Gaz en Europe : les signaux au rouge ?

Photo de Quinten de Graaf sur Unsplash

Avant le conflit russo-ukrainien de 2022, l’Europe bénéficiait d’un approvisionnement stable en gaz naturel, principalement assuré par la Russie via des gazoducs stratégiques comme Nord Stream. Cette dépendance énergétique, fruit de décennies d’échanges commerciaux, permettait aux pays européens de maintenir des prix relativement stables et des réserves confortables. La distribution s’effectuait selon un schéma bien établi : la Russie fournissait environ 40% des besoins européens en gaz, complétés par des importations de GNL et la production locale, notamment des Pays-Bas et de la Norvège.

Une chute préoccupante des réserves européennes

Les données récentes de Gas Infrastructure Europe révèlent une situation alarmante : les sites de stockage européens ne sont plus remplis qu’à 59%, contre 75% l’année dernière à la même période. Cette diminution drastique résulte d’un hiver particulièrement rigoureux et de l’arrêt des approvisionnements russes. La France et les Pays-Bas, pourtant dotés d’importantes capacités de stockage, voient leurs réserves chuter sous la barre des 40%. Seuls quelques pays comme le Portugal, la Suède et l’Espagne maintiennent des niveaux de stockage rassurants, dépassant les 70%.

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Une facture colossale en perspective

Les analystes de Rabobank cités par Reuters, prévoient une baisse supplémentaire des réserves, qui pourraient atteindre seulement 30 à 35% de leur capacité d’ici fin mars 2025. Pour reconstituer ces stocks, l’Europe devra acquérir environ 120 cargaisons supplémentaires de gaz naturel liquéfié, représentant un investissement de 6 milliards de dollars aux prix actuels. Cette situation exceptionnelle se reflète dans les prix du gaz pour l’été, inhabituellement plus élevés que ceux de l’hiver prochain, une configuration rarement observée depuis la crise énergétique de 2022.

Les répercussions sur l’économie européenne

La production industrielle européenne, grande consommatrice de gaz, poursuit son déclin amorcé en 2022, confrontée à une demande atone, une concurrence chinoise agressive et des coûts énergétiques prohibitifs. Les prix actuels du TTF, principal indice gazier européen, atteignent 49 euros par mégawattheure, soit près du double par rapport à l’année précédente. Bien que les analystes écartent le risque de pénurie pour 2025, même pour la Slovaquie particulièrement touchée par l’arrêt du transit via l’Ukraine, la situation impose des adaptations. L’Allemagne envisage notamment des subventions pour faciliter le remplissage de ses sites de stockage. Cette tension sur le marché européen affectera inévitablement l’équilibre mondial du gaz, créant une possible concurrence avec l’Asie pour l’accès aux cargaisons de GNL, et ce jusqu’en 2027, malgré l’ouverture prochaine de nouveaux terminaux d’exportation américains.

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