Hommage à Mgr Adoukonou, un grand combattant de l’inculturation (par Ambassadeur Loko)

(LA LUTTE CONTRE LA RECOLONISATION DE L’AFRIQUE : QUEL LIEN ENTRE INCULTURATION, CRÉATIVITÉ ET DIPLOMATIE DE LA PENSÉE ?) Au Vatican, j’ai souvent parlé de recolonisation de l’Afrique avec Monseigneur Barthélémy ADOUKONOU, mon ancien professeur de langue FON en classe de sixième au Collège Père Aupiais (1969) et conseiller occulte pendant ma mission diplomatique près le Saint-Siège (2010 à 2016).

Lui rendre hommage, c’est reconnaître en lui l’un des grands penseurs africains ayant compris que la véritable décolonisation ne se décrète pas : elle se pense, se vit et se crée. Dans un contexte où les formes subtiles de domination persistent à travers les systèmes économiques, culturels et cognitifs, la lutte contre la recolonisation de l’Afrique appelle une réponse intégrale.

L’inculturation, d’abord, constitue un acte de résistance spirituelle et intellectuelle. Elle consiste à faire dialoguer la foi, la culture et la raison africaine pour que le christianisme, la philosophie et le développement cessent d’être perçus comme des emprunts exogènes. En s’appropriant les valeurs locales – la solidarité, le respect de la vie, la relation à l’autre –, l’Afrique retrouve la cohérence interne de son humanisme. Or, sans ce travail d’enracinement, comment prétendre à une souveraineté culturelle authentique ? Mgr Adoukonou insistait sur cette tâche de refondation : « L’Afrique doit s’aimer assez pour penser avec ses propres catégories », rappelant que la recolonisation commence là où la pensée se tait.

La créativité, ensuite, apparaît comme le prolongement actif de cette inculturation. Elle est le lieu où l’esprit africain invente les formes nouvelles de son avenir, sans nostalgie ni mimétisme. Dans les arts, les sciences, la théologie ou la diplomatie, la créativité réaffirme la capacité de l’Afrique à produire du sens. N’est-ce pas là l’antidote à la dépendance structurelle qui confine le continent dans la réception plutôt que dans la conception ? L’imaginaire créateur devient alors un instrument de souveraineté intellectuelle.

Enfin, la diplomatie de la pensée incarne la dimension dialogique de cette libération. Elle ne se réduit pas à la diplomatie politique, mais renvoie à la capacité de l’Afrique à faire entendre sa voix dans les débats mondiaux, non par revendication mais par proposition. Comment peser dans la régulation globale sans une pensée articulée et crédible ? Mgr Adoukonou invitait à « faire de la pensée un acte diplomatique », c’est-à-dire à entrer dans la conversation universelle en y apportant l’intelligence du vivre-ensemble africain.

Ainsi, l’inculturation fonde, la créativité projette, et la diplomatie de la pensée relie. C’est dans cette triple dynamique que se joue la véritable émancipation : celle d’un continent qui, en s’assumant comme sujet pensant, devient partenaire d’un monde à réhumaniser.

Par Ambassadeur Dr. Théodore C. LOKO (à la retraite)

Enseignant-chercheur

1 réflexion au sujet de « Hommage à Mgr Adoukonou, un grand combattant de l’inculturation (par Ambassadeur Loko) »

  1. Hommage à Mgr Adoukonou, un grand combattant de l’inculturation (par Ambassadeur Loko)

    N’est-ce-pas ce Saigneur qui a semé la zizanie au Nord du pays par des actes de sorcelleries jusqu’à fait fuir certains prêtes qui sont se sont réfugiés en Europe…son agissements étaient remontés jusqu’au Vatican où le pape François avait reçu l’un de ses victimes.
    Comme Caïn, l’Œil (sa conscience) doit être en train de le tourmenter dans sa tombe ( c’est ce qu’enseigne les paroles du Livre qu’il a prêché en tant que chrétien)

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