Leçon de la Pandémie du coronavirus : A quoi servent les actionnaires ?

A quoi servent les actionnaires ? Voilà une question de fond que soumet à la conscience des peuples et de millions de travailleurs, de manière involontaire mais avec force, la pandémie de COVID-19. Jusqu’ici, intangibles et revêtus d’une dimension quasi-fanatique, les sacro-saints dogmes libéraux, que sont la « compétitivité des entreprises », la « concurrence libre et non faussée », « la libre circulation des capitaux et des marchandises » et la « propriété privée des entreprises par les actionnaires » étaient ainsi imposées aux travailleurs et aux peuples comme la norme.

Lors de la défaite du camp socialiste en Europe et de la restauration du capitalisme en URSS, un pays, nous disait-on, ne peut fonctionner que grâce et par la « propriété privée » des moyens de production, de distribution et des banques, toujours plus « libérée » et toujours plus concentrée. Mal définie, mal identifiée, la nébuleuse des actionnaires, apparaissait alors drapée d’une nouvelle légitimité. Le FMI, la Banque Mondiale, l’OMC, l’OCDE, les gouvernements et les « thinks thanks » libéraux justifiaient les inégalités sociales en invoquant une pseudo-loi naturelle et en proclamant la fin de l’Histoire. Il n’y avait définitivement pas d’alternative à la « liberté individuelle d’entreprendre », aux « délocalisations à la recherche du moindre coût salarial », à la « propriété privée des moyens de production et d’échange » adossée à la financiarisation boursicoteuse de « l’argent qui fait l’argent » selon la célèbre expression d’une chanson africaine.

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Ce conditionnement idéologique des travailleurs et des peuples voulait faire accroire que la richesse croissante des « premiers de cordées » engendrerait naturellement et mécaniquement le « ruissellement vers les derniers de cordée » que sont les ouvriers, les paysans, les chômeurs, les femmes, les réfugiés sans papiers, et les peuples opprimés. Dans le même temps, l’illusion de la « société de consommation » à crédit post-seconde guerre mondiale avec la propriété d’une maison individuelle, la voiture et les vacances brouillait les repères et rapports de classe. Elle masquait la stratification réelle des travailleurs en catégories précaires sous-payés (femmes et immigrés) tandis que les surprofits, tirés de l’exploitation néocoloniale, permettaient d’obtenir, temporairement, l’adhésion de l’aristocratie ouvrière et de la petite bourgeoisie à un individualisme débridé présenté comme l’alpha et l’oméga du bonheur.

Atomisés, idolâtres, subjugués par les légendes du capitalisme enseignées comme vérité première à l’école, assénées par les médias et leurs brigades d’experts autoproclamés, et distillées par une publicité aliénante, le monde du travail et son noyau principal la classe ouvrière, étaient rendus invisibles par la relégation dans l’inconscient ou le subconscient des peuples qui attendaient en vain que les dividendes, en augmentation exponentielle permanente, finissent par ruisseler jusqu’à eux. De temps à autres, quand des catastrophes accidentelles ou « naturelles » frappaient de malheurs et de souffrances les travailleurs crédules aux salaires, pensions et indemnités toujours en baisse ou les peuples affamés des pays maintenus dans la pauvreté, les actionnaires, en dames patronnesses de la mondialisation, se délestaient de quelques dollars, euros, yens ou cfa pour faire œuvre de charité et glaner au passage remerciements et reconnaissance mise en scène par leurs médias.

Les épidémies d’Ebola du nom d’un fleuve du Congo, du VIH/Sida, du Chikungunya, du Paludisme/Malaria, de la Tuberculose, de Dengue et autres ne sévissaient jusqu’ici, pour l’essentiel, que dans les pays asservis, maintenus en état de sous-développement ou dans les quartiers ouvriers et populaires des mégalopoles. Bien confinés dans les quartiers chics des pays cœurs de l’impérialisme, les riches actionnaires, propriétaires des usines, des entreprises, des firmes multinationales ou transnationales, des banques, des bourses-casinos se croyaient à jamais à l’abri.

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C’est ainsi que la pandémie libérale pouvait se répandre en liquidant les services publics, en privatisant et en « marchandisant » la santé, l’école, l’eau, les terres, les forêts, l’électricité, les ports, les aéroports, les régies de chemin de fer, la poste, les télécommunications, et en se préparant même à le faire pour l’espace, etc. Tout ce qui compte pour les bourgeois régnant sur l’économie, la politique, la culture, sur la vie dans son ensemble en réalité, c’est la valeur marchande et la plus-value, c’est à dire le profit maximum et immédiat que leur assure la propriété privée des moyens de production et d’échange.

