Sénégal : Non-assistance, violences familiales… les interrogations de l’AJS sur le cas Nogaye Thiam

Invitée de l’émission En Vérité sur Radio Sénégal, Aminata Fall Niang, présidente de l’Association des Juristes Sénégalaises, est revenue sur le décès de la jeune Nogaye Thiam, retrouvée morte dans sa chambre dans des circonstances encore floues. Elle a indiqué que l’organisation mène ses propres vérifications pour comprendre les faits avant toute prise de position officielle. Les premiers témoignages signalent que la victime serait restée deux jours sans prise en charge, une situation qualifiée d’intolérable par la juriste. L’affaire, qui a suscité une forte mobilisation en ligne, pose la question de la violence au sein des ménages et du rôle des familles élargies. L’enjeu central porte désormais sur la qualification juridique des faits et sur la protection effective des femmes.

Enquête interne de l’AJS et premières pistes juridiques

La présidente de l’AJS explique que les informations disponibles proviennent principalement des médias et des réseaux sociaux, ce qui ne permet pas encore d’adopter une position formelle. L’association a lancé une série de collectes d’informations pour obtenir un tableau plus fiable de la situation, une démarche qui sera intégrée à un rapport susceptible d’être consulté dans un lien ultérieur. Aminata Fall Niang estime que si la victime est réellement restée isolée dans sa chambre durant deux jours malgré les appels de son enfant, la qualification de non-assistance à personne en danger pourrait être examinée. La juriste précise toutefois que seule une enquête complète permettra d’établir d’éventuelles responsabilités pénales.

Les violences au sein des familles constituent un phénomène que l’AJS rencontre régulièrement à travers ses antennes juridiques. Les témoignages rapportés sur cette affaire évoquent des tensions avec la belle-famille, un élément que la présidente juge préoccupant, notamment au regard des violences exercées entre femmes. Elle appelle à revisiter les comportements dans les ménages pour limiter les situations de maltraitance, rappelant que la violence peut être physique, sexuelle, économique ou psychologique. Les données recueillies par les boutiques de droit montrent l’ampleur du problème, avec plus de 6 000 personnes accueillies en 2024, dont environ 350 cas directement liés à des violences sur des femmes.

Une affaire devenue symbole et révélatrice de mutations sociales

Le décès de Nogaye Thiam a rapidement provoqué une vaste réaction sur les réseaux sociaux, au point de déclencher une prise de parole du mari de la victime. Celui-ci a affirmé que le drame relevait de « l’involontaire », une déclaration destinée à apaiser les tensions alors que des spéculations circulaient sur les responsabilités de chacun. Cet épisode a transformé l’affaire en un débat national, certains internautes sollicitant une meilleure communication des autorités, tandis que d’autres appelaient à la prudence en attendant les résultats de l’enquête.

Au-delà des aspects judiciaires, Aminata Fall Niang voit dans ce dossier le reflet d’évolutions profondes de la société sénégalaise. Elle encourage les sociologues à analyser les transformations en cours afin d’identifier les causes structurelles de la violence domestique et de proposer des pistes d’action. Le cadre légal sénégalais repose pourtant sur un corpus de traités internationaux ratifiés depuis plusieurs décennies, qui garantissent la protection des femmes contre les violences. Selon la présidente de l’AJS, le défi ne réside pas dans le droit mais dans son application, ce qui implique un renforcement des mécanismes de protection, une réponse judiciaire plus rapide et un changement durable des mentalités.

Les autorités compétentes poursuivent actuellement leurs investigations pour déterminer les circonstances exactes du décès de la jeune femme.

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