Le Maroc engage une réforme inédite dans son secteur hôtelier. Pilotée par le Ministère du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Économie sociale et solidaire et la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT), cette transformation s’appuie sur la loi 80-14 et introduit un nouveau mode de contrôle fondé sur les « visites mystères ». Un levier stratégique pour améliorer la compétitivité de l’offre touristique et se rapprocher des standards internationaux.
Un dispositif inédit pour contrôler la qualité hôtelière
Les nouvelles règles du jeu s’annoncent strictes : les établissements hôteliers, anciens comme récents, devront se conformer à des critères de service plus rigoureux. Les visites mystères, confiées à des auditeurs spécialisés, consistent à évaluer les hôtels sans prévenir, en se faisant passer pour des clients ordinaires. Ces contrôleurs observeront l’accueil, testeront les services de restauration, inspecteront la propreté des chambres, la qualité de la literie, l’état des infrastructures telles que les piscines ou les infirmeries.
L’objectif : vérifier la conformité réelle des prestations fournies, qu’il s’agisse de premières classifications, de reclassifications obligatoires ou de simples contrôles périodiques. Cette approche vise à garantir une expérience client homogène et qualitative, indépendamment de la localisation ou de la catégorie de l’établissement.
Une stratégie en quatre volets d’évaluation
Début juillet, la SMIT a lancé une série de quatre appels d’offres, découpés selon les segments du marché hôtelier. Le premier marché, doté de 48,4 millions de dirhams, cible les hôtels « de luxe » et « cinq étoiles ». Le deuxième, d’un montant de 50,3 millions de dirhams, est consacré aux hôtels quatre étoiles de la région Marrakech-Safi. Un troisième, à l’échelle nationale pour les autres hôtels quatre étoiles, mobilise 28,8 millions de dirhams. Enfin, 20,3 millions de dirhams seront investis dans l’évaluation des établissements trois étoiles.
Ces missions seront confiées à des évaluateurs expérimentés, sélectionnés pour leur capacité à agir avec discrétion, impartialité et rigueur méthodologique. Cette exigence éthique renforce la crédibilité des audits et limite les tentatives de maquillage temporaire des prestations.
Renforcer l’attractivité touristique dans un contexte concurrentiel
Cette réforme intervient dans un contexte marqué par la volonté du Maroc de consolider son positionnement sur la carte touristique mondiale. En misant sur la qualité des infrastructures d’hébergement, les autorités cherchent à attirer une clientèle internationale exigeante, tout en fidélisant les voyageurs locaux et régionaux. L’hôtellerie étant un maillon central de l’écosystème touristique, sa professionnalisation constitue un levier majeur pour améliorer la réputation globale du pays.
Face à une concurrence accrue d’autres destinations méditerranéennes ou africaines, cette initiative vise également à créer un environnement normatif stable et crédible, condition essentielle à l’investissement privé dans le secteur. La réforme s’inscrit par ailleurs dans les ambitions du programme « Maroc 2023-2026 » qui vise à doubler le nombre de touristes d’ici 2030.
Une gouvernance publique à l’épreuve de la transparence
Derrière ces audits surprises, c’est aussi un enjeu de gouvernance qui se profile. En soumettant les établissements hôteliers à des contrôles indépendants et systématiques, l’administration entend assainir les pratiques et prévenir les dérapages liés à l’autodéclaration ou aux classements de convenance. Cette logique de transparence, appuyée par des textes d’application précis, pourrait inspirer d’autres secteurs liés à l’économie de services.
Avec l’introduction des visites mystères comme outil d’évaluation normatif, le Maroc franchit une étape importante dans sa stratégie de montée en gamme de l’hospitalité. Reste à voir si cette méthode produira les effets escomptés sur la durée et contribuera à repositionner durablement le royaume parmi les destinations touristiques de référence.