Exploitation de l’humanité par ces humains d’un genre particulier et exploitation sans limite de la nature en oubliant que l’humain est une composante de cette même nature :  tel est le monde dans lequel nous vivions avant le COVID-19. Un monde capitaliste d’actionnaires oisifs, de rentiers passifs, de « tondeurs de coupons », d’usuriers, de parasites dont le journal des milliardaires, Forbes, étale tous les ans les 500 plus grandes fortunes de la planète pour faire rêver les pauvres, leur faire adorer la charité des riches et leur faire oublier que les profits sont uniquement le fruit de leur travail et notamment de la part croissante de travail gratuit.

Et voilà qu’après de multiples alertes, dans un élan vengeur de la nature ravagée par la recherche effrénée du profit maximum de l’impérialisme prédateur, le COVID-19 se répand sur tous les continents, avec son cortège de malades et de morts, effaçant momentanément les frontières sanitaires entre riches et pauvres à l’intérieur d’un même pays et entre pays riches et pays pauvres à l’échelle du monde. Même si, là encore, riches et pauvres ne sont pas égaux devant la maladie, l’épidémie contraint néanmoins les gestionnaires politiques du système d’exploitation des travailleurs par le capital à stopper temporairement la machine économique de « l’argent dieu » et de la « mondialisation prédatrice reine ».

Tout semble à l’arrêt : « la concurrence libre et non faussée », la « compétitivité », « la libre circulation des capitaux, des marchandises et des services », « les délocalisations », la « bourse », « le profit immédiat » et même… la pollution. La nature, observe-t-on, reprend ses droits.

C’est la revanche de la valeur d’usage sur la valeur marchande. Chacun se met à produire ou reproduire les valeurs d’usage indispensables à la santé, à l’alimentation, aux besoins essentiels. Chacun redécouvre l’utilité sociale de l’ouvrier producteur des valeurs d’usage essentielles à la vie et sa préservation : masques, tests, blouses, respirateurs, médicaments, denrées alimentaires, etc. avec l’espoir que le confinement stoppe la propagation du virus et finisse par le faire disparaître.

La valeur d’usage prend le dessus sur la valeur marchande, la propriété collective sur la propriété individuelle, la solidarité sur l’individualisme, l’utilité sociale du métier, de la profession sur les métiers et professions superfétatoires, l’économie réelle sur l’économie fictive.

Des notions qui avaient été ringardisées et renvoyées aux oubliettes par la bourgeoisie refont surface du tréfonds du subconscient et de l’inconscient de l’humanité. La première est la nationalisation remise au goût du jour des exigences revendicatives et son prolongement révolutionnaire la socialisation des principaux moyens de production. L’humanité commence à pressentir la nécessité du communisme, jusqu’ici brocardé et diabolisé comme un mythe « criminel » par une classe de voleurs et de tueurs en série, mais seul antidote véritable au virus du capitalisme impérialiste.

A Wuhan en Chine, l’épidémie a été efficacement combattue par le Parti Communiste au pouvoir en raison de la possession par l’Etat, au nom de la classe ouvrière, de la paysannerie, des autres couches populaires et des secteurs patriotiques de la bourgeoisie nationale, des principaux moyens de production stratégique. On peut, d’ailleurs, faire le même constat dans les pays rescapés du camp socialiste comme le Vietnam, la Corée du Nord et Cuba.

Selon leur capacité et leur culture internationaliste, ce sont ces pays, rescapés du camp socialiste qui volent au secours des pays et continents où sévit le capitalisme libéral totalitaire mondialisé car la contamination mondiale du COVID-19 est la conséquence de l’impérialisme nommé par euphémisme « mondialisation » ou « globalisation » et de son totalitarisme libéral.

