Lithium au Mali : comment la Côte d’Ivoire tire son épingle du jeu

La montée en puissance du lithium africain fait des remous bien au-delà des frontières maliennes. Alors que le Mali s’impose comme un acteur prometteur de l’extraction de ce minerai stratégique, c’est la Côte d’Ivoire, son voisin du sud, qui récolte déjà les premiers bénéfices logistiques de cette nouvelle ruée minière. Le port de San Pedro, désormais au cœur des exportations du lithium malien, illustre parfaitement comment Abidjan transforme son avance en infrastructures en véritable levier géoéconomique régional.

San Pedro, le nouveau poumon logistique du lithium malien

Le premier convoi de concentré de lithium extrait du site de Bougouni, dans le sud du Mali, vient d’être expédié vers le port de San Pedro comme l’a rapporté Agence Ecofin. Derrière cette opération, la société britannique Kodal Minerals ouvre une nouvelle ère dans les relations économiques entre Bamako et Abidjan. Le choix de la Côte d’Ivoire pour acheminer ce minerai n’est pas un hasard : le pays a anticipé cette transformation du paysage énergétique africain en modernisant ses infrastructures portuaires.

Le port de San Pedro possède des atouts indéniables. L’une de ses particularités majeures réside dans le fait qu’il s’agit d’une plateforme multimodale connectant efficacement les corridors maliens, guinéens et burkinabè, et capable de rivaliser avec les grands ports d’Afrique de l’Ouest tels que Dakar ou Tema. Pour Abidjan, il s’agit d’un coup de maître logistique — une manière d’élargir son influence économique tout en consolidant son rôle de pivot entre les pays enclavés du Sahel et l’océan Atlantique.

Le Mali, riche en lithium mais dépendant des ports voisins

Le Mali, lui, regorge de gisements de lithium parmi les plus prometteurs du continent. Des projets miniers attirent des investissements étrangers considérables, portés par la demande mondiale pour ce métal essentiel à la fabrication des batteries électriques. Cependant, le pays ne disposant pas d’accès à la mer, il reste tributaire de ses voisins côtiers pour exporter sa production.

C’est précisément là que la Côte d’Ivoire trouve son avantage : ses infrastructures modernes comblent les lacunes du Mali. Tandis que les compagnies minières maliennes cherchaient la meilleure route d’exportation, San Pedro s’est imposé naturellement comme la solution la plus fiable et la plus rentable. Ce partenariat tacite entre un pays producteur et un pays logisticien dessine une nouvelle géographie du commerce minier en Afrique de l’Ouest.

Une alliance pragmatique aux retombées régionales

Ce rapprochement entre Bamako et Abidjan dépasse la simple question du transport. Il traduit une complémentarité stratégique : le Mali mise sur ses ressources, la Côte d’Ivoire sur ses infrastructures. À terme, cette dynamique pourrait renforcer l’intégration économique régionale, créer des emplois dans la logistique ivoirienne et accélérer le développement industriel lié à la transformation des minerais. Derrière ces échanges, se profile aussi une compétition sous-jacente entre les grands ports ouest-africains. San Pedro s’affirme désormais comme un acteur incontournable du commerce de matières premières, capable d’attirer les flux maliens qui transitaient autrefois par Dakar ou Tema.

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