L'AES a-t-elle un nouvel allié ? Le Mali et la Guinée amorcent un rapprochement

Une délégation malienne de haut niveau, dirigée par le Premier ministre Abdoulaye Maïga, s‘est rendue à Conakry cette semaine pour renforcer les relations bilatérales avec la Guinée. Cette visite officielle, confirmée mardi par les services de la Primature guinéenne, marque une volonté affichée de revitaliser les liens entre ces deux nations voisines qui partagent une frontière commune et un héritage historique profond.

Les discussions entre Abdoulaye Maïga et son homologue guinéen Amadou Oury Bah ont porté sur des dossiers stratégiques majeurs : la sécurité régionale, l’intégration économique et la coopération énergétique. Pour le chef du gouvernement guinéen, les enjeux sécuritaires maliens ne peuvent être dissociés de ceux de son pays, les deux territoires étant intrinsèquement liés par leur proximité géographique et leurs défis communs.

La Guinée promet un accès maritime au Mali

L’un des engagements les plus significatifs de cette rencontre concerne l’accès du Mali à l’océan Atlantique via le territoire guinéen. Amadou Oury Bah a souligné que cette facilitation représente bien plus qu’une simple question logistique : il s’agit d’une obligation morale envers le peuple malien, indépendamment des turbulences politiques régionales. Cette déclaration résonne particulièrement alors que Bamako cherche à diversifier ses partenaires et ses routes commerciales.

Le Premier ministre guinéen a également insisté sur la nécessité d’actualiser plusieurs projets d’infrastructure d’intérêt mutuel. Selon lui, la revitalisation de la coopération bilatérale passe obligatoirement par la concrétisation de ces initiatives structurantes qui pourraient transformer les échanges économiques entre les deux pays.

L’Alliance des États du Sahel, créée en septembre 2023, regroupe actuellement le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Ces trois nations ont formé ce bloc après avoir connu des transitions militaires et s’être progressivement distanciées de la CEDEAO, qu’elles ont officiellement quittée en janvier 2024. L’AES repose sur des principes de défense collective et de souveraineté face aux menaces sécuritaires qui fragilisent le Sahel. La Guinée, elle aussi dirigée par une transition militaire depuis septembre 2021, pourrait trouver dans ce rapprochement avec Bamako des intérêts convergents, même si aucune adhésion formelle à l’alliance n’a été évoquée.

Mali-Guinée : réactiver l’héritage de Sékou Touré et Modibo Keïta

Abdoulaye Maïga n’a pas manqué de rappeler la vision panafricaine qui avait uni les pères fondateurs des deux républiques, Ahmed Sékou Touré et Modibo Keïta. Cette référence historique n’est pas anodine : elle inscrit le rapprochement actuel dans une continuité idéologique et symbolique, celle d’une Afrique solidaire et intégrée. Le Premier ministre malien a d’ailleurs reconnu que son pays a toujours bénéficié du soutien de Conakry dans ses moments critiques.

Les deux gouvernements ont convenu de poursuivre leurs échanges pour relancer les travaux de la grande commission mixte de coopération Guinée – Mali, un cadre institutionnel qui permettra de formaliser et de coordonner les projets bilatéraux. Cette réactivation pourrait constituer un mécanisme concret pour traduire les engagements politiques en réalisations tangibles.

Ce rapprochement entre Bamako et Conakry survient à un moment où les configurations géopolitiques sahéliennes évoluent rapidement. Si la Guinée ne rejoint pas officiellement l’AES, cette dynamique pourrait néanmoins créer une zone d’influence politique et économique élargie en Afrique de l’Ouest, potentiellement en marge des structures régionales traditionnelles. Les prochains mois révéleront si cette relance des relations bilatérales se traduira par des partenariats économiques substantiels ou si elle demeurera au stade des déclarations d’intention.

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