Leur histoire est aussi singulière qu’émouvante. Nés au Mali, unis par la musique et par une condition commune – la cécité –, Amadou Bagayoko et Mariam Doumbia forment dès les années 1980 un duo musical au destin remarquable. Leur rencontre remonte à 1975 à l’Institut des jeunes aveugles de Bamako. Mariam avait perdu la vue à cinq ans des suites d’une rougeole mal soignée, tandis qu’Amadou, atteint de cataracte congénitale, était devenu aveugle à l’adolescence. Mariés en 1980, ils commencent ensemble à se produire sur les scènes maliennes avant de conquérir le public international, notamment grâce à leur album Dimanche à Bamako en 2004, qui les hisse parmi les figures incontournables de la world music. Leur complicité artistique, nourrie d’une longue histoire personnelle, résonnait dans chacune de leurs chansons. Le décès d’Amadou, à l’âge de 70 ans, met fin à cette aventure musicale hors du commun.
Depuis l’annonce de sa disparition le 4 avril, une émotion palpable s’est installée autour de leur domicile à Bamako. Des fans, des proches, des anonymes… tous viennent partager leur peine, dans un silence empreint de respect. La maison ne désemplit pas, marquée par des récitals de Coran, des regards perdus et des larmes discrètes. Cette atmosphère, décrite par le porte-parole de la famille comme « lourde mais pudique », reflète l’impact profond qu’Amadou a eu sur son entourage et son pays.
C’est dans ce contexte que Mariam Doumbia a accepté de livrer quelques mots, avec une dignité émouvante, sur les derniers moments de son époux. « En arrivant à l’hôpital, j’ai demandé au docteur de le regarder », raconte-t-elle. Le diagnostic a été sans appel : Amadou était déjà parti. Face à la brutalité de la nouvelle, Mariam a simplement soufflé : « Bon… il est parti comme ça. » Une phrase sobre, mais lourde de sens. Elle confie avoir aussitôt ressenti un vide immense : « Je suis restée seule et je vais désormais rester seule dans la vie. »
Entourée de leurs trois enfants, Mariam trouve néanmoins un peu de réconfort dans la présence constante de ceux qui ont aimé et admiré Amadou. Loin des projecteurs et des scènes internationales, c’est aujourd’hui une femme en deuil, une mère, et une artiste marquée par la perte de son partenaire de toujours, qui tente de faire face à l’absence.
Amadou Bagayoko sera inhumé à Bamako ce dimanche. Pour beaucoup, c’est une légende de la musique qui s’éteint. Pour Mariam, c’est un pilier de sa vie qui s’en va – un compagnon de route, de scène, et d’âme.
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