Le Maghreb cherche depuis plusieurs années à diversifier ses exportations et à renforcer ses liens commerciaux avec l’Afrique subsaharienne. Cette stratégie vise à réduire la dépendance économique vis-à-vis de l’Europe et à exploiter le potentiel du marché africain en pleine croissance. Les pays maghrébins misent sur leurs atouts géographiques, culturels et linguistiques pour développer des partenariats privilégiés avec leurs voisins du sud. Ils investissent notamment dans les infrastructures de transport, les accords commerciaux et la promotion de leurs produits sur le continent. Cependant, cette ambition se heurte parfois à des obstacles inattendus, comme l’illustre le cas récent d’un produit algérien populaire en France.
Un succès fulgurant stoppé net
La pâte à tartiner El Mordjene, fabriquée par l’entreprise algérienne Cebon, a connu un engouement spectaculaire en France ces derniers mois. Son goût et sa texture onctueuse ont séduit les consommateurs français, propulsés par une campagne virale sur les réseaux sociaux. Telle une vague déferlante, la demande pour ce produit a rapidement dépassé l’offre, entraînant une flambée des prix et une véritable chasse au trésor dans les épiceries spécialisées.
Cependant, cet élan a été brutalement interrompu. Les autorités françaises ont récemment bloqué l’importation d’El Mordjene, invoquant des réglementations européennes sur les produits laitiers. Cette décision a provoqué la stupéfaction des fans de la pâte à tartiner et soulevé des interrogations sur les véritables motivations de cette interdiction.
Réglementations européennes ou protectionnisme déguisé ?
Officiellement, le blocage d‘El Mordjene repose sur l’article 20 du règlement européen n°2202/2292, qui régit l’entrée des produits contenant du lait dans l’Union européenne. L’Algérie ne figurant pas sur la liste des pays autorisés à exporter de tels produits, la pâte à tartiner se trouve dans l’impossibilité légale d’être commercialisée sur le sol français.
Toutefois, cette explication ne convainc pas tous les observateurs. Mustapha Zebdi, président de l’Association algérienne de protection des consommateurs, y voit une manœuvre protectionniste visant à préserver les intérêts des marques européennes, notamment Nutella. Il souligne que le produit circulait librement jusqu’à ce qu’il devienne une menace pour les acteurs établis du marché.
Vers une bataille commerciale et diplomatique ?
L’affaire El Mordjene pourrait avoir des répercussions au-delà du simple domaine de la consommation. Elle illustre les défis auxquels font face les pays du Maghreb dans leurs efforts pour pénétrer les marchés européens avec des produits à forte valeur ajoutée. La controverse soulève également des questions sur l’équité des règles commerciales entre l’Union européenne et ses voisins du sud de la Méditerranée.
Dans ce contexte, les autorités algériennes envisagent de prendre des mesures pour défendre les intérêts de leur industrie agroalimentaire. L’interdiction d’El Mordjene pourrait ainsi devenir un sujet de négociations diplomatiques entre l’Algérie et la France, voire entre le Maghreb et l’Union européenne dans son ensemble.
Pendant ce temps, les amateurs français de la pâte à tartiner algérienne devront se contenter des stocks restants, en attendant une éventuelle résolution du conflit. Cette situation met en lumière la complexité des relations commerciales internationales et les obstacles qui peuvent surgir lorsqu’un produit étranger connaît un succès inattendu sur un marché établi.
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