Le professeur Oladé Okounlola Moïse LALEYE partage ses réflexions et recherches menées sur plusieurs années sur la Cour constitutionnelle au Bénin. C’est à travers un livre qu’il a intitulé «La Cour constitutionnelle et le peuple au Bénin», sous-titré «D’un juge constitutionnel institué à un procureur suzerain».
L’ouvrage paru en juillet 2018 aux éditions L’Harmattan à Paris, a été officiellement présenté et lancé hier, jeudi 28 février 2019 à la Chambre du commerce et d’industrie du Bénin (CCIB) à Cotonou. Une date choisie à dessein. «C’est le 29ème anniversaire de la fin de l’historique conférence nationale des forces vives de la Nation -19 au 28 février 1990- », rappelle le présentateur du livre, le journaliste et analyste politique Vincent Foly.
«Il a choisi cette date pour nous –les Béninois, ndlr- ramener à la conférence nationale, à ce que nous sommes. A cette conférence, nous avons convenu que nous voulons construire un Etat de droit.» ajoute le directeur de publication du journal La Nouvelle Tribune dans sa présentation, s’interrogeant sur l’état du respect de cet accord de la conférence nationale notamment en ce qui concerne la Cour constitutionnelle qui constitue le cœur de cet ouvrage. «C’est un ouvrage encyclopédique de 683 pages sur la Cour constitutionnelle», avoue le présentateur.
La Cour constitutionnelle, un héritage
Le professeur a livré son travail entamé depuis 2012 en deux grandes parties. La première est subdivisée en quatre chapitres parlant de la société des libertés comme un choix politique légendaire du peuple béninois ; l’exercice du pouvoir politique par le peuple du Bénin ; l’institution d’une haute juridiction constitutionnelle indépendante ; et du juge infra constitutionnel.
Précédée d’un chapitre préliminaire intitulé «les enjeux politico historiques de la création de la juridiction constitutionnelle et ses traits essentiels», cette première partie est faite d’analyse chronologique de l’expérience et des enjeux qui ont amené le peuple béninois à l’adoption de la Constitution.
«Une quête de la liberté» indique Vincent Foly. «Depuis ses origines, ce peuple a été toujours préoccupé par sa liberté. Un peuple qui a toujours cherché sa liberté, construire la justice, le droit» confirme l’auteur du livre. C’est dire que la Cour constitutionnelle n’est pas seulement l’œuvre de 1990.
Dans cette partie, il est aussi question de la mission de cette juridiction constitutionnelle qui est, soutient-t-il, « un instrument de cette volonté du peuple pour garantir la liberté et le droit ». « Si cette Cour se met au-dessus du peuple du fait des hommes, elle a trahi le peuple. C’est ça la première partie» souligne-t-il.
Triste réalité de l’office du juge constitutionnel au Bénin
La deuxième partie du livre rend compte du constat que le professeur Oladé Okounlola Moïse Lalèyè a fait sur plusieurs années de fonctionnement de cette juridiction, 29 ans. Elle révèle un «juge constitutionnel en proie aux ambitions humaines et politiciennes» et «une méthodique déconstruction de l’office juridictionnel du juge constitutionnel». «Le constat est que nous avons institué un juge qui est devenu un procureur suzerain, distributeur de rôle, qui accuse, qui poursuit à la limite» rapporte l’auteur.
C’est ce qu’il a démontré dans son livre avec beaucoup d’exemple de décisions qu’il qualifie de « décisions d’opportunité » montrant chaque fois, comment la manipulation a été faite. « Il –le livre, ndlr- recense et décrypte en effet des décisions d’opportunité ou entachées d’erreurs grossières et manifestes et bien d’autres qui ne peuvent bénéficier de la moindre justification technique parce qu’elles sont tout simplement politiques » écrit le préfacier de l’ouvrage, le magistrat émérite Pierre Ehoumi, membre de la première mandature de cette institution.
L’actualité rend témoignage
L’actualité dans le pays depuis, constitue un exemple palpable de ce constat. «Ce qu’il a écrit peut se comprendre aisément à la lumière de l’actualité politique dans la pays. Le juge constitutionnel installé il y a environ huit mois, est totalement différent des autres. » affirme le présentateur. Mais, à la lecture du présent livre, il informe que ce procureur suzerain n’est pas né aujourd’hui.
Excepté la première mandature, la Cour constitutionnelle s’est singularisée par ces «décisions d’opportunité ». «Au cours des diverses mandatures, la légèreté prend la place du sérieux et la complaisance (peut-être même la complicité) celle de la résistance» témoigne le préfacier.
La Constitution est sacrée
A travers «La Cour constitutionnelle et le peuple au Bénin», le professeur Lalèyè, dénonce donc cette décadence et insiste sur le caractère sacré de la constitution et son respect absolu. «L’auteur revient sans cesse tout au long de son ouvrage sur la nécessité absolue de respect de la loi fondamentale», rapporte le présentateur. L’auteur a même fait des propositions pour corriger ce triste tableau.
Le préfacier lui donne raison en ces termes : «La Constitution est sacrée. On l’applique. Et dans les rares cas où il faut l’interpréter, il faut respecter l’esprit qu’il y a dedans ; nous conduire dans la paix sociale.»
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