Ces dernières années, la présence occidentale au Sahel s’est considérablement réduite suite à une vague de coups d’État et de changements d’alliances. La France, longtemps puissance militaire dominante dans la région avec l’opération Barkhane, a dû retirer ses troupes du Mali en 2022, puis du Niger et du Burkina Faso en 2023. Ces pays ont expulsé les forces occidentales après des putschs militaires, accusant les anciennes puissances coloniales d’inefficacité contre les groupes djihadistes et d’ingérence dans leurs affaires intérieures. Simultanément, ces nations ont renforcé leurs liens avec la Russie, invitant le groupe Wagner puis les forces officielles russes à les soutenir militairement, marquant ainsi un bouleversement géopolitique majeur dans une zone traditionnellement sous influence française et occidentale.
Déploiement tchèque: nouvelle configuration des partenariats militaires
L’autorisation accordée par les législateurs tchèques pour l’envoi d’un contingent militaire marque une étape dans la reconfiguration des partenariats sécuritaires en Afrique. Trente militaires tchèques ont entamé leur mission en janvier, poursuivant l’engagement de Prague qui avait précédemment supervisé l’entraînement des forces maliennes et participé aux opérations européennes conjointes. Cette mission d’assistance technique devrait se maintenir jusqu’à fin 2026.
Les autorités militaires tchèques ont précisé aux médias nationaux que cette formation vise à développer des unités capables de faire face aux défis sécuritaires multiples: lutte contre l’extrémisme violent, criminalité transfrontalière, et équilibre face aux diverses influences internationales dans la région sahélienne. Cette formulation diplomatique reflète la compétition accrue entre puissances étrangères sur le continent.
L’Afrique au centre d’une reconfiguration géopolitique mondiale
La création de l’Alliance des États du Sahel (AES) regroupant le Mali, le Niger et le Burkina Faso représente une affirmation de souveraineté et une recherche de nouveaux partenariats stratégiques par ces nations. Cette confédération, formée après la rupture avec les partenaires occidentaux traditionnels, a établi des accords de coopération avec Moscou tout en affirmant sa volonté de diversifier ses relations internationales.
Les décisions souveraines des pays africains de modifier leurs alliances sécuritaires s’inscrivent dans une tendance plus large où les nations du continent cherchent à équilibrer leurs partenariats extérieurs. Les gouvernements sahéliens ont explicitement justifié leurs choix par la nécessité de trouver des solutions plus efficaces aux défis sécuritaires qui menacent leur stabilité.
Les observateurs notent que cette évolution témoigne de l’émergence d’une Afrique plus assertive dans ses choix diplomatiques et militaires. Les pays africains, confrontés à des menaces sécuritaires persistantes, évaluent pragmatiquement les offres de coopération en fonction de leur efficacité perçue et du respect de leur souveraineté. La diversification des partenariats militaires, qu’ils soient avec la Russie, la Chine, la Turquie ou les membres de l’OTAN, démontre une volonté d’échapper aux schémas d’influence exclusive.
Pour les nations sahéliennes, l’enjeu principal demeure la sécurisation de leurs territoires et la protection de leurs populations face aux groupes armés. La multiplication des acteurs internationaux offre à ces pays de nouvelles options stratégiques et un pouvoir de négociation accru. Cette dynamique transforme le Sahel en un espace où se redéfinissent non seulement les équilibres régionaux mais aussi les relations entre l’Afrique et le reste du monde, avec des nations africaines désormais plus actives dans la détermination de leur propre avenir sécuritaire.
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