Dans les pays et les groupes de pays impérialistes (USA, Union Européenne, Japon) les dégâts de la pandémie font rage parce que les intérêts des actionnaires avides de dividendes nécessitent de mettre les populations au travail, quoiqu’il en coûte, même sans protection. Toutes les « incohérences, les incompétences, l’amateurisme, l’illogisme » que tout le monde constate dans les décisions politiques des gouvernants du monde capitaliste impérialiste et néocolonial ont pour source cette contradiction de classe entre les actionnaires qui recherchent le profit maximum pour capter les dividendes et les ouvriers qui revendiquent la protection de leur santé et la préservation de leur vie. C’est ce qu’expliquait Karl Marx : « Que chaque nation crèverait, qui cesserait de travailler, je ne veux pas dire pendant un an, mais pendant quelques semaines, chaque enfant le sait. Il sait également que les masses de produits correspondant aux différentes masses de besoins nécessitent des masses différentes et déterminées quantitativement de travail social global. Que cette nécessité de la distribution du travail social dans des proportions déterminées ne peut être abrogée par la forme déterminée de production sociale, mais peut changer seulement son mode de manifestation, c’est une évidence. Les lois de la nature ne peuvent absolument pas être abrogées. Ce qui peut changer dans des États historiquement différents, c’est seulement la forme par laquelle ces lois s’imposent. Et la forme par laquelle cette répartition proportionnelle du travail s’impose dans un État social, par laquelle la relation du travail social se fait valoir comme échange privé des produits du travail individuel, est précisément la valeur d’échange. La science consiste précisément à établir comment la loi de la valeur s’impose » (Karl Marx, lettre à Ludwig Kugelmann, 11 Juillet 1868)L’après pandémie sera marqué par des attaques anti-sociales, anti-démocratiques et anti-environnementales pour soi-disant payer les « dettes » et les « déficits », pour augmenter les horaires de travail, diminuer les salaires, précariser les emplois, licencier en masse, continuer à réduire les services publics, privatiser, etc.

L’épidémie de COVID-19 met aussi en exergue la contradiction fondamentale entre la socialisation mondialisée de la production économique et l’accaparement privée des profits, contradiction portée à des sommets jamais atteints par les délocalisations, l’externalisation et la sous traitance inhérentes au capitalisme mondialisé, c’est-à-dire à l’impérialisme, stade suprême du capitalisme selon la juste formule de Lénine.

En effet, les délocalisations vers les pays à main d’œuvre à bas coût ont créé une dépendance des pays impérialistes vis à vis des productions ouvrières des pays maintenus à dessein dans le sous-développement. L’exigence de relocalisations est, d’un coup, remise à l’ordre du jour en contradiction avec la tendance à l’expansion internationale du capital en quête du maximum de profits pour ses actionnaires que Lénine à décrit comme suit : « Le capitalisme en développement connaît deux tendances historiques dans la question nationale. La première : le réveil de la vie nationale et des mouvements nationaux, la lutte contre toute oppression nationale, la création d’Etats nationaux. La seconde : le développement et la multiplication de relations de toutes sortes entre les nations ; la destruction des barrières nationales, la création de l’unité internationale du capital, de la vie économique en général, de la politique, de la science, etc. Ces deux tendances constituent la loi universelle du capitalisme. La première domine au début de son développement, la seconde caractérise le capitalisme déjà mûr et qui va vers sa transformation en une société socialiste » (Notes critiques sur la question nationale, tome 20, p.20).

Dans les néo-colonies, le sous-développement, imposé par l’oppression impérialiste, fait que la lutte permanente contre la faim des populations, dont l’écrasante majorité survit grâce au travail informel, est en contradiction avec tout confinement pour endiguer le COVID-19 alors que le secteur formel, aux mains des actionnaires des firmes transnationales permet de piller les matières premières et d’exploiter la main d’oeuvre consécutivement à la possession des secteurs économiques stratégiques.

Là aussi, la contradiction fondamentale entre la socialisation mondialisée de la production économique et l’accaparement privée des profits éclate au grand jour et les actionnaires, leurs dividendes et leurs calculs d’instrumentalisation malthusienne de la pandémie pour réduire la démographie dite galopante des pays dominés, se révèlent nuisibles et extrêmement dangereux pour l’avenir de l’Humanité travailleuse.

Force est donc de constater que la valeur d’usage de la production est socialement et écologiquement supérieure à la valeur marchande et que la satisfaction des vrais besoin humains (alimentation, santé, logement, instruction, culture, loisirs) est consécutive du seul travail productif des ouvriers et des paysans.

Plus généralement la pandémie du COVID-19 montre à l’échelle mondiale que les actionnaires et leurs milliards de dividendes sont le principal obstacle au fonctionnement de la société à partir de la valeur d’usage pour que chacun puisse vivre correctement de son travail dans le respect de l’environnement. L’avenir est donc à la rupture avec la société capitaliste dans laquelle la valeur marchande est déterminée et fixée au détriment de la valeur d’usage par la propriété privée des moyens de production, la plus-value, la spéculation boursière, l’anarchie de la production, la compétitivité, la concurrence et le monopole privé.

Les actionnaires et leur soif de dividendes sont le principal facteur de la décadence et de la putréfaction du capitalisme impérialiste. Mais ils sont aussi le principal danger pour la survie même de l’humanité.

Ainsi, le problème essentiel, que doit résoudre l’humanité, est-il le renversement de l’impérialisme, stade suprême du capitalisme et le passage au socialisme, étape du communisme, dans les pays impérialistes et l’assurance d’une réelle indépendance nationale des pays aujourd’hui opprimés.

