Depuis fin novembre 2025, un convoi d’une quarantaine de camions transportant plus de 1 000 tonnes d’uranium a quitté la mine de la Somaïr à Arlit pour rejoindre Niamey. Cette opération a immédiatement provoqué la réaction d’Orano, le groupe français qui exploitait ce site avant d’en perdre le contrôle opérationnel en décembre 2024, suite à la nationalisation décidée par les autorités nigériennes. Le géant du nucléaire a dénoncé un transport illégal et obtenu l’ouverture d’une enquête à Paris pour « vol en bande organisée dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère ». Une semaine après cette annonce judiciaire, Niamey a choisi de répliquer publiquement.
Le Niger accuse Orano de franchir une ligne rouge
Lors d’un point de presse conjoint tenu le 27 décembre, les ministres nigériens des Mines et de la Justice ont fermement rejeté toute accusation de vol. Le commissaire-colonel Ousmane Abarchi, en charge du portefeuille des Mines, a estimé qu’Orano franchissait « un seuil inacceptable » en assimilant l’exercice de la souveraineté nationale à un détournement de ressources. Pour les responsables nigériens, le yellowcake extrait du sol appartient au peuple et l’État demeure libre de le commercialiser selon ses propres règles.
Le ministre a également pointé ce qu’il qualifie de déséquilibre systémique ayant longtemps caractérisé les échanges commerciaux autour de l’uranium. Les autorités entendent désormais appliquer strictement leur réglementation minière et sanctionner tout opérateur qui s’en écarterait. Une mise en demeure aurait d’ailleurs été adressée à Orano dès septembre dernier, réclamant plus de 4 milliards de francs CFA, soit environ 6 millions d’euros.
Un bras de fer juridique et diplomatique entre Niamey et Paris
Plusieurs procédures d’arbitrage international opposent actuellement l’État nigérien au groupe français devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements. En septembre 2025, cette instance rattachée à la Banque mondiale avait ordonné au Niger de ne pas céder ni transférer l’uranium produit par la Somaïr. Les autorités de Niamey contestent toutefois la portée de cette décision et maintiennent leur ligne : disposer librement des richesses du sous-sol relève de leurs prérogatives souveraines.
Ce différend illustre la rupture consommée entre le Niger et son ancien partenaire historique dans le secteur nucléaire. Depuis la nationalisation de la Somaïr, dont Orano détenait auparavant 63,4 % des parts, les deux parties campent sur des positions irréconciliables. Paris invoque le droit international et la protection des investissements, tandis que Niamey revendique sa pleine autonomie sur l’exploitation et la vente de ses ressources naturelles.




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