Accords de paix de Trump : entre promesses spectaculaires et réalité du terrain

Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier 2025, Donald Trump multiplie les cérémonies de signature d’accords de paix, se présentant comme un « président de la paix » capable de résoudre des conflits séculaires. Pourtant, sur le terrain, la réalité s’avère bien plus nuancée que les discours triomphants prononcés dans les salons dorés de Washington.

Des signatures sous les projecteurs

Le 4 décembre 2025, le président américain préside une cérémonie solennelle à l’Institut Donald Trump pour la paix, rebaptisé en son honneur quelques heures plus tôt. Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo, et Paul Kagame, son homologue rwandais, apposent leurs signatures sur les Accords de Washington pour la paix et la prospérité. Trump qualifie l’événement de « grand miracle », vantant un accord « puissant et détaillé » censé mettre fin à trois décennies de violence dans l’est congolais.

Cette scène montre parfaitement la stratégie diplomatique trumpienne : des mises en scène spectaculaires, des déclarations emphatiques et la promesse d’une paix imminente. Le président américain affirme avoir résolu huit conflits majeurs depuis son investiture, du Caucase à l’Afrique centrale, en passant par le Moyen-Orient.

Quand la réalité rattrape les promesses

Mais derrière ces annonces retentissantes se cache une réalité plus sombre. Au moment même où Trump célèbre la signature des accords RDC-Rwanda, d’intenses combats font rage dans la province du Sud-Kivu. Des tirs d’armes lourdes résonnent aux abords de Kamanyola, une agglomération frontalière contrôlée par le groupe armé M23, soutenu par Kigali. À Kaziba, les affrontements ont repris dès cinq heures trente du matin, avec des avions de chasse pilonnant la zone quelques heures plus tard.

Reagan Miviri, chercheur à l’Institut congolais Ebuteli, estime que cette cérémonie résulte d’une forte pression américaine et souligne que pour Washington, l’essentiel semble être l’événement lui-même plutôt que le contenu de l’accord. Le président Tshisekedi, conscient des défis, a d’ailleurs averti que la mise en œuvre serait exigeante et difficile, évoquant des « hauts et des bas » à venir.

L’effondrement rapide de certains accords

Le cas cambodgien montre encore plus crûment l’écart entre annonces et résultats. Fin juillet 2025, Trump facilite la signature d’un accord de paix entre la Thaïlande et le Cambodge, présenté comme une avancée majeure pour stabiliser une frontière disputée depuis des décennies. Moins de deux mois plus tard, le 9 décembre, la Thaïlande lance des frappes aériennes sur le Cambodge, déclenchant une escalade qui force des dizaines de milliers de civils à fuir leurs foyers. L’accord présenté comme un succès diplomatique s’effondre en quelques semaines.

Cette fragilité n’est pas isolée. Même lorsque les parties formalisent leurs engagements, les dynamiques sous-jacentes des conflits persistent. Les autorités congolaises et le M23 s’accusent régulièrement de violer le cessez-le-feu qu’ils se sont pourtant engagés à respecter dans le cadre d’une médiation parallèle menée par le Qatar.

Gaza : une exception relative

Parmi les multiples initiatives trumpiennes, l’accord israélo-palestinien signé le 9 octobre 2025 se distingue par sa relative tenue. Le plan de paix en vingt points a effectivement permis un cessez-le-feu qui perdure depuis octobre. Les otages vivants ont été libérés et Israël a retiré une partie de ses forces, conformément aux engagements pris.

Toutefois, même cet accord demeure fragile. Le Hamas accuse régulièrement Israël de violations via des frappes aériennes sporadiques, et la gouvernance transitoire de Gaza reste sous surveillance internationale constante. La reconstruction de l’enclave dévastée et la création d’un cadre politique stable constituent des défis de longue haleine.

Une stratégie médiatique avant tout ?

Pour de nombreux observateurs, ces cérémonies répondent davantage à une logique de communication qu’à une véritable résolution des conflits. Trump, qui ambitionne ouvertement le prix Nobel de la paix, multiplie les initiatives diplomatiques susceptibles de renforcer son image de pacificateur international.

