Les relations entre le Maroc et l’Algérie traversent une période de turbulences, marquée par des désaccords profonds sur plusieurs fronts. La question du Sahara occidental demeure au cœur des tensions, avec des positions diamétralement opposées entre Rabat, qui revendique la souveraineté sur ce territoire, et Alger, qui soutient le Front Polisario et son aspiration à l’indépendance. Ces divergences s’étendent à d’autres domaines, notamment la délimitation des frontières maritimes, les accusations mutuelles d’ingérence dans les affaires intérieures, et les rivalités économiques et géopolitiques dans la région. La fermeture des frontières terrestres depuis 1994 et la rupture des relations diplomatiques en 2021 illustrent l’ampleur de la crise entre ces deux pays voisins.
La diplomatie marocaine monte au créneau
Dans une lettre adressée au Conseil de sécurité des Nations Unies, l’ambassadeur marocain Omar Hilale a vivement réagi aux propos du secrétaire général du ministère algérien des Affaires étrangères concernant le Sahara occidental. Le diplomate marocain a accusé son homologue algérien d’avoir détourné un débat consacré à la représentation de l’Afrique au Conseil de sécurité pour aborder la question du Sahara occidental, qualifiant cette intervention de détournement du sujet initial.
Hilale a rejeté catégoriquement la qualification du Sahara occidental comme « territoire colonisé« , affirmant que cette région fait partie intégrante du Royaume du Maroc. Il a rappelé que la réintégration du Sahara occidental à ce qu’il considère comme la « mère patrie » a été actée par l’ONU en 1975, suite à l’Accord de Madrid. Le diplomate marocain a également souligné que la question du Sahara occidental fait l’objet d’un processus politique sous l’égide des Nations Unies, visant à trouver une solution « réaliste, pragmatique, durable et mutuellement acceptable ».
La Kabylie, nouveau pion sur l’échiquier diplomatique
Dans sa riposte, l’ambassadeur marocain a introduit un élément inattendu dans le débat : la question de la Kabylie. Accusant l’Algérie de « double discours » sur l’autodétermination, Hilale a pointé du doigt la situation de cette région berbérophone du nord de l’Algérie. Il a affirmé que le peuple kabyle vit dans la marginalisation et la pauvreté, et que ses droits fondamentaux sont bafoués quotidiennement.
Cette mention de la Kabylie représente une escalade significative dans la rhétorique diplomatique entre les deux pays. En effet, le Maroc semble ainsi renvoyer à l’Algérie son propre argumentaire sur l’autodétermination, en suggérant que si Alger soutient ce principe pour le Sahara occidental, elle devrait logiquement l’appliquer également à la Kabylie. Cette manœuvre diplomatique vise à mettre en lumière ce que Rabat perçoit comme une incohérence dans la position algérienne.
Développement et ressources naturelles au cœur des débats
Le différend entre le Maroc et l’Algérie s’étend également à la question des ressources naturelles et du développement économique. L’ambassadeur Hilale a réfuté les allégations algériennes concernant l’exploitation des ressources du Sahara occidental, soulignant au contraire les investissements massifs réalisés par le Maroc dans cette région. Il a mis en avant le « Nouveau modèle de développement des provinces du Sud », lancé en 2015 par le roi Mohammed VI, qui aurait transformé le Sahara occidental en un pôle d’attraction pour les investissements étrangers.
En contrepoint, le diplomate marocain a critiqué l’utilisation des revenus pétroliers et gaziers de l’Algérie, accusant Alger de financer des groupes armés plutôt que de développer son propre territoire. Cette confrontation sur le terrain économique illustre la profondeur des divergences entre les deux pays, chacun cherchant à légitimer sa position en mettant en avant sa vision du développement régional.
Ces échanges diplomatiques houleux entre le Maroc et l’Algérie, avec l’introduction de la question kabyle dans le débat, démontrent l’intensification des tensions régionales. L’implication du Conseil de sécurité de l’ONU dans ces discussions souligne la dimension internationale de ce conflit, qui dépasse largement le cadre bilatéral. Alors que les deux pays campent sur leurs positions, la perspective d’une résolution rapide de leurs différends semble s’éloigner, laissant planer le spectre d’une instabilité prolongée dans la région du Maghreb.
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