La Chine accélère son programme de satellites en orbite basse. Le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information a publié une directive mercredi, incitant les opérateurs à tester rapidement des services commerciaux. Dans la foulée, GuoWang et Qianfan, les deux principales constellations, multiplient les lancements pour combler l’écart avec leurs concurrents. L’enjeu est stratégique : il s’agit d’assurer une couverture Internet globale et de sécuriser une souveraineté numérique.
Pékin intensifie ses tirs orbitaux
La Chine affiche une cadence de mise en orbite rarement observée. En 25 jours seulement, neuf fusées ont emporté de nouveaux satellites destinés à renforcer deux grandes constellations nationales. Cinq lancements concernaient GuoWang, projet supervisé par le China Satellite Network Group, organisme étatique directement chargé de cette ambition. Dans le même temps, Qianfan, soutenu par des capitaux venus de Shanghai, a poursuivi ses propres déploiements. Cette double dynamique montre la volonté du pays de multiplier les plateformes technologiques afin d’assurer une redondance et une sécurité dans le domaine spatial.
Le ministère de l’Industrie et des Technologies de l’information a publié un document demandant aux opérateurs de préparer des essais commerciaux “au moment jugé approprié”. Une manière d’encourager des applications concrètes, au-delà de la simple mise en orbite. L’objectif affiché : constituer, d’ici quelques années, un maillage capable de soutenir des services de connectivité, de navigation et de transmission sécurisée, avec des effets attendus tant sur le plan économique que militaire.
Actuellement, GuoWang compte 81 satellites actifs, avec une cible de 400 d’ici 2027 et un programme final de 13 000 unités. Qianfan, plus avancée sur le court terme, vise 648 avant la fin de l’année, pour un objectif total de 15 000. Ces chiffres témoignent d’une montée en puissance rapide, mais encore loin des standards mondiaux les plus élevés.
Ce retard apparaît surtout face à Starlink, la constellation développée par SpaceX, qui dépasse aujourd’hui 8 000 satellites en fonctionnement. L’écart technologique reste important et explique la pression exercée sur les acteurs chinois. Certains analystes estiment que Pékin cherche moins à rivaliser immédiatement qu’à éviter une dépendance extérieure dans un secteur considéré comme critique pour la souveraineté numérique. Une analyse plus détaillée pourrait être insérée à travers un futur lien vers un dossier spécialisé.
SpaceX, un acteur déjà incontournable
Pour comprendre les ambitions actuelles de Pékin, il est utile de rappeler le rôle joué par Elon Musk et son entreprise SpaceX dans la transformation du marché spatial. Fondée en 2002, la société américaine a bouleversé l’industrie en proposant des fusées réutilisables, réduisant considérablement les coûts de lancement. Grâce à cette innovation, Starlink a pu déployer rapidement des milliers de satellites en orbite basse afin d’offrir une couverture Internet mondiale.
Ce projet fait partie d’une logique commerciale, mais aussi stratégique. En fournissant une connectivité directe à des zones reculées, Starlink a acquis une importance géopolitique. L’exemple de la guerre en Ukraine a montré l’usage militaire de ce réseau, utilisé pour maintenir des communications malgré les destructions d’infrastructures terrestres. Ces éléments expliquent pourquoi plusieurs puissances, dont la Chine, cherchent à créer leurs propres constellations pour ne pas dépendre d’un acteur privé étranger.
Sur le plan réglementaire, les États-Unis bénéficient d’une position favorable grâce à la Federal Communications Commission (FCC), qui autorise et encadre le déploiement des satellites Starlink. Pékin tente désormais d’adopter une approche similaire, en publiant des directives officielles incitant les opérateurs nationaux à accélérer leurs projets. Cette volonté de créer un cadre clair vise aussi à rassurer les investisseurs et à organiser la concurrence interne entre GuoWang et Qianfan.
Les ambitions économiques sont considérables. Le marché mondial de l’Internet par satellite est estimé à plusieurs dizaines de milliards de dollars d’ici 2030. Les perspectives incluent des applications pour les transports maritimes, l’aviation, l’armée et les zones rurales encore mal desservies. La Chine souhaite capter une part de cette croissance et renforcer sa place dans l’économie numérique mondiale.
À ce stade, la multiplication des lancements chinois traduit une volonté claire de combler un retard structurel. Mais malgré les chiffres annoncés et l’accélération des programmes, GuoWang et Qianfan ne disposent pas encore de l’expérience accumulée par SpaceX dans l’exploitation commerciale. Le défi réside donc autant dans la capacité à mettre en orbite des milliers de satellites que dans la création d’un réseau opérationnel fiable et compétitif. Les prochains mois seront décisifs : la Chine devra démontrer que ses constellations ne sont pas seulement des projets ambitieux sur le papier, mais de véritables infrastructures capables de fournir des services durables.