Plusieurs commentateurs relèvent que le président américain cherche à se distinguer de son prédécesseur Joe Biden et à consolider son héritage diplomatique. La création de l’Institut Donald Trump pour la paix, la mise en scène grandiose des signatures et les déclarations enthousiastes contrastent avec la complexité des situations sur le terrain.

Les motivations économiques transparaissent également. Dans le cas congolais, Trump a explicitement évoqué son espoir que les États-Unis puissent exploiter les minerais stratégiques de la RDC, essentiels aux batteries électriques, avant qu’ils ne soient acheminés vers la Chine. Cette dimension transactionnelle s’inscrit dans une vision où les accords de paix deviennent des vecteurs d’influence géopolitique et d’avantages commerciaux.

Des Accords d’Abraham en expansion prudente

Au-delà des zones de conflit actif, Trump poursuit l’expansion des Accords d’Abraham, sa réalisation diplomatique phare du premier mandat. Le 6 novembre 2025, le Kazakhstan devient le premier pays à rejoindre ces accords durant le second mandat, bien que des relations diplomatiques existaient déjà avec Israël depuis les années 1990.

L’administration américaine espère notamment intégrer l’Arabie Saoudite, ce qui constituerait une avancée symbolique majeure. Le prince héritier Mohammed bin Salman a exprimé sa volonté de rejoindre les accords, mais à condition qu’un chemin clair vers la création d’un État palestinien soit garanti. Trump a néanmoins privilégié le renforcement des relations bilatérales avec Riyad, concluant des accords de sécurité et la vente de chasseurs F-35 sans conditionner ces transactions à la normalisation avec Israël.

Un bilan contrasté

Sur les quatre principaux accords concernant des pays en guerre active signés en 2025, seul celui de Gaza tient partiellement. Les accords RDC-Rwanda et Thaïlande-Cambodge se sont révélés largement inefficaces, les combats se poursuivant ou reprenant rapidement après les signatures.

Paul Kagame et Félix Tshisekedi ont d’ailleurs adopté une tonalité bien plus prudente que Trump lors de la cérémonie de décembre. Le président rwandais a averti qu’il y aurait des hauts et des bas dans l’application de l’accord, tandis que son homologue congolais a insisté sur la difficulté du chemin à parcourir.

Cette prudence contraste avec l’optimisme affiché par Trump, qui prédit que les deux dirigeants africains passeront désormais beaucoup de temps à se donner des accolades et que tout le monde gagnera beaucoup d’argent grâce à ces accords.

Une diplomatie imprévisible

L’approche diplomatique de la seconde administration Trump se caractérise par son imprévisibilité et son manque de coordination avec les alliés européens. Sur des dossiers allant de l’Ukraine au Moyen-Orient, Washington contourne souvent l’Union européenne, privilégiant des initiatives unilatérales.

Concernant le conflit ukrainien, Trump a abandonné toute exigence de cessez-le-feu préalable après sa rencontre avec Vladimir Poutine en Alaska, prônant désormais un accord de paix global. Ce revirement, perçu comme favorable au président russe, inquiète les Européens qui redoutent que Trump accepte des concessions territoriales importantes au détriment de Kiev.

Le chancelier allemand, le Premier ministre britannique et le président français ont multiplié les mises en garde, Emmanuel Macron soulignant la propension de la Russie à ne pas tenir ses engagements.

Entre cérémonies grandioses et réalité des champs de bataille, les accords de paix de Trump révèlent un décalage persistant. Si certaines initiatives comme le cessez-le-feu à Gaza montrent des résultats tangibles, d’autres demeurent largement symboliques, voire totalement inefficaces face aux dynamiques profondes des conflits.

La multiplication de ces signatures soulève une question fondamentale : ces accords constituent-ils de véritables avancées vers la paix ou simplement des succès diplomatiques de façade, destinés à nourrir une image présidentielle avant les échéances électorales américaines ? Les prochains mois apporteront des éléments de réponse, alors que la communauté internationale observe avec attention la mise en œuvre réelle de ces engagements solennels.

1 réflexion au sujet de « Accords de paix de Trump : entre promesses spectaculaires et réalité du terrain »

  1. « Emmanuel Macron soulignant la propension de la Russie à ne pas tenir ses engagements »

    Inversion accusatoire encore et encore !
    Quelles promesse a-t-il tenu, ce ptit c**?

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