef de Circonscription (C/CS) qui est un Inspecteur. Salimane KARIMOU propose de regrouper au minimum quatre communes et d’en faire une région pédagogique sous l’autorité d’un seul Inspecteur nommé Chef de Région Pédagogique (C/RP). Dans un contexte de pénurie de Conseillers Pédagogiques, comment peut-on rechercher de l’efficacité chez une autorité hiérarchique, qui se trouve à plusieurs kilomètres des administrés. Exemples …. On me rétorquera que la même autorité a nommé des Encadreurs pédagogiques (Inspecteurs et CP retraités).  Mais leur autorité est fortement contestée justement du fait de leur statut de retraités.

*Des encadreurs pédagogiques indépendants du détendeur local officiel de l’autorité du Ministre.*

Dans  le cahier des charges de l’encadreur pédagogique, il n’est établi nulle part un lien hiérarchique direct avec le Chef de la Région Pédagogique, qui est un Inspecteur encore en activité. L’encadreur pédagogique rend compte directement à l’inspection pédagogique logée à Porto-Novo. Où se situe donc la part de l’autorité de l’Etat dans cette opération de rescousse ? Comment peut-on éviter les abus éventuels des personnes animées de mauvaise foi ? Pire, quelle est la protection dont jouit l’encadreur dans l’exercice de cette fonction ponctuelle, s’il peut directement quitter sa maison et y retourner après la visite des classes, sans aucune connexion avec le C/RP qui au niveau local détient le pouvoir administratif de sanction.

*Que faire maintenant ?*

En attendant d’appliquer les mesures structurelles définitives qui passent par le recrutement en nombre suffisant du personnel d’encadrement, il faut appliquer les formules qui ont plus ou moins bien fonctionné jusque-là :

maintenir la formule de la Circonscription scolaire à l’échelle de la Commune et nommer les Chefs de Circonscription Scolaire parmi les inspecteurs en fonction. Combler le gap en maintenant en poste les Inspecteurs qui doivent faire valoir leurs droits à la retraite cette année. La différence ici est que ces retraités sont investis de la puissance publique et ne sont plus considérés comme des mercenaires du système.

A défaut de maintenir des retraités, on peut recourir aux Conseillers Pédagogiques en fonction, comme intérimaires à la tête des circonscriptions scolaires non pourvues en inspecteurs.

Responsabiliser formellement les C/CS pour organiser l’encadrement pédagogique dans leur circonscription en faisant recours aux enseignants les plus expérimentés, notamment les Responsables d’Unités Pédagogiques et leurs adjoints.

Organiser des conférences pédagogiques périodiques (mensuelles ou trimestrielles) inter circonscriptions où on peut faire intervenir le personnel d’encadrement retraité.

Restaurer le pouvoir de l’autorité hiérarchique direct en dépolitisant le système et en disciplinant (par exemple en organisant les élections sociales sectorielles), l’action syndicale dans le sous-secteur. Cette solution aura le mérite de relancer l’efficacité des séances d’Unités Pédagogiques, qui sont des cadres par excellence de la formation continue de l’enseignant.

Ces propositions font partie de la panoplie de suggestions faites par les partenaires sociaux, qui attendent que le Ministre renoue avec le dialogue nécessaire pour sortir de l’impasse actuelle.

Pour ma part, je reste persuadé que le traitement du mal doit tenir grand compte de l’érosion du pouvoir hiérarchique dans la chaîne de l’administration scolaire. Cette perte d’autorité de l’autorité, est due également à la syndicalisation « sauvage » du sous-secteur déjà victime d’une politisation outrancière. Le clientélisme syndical et politique, est à lui seul responsable d’une bonne partie des problèmes de performances de l’école publique béninoise. La réforme annoncée du Conseil National de l’Education, me paraît une solution bancale à un mal profond.

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