Diagne Fodé Roland

11 réponses

  1. Avatar de gombo
    gombo

    @@
    Le capitalisme pur, le libre echange tels que definis par les theroriciens de l’economie liberale comme Adam Smith n’existe nulle part; les perversions de ce systeme, la subordination des lois du marche a celles des monopoles, des transnationales , du complexe militaro-industriel sont la regle. Et cela 3 siecles apres…
    Pouquoi voulez vous trouver un socialisme pur ?
    Au Benin on a eu un regime militaire issu d’un putsch, qui pour se maintenir a cru bon se declarer marxiste lenisite, sans un parti , sans un progamme politique et economique, sans des cadres commis a ce programme… Kerekou n’etait pas plus socialiste que Talon n’est liberal… Des bouffons imposteurs soucieux de semaintenir au pouvoir en opprimant leurs peuples qui n’ont aucune voix au chapitre !

  2. Avatar de gombo
    gombo

    Bonne analyse.
    La grille d’analyse de l’economie et de la societe fournie par Marx et les pnseurs marxistes est encore une des meilleures 2 siecles apres.
    Mais de la a dire  » A Wuhan en Chine, l’épidémie a été efficacement combattue par le Parti Communiste au pouvoir en raison de la possession par l’Etat, au nom de la classe ouvrière, de la paysannerie, des autres couches populaires et des secteurs patriotiques de la bourgeoisie nationale, des principaux moyens de production stratégique  » il y a un pas que je franchirais pas…

  3. Avatar de OYOKPAKATO
    OYOKPAKATO

    14 mn de lecture? Hé jeune dame là, servez moi 200 francs de gbofloto = yovo doko et 3 verres de koutoukou

  4. Avatar de Tchité
    Tchité

    The biggest issue in the world today is that people are being used, and things are being loved. « People were made to be loved and things were(are) made to be used » not the other way around.

  5. Avatar de (@_@)
    (@_@)

    Le type à la « tchatche » et l’analyse est bonne dans la 1ère partie, la critique. « valeur d’usage… dessus…la valeur marchande, …l’économie réelle sur l’économie fictive ». Comme toujours avec l’argumentation des cocos, c’est après que ça se gâte franchement. Dans les pistes de solutions. Au Bénin et dans le monde, on a donné.
    \\\\ ///
    (@_@)

    1. Avatar de (@_@)
      (@_@)

      « A la « tchatche »… »

    2. Avatar de gombo
      gombo

      Au Benin, on a donne dans la pseudo-revolution , rien a voir avec le socialisme, encore moins le communisme

      1. Avatar de (@_@)
        (@_@)

        Ah ! Et dans quel pays on a donné dans la vraie révolution socialiste ou mieux communiste svp .
        \\\\ ///
        (@_@)

        1. Avatar de gombo
          gombo

          @@
          Le capitalisme pur, le libre echange tels que definis par les theroriciens de l’economie liberale comme Adam Smith n’existe nulle part; les perversions de ce systeme, la subordination des lois du marche a celles des monopoles, des transnationales , du complexe militaro-industriel sont la regle.
          Pouquoi voulez vous trouver un socialisme pur ?
          Au Benin on a eu un regime militaire issu d’un putsch, qui pour se maintenir a cru bon se declarer marxiste lenisite, sans un parti , sans un prgamme politique et economique, sans des cadres commis a ce programme… Kerekou n;etait pas plus socialiste que Talon n’est liberal… Des bouffons imposteurs !

  6. Avatar de Tchité
    Tchité

    « L’avenir est donc à la rupture avec la société capitaliste dans laquelle la valeur marchande est déterminée et fixée au détriment de la valeur d’usage par la propriété privée des moyens de production, la plus-value, la spéculation boursière, l’anarchie de la production, la compétitivité, la concurrence et le monopole privé. »

  7. Avatar de Tchité
    Tchité

    Belle analyse, mais longue. Il a tout dit.

    « C’est ainsi que la pandémie libérale pouvait se répandre en liquidant les services publics, en privatisant et en « marchandisant » la santé, l’école, l’eau, les terres, les forêts, l’électricité, les ports, les aéroports, les régies de chemin de fer, la poste, les télécommunications, et en se préparant même à le faire pour l’espace, etc. Tout ce qui compte pour les bourgeois régnant sur l’économie, la politique, la culture, sur la vie dans son ensemble en réalité, c’est la valeur marchande et la plus-value, c’est à dire le profit maximum et immédiat que leur assure la propriété privée des moyens de production et d’échange. »